Logistique : Iris Lab veut recharger sans fil les robots des entrepôts

Pour contourner l'autonomie limitée des batteries, la transmission de puissance électrique sans fil gagne du terrain. Des ingénieurs passés par l'Isae-Supaero à Toulouse veulent alimenter à distance les drones et les robots des entrepôts logistiques.
(Crédits : Reuters)

Puiser dans l'énergie solaire depuis l'espace pour livrer par ondes électromagnétiques de l'électricité sur Terre sans le moindre câble... l'idée semble sortir d'un scénario de science-fiction et pourtant elle est déjà une réalité. Fin 2022, l'Agence spatiale européenne, la startup néo-zélandaise Emrod et Airbus sont parvenus au cours d'une démonstration à transmettre de l'électricité sur 36 mètres par ondes électromagnétiques entre un hangar du constructeur aéronautique près de Munich et un frigo du festival Oktoberfest. La startup aimerait à terme lancer sa propre constellation de satellites et créer un nouveau réseau de distribution d'énergie en offrant grâce à la transmission sans fil une alternative au stockage d'électricité dans des batteries.

Contourner l'autonomie limitée des batteries

Cette expérience est loin d'être isolée. La transmission d'électricité sans fil connaît un regain d'intérêt ces dernières années pour contourner l'autonomie limitée des batteries et faire face aux énormes besoins d'électrification de l'économie.

 « Face à l'urgence climatique, nous devons apprendre à nous passer des énergies fossiles. Mais le développement des voitures électriques ou des drones est freiné par les capacités des batteries. Sur un drone, la batterie peut représenter 30% de la masse de l'appareil et n'offrir que 30 minutes d'autonomie. Aujourd'hui, le fait d'être autant dépendant des batteries, c'est extrêmement mauvais : les batteries sont très polluantes, coûtent extrêmement cher et reposent sur des matériaux importés de Chine. Faire une transmission à distance permettrait un gain écologique énorme », fait valoir Bastien Fabre, cofondateur de la startup Iris Lab.

Au cours de ses études à l'Isae-Supaero à Toulouse, l'ingénieur a développé avec un camarade de promo une technologie de transmission de puissance sans fil par flux optiques pour alimenter en continu par exemple des drones ou des robots dans un entrepôt logistique.

Un premier test avec un drone

Un premier démonstrateur a permis l'an dernier de tester la transmission sans fil vers un drone. Ici, pas question d'utiliser les ondes électromagnétiques, qui pourraient brouiller les capteurs du drone, mais plutôt d'utiliser un laser. Une caméra filmait le ciel et la présence du drone, volant à un kilomètre d'altitude, était détectée par une intelligence artificielle. La position du drone a ensuite été envoyée à la tourelle postée au sol qui a pivoté pour pointer le laser vers l'engin volant. La réception de l'énergie est réalisée par de petits convertisseurs photovoltaïques installés sur le drone.

En parallèle, Iris Lab développe une technologie optique sans fil pour de courtes distances, de l'ordre de plusieurs dizaines de mètres, par LED : moduler la lumière à une fréquence imperceptible à l'œil nu suffit à transmettre à distance la puissance électrique. Cette technologie pourrait être utilisée pour alimenter en continu les robots qui transportent des colis dans les entrepôts logistiques.

« Il reste encore plusieurs verrous technologiques à lever », reconnaît Bastien Fabre. Dans le cas de la technologie laser, la startup planche sur la sécurisation de l'environnement autour du laser. « Il faut pouvoir couper le laser quand il ne pointe plus le robot et respecter certaines distances de sécurité », ajoute l'entrepreneur.

Une levée de deux millions d'euros attendue cette année

Il faudra aussi concevoir de petits panneaux photovoltaïques adaptés pour un tel usage. « Les récepteurs solaires existants coûtent 100 euros le watt, ce qui n'est pas du tout rentable, parce qu'ils sont fabriqués à partir de semi-conducteurs épais et très onéreux », poursuit-il. Iris Lab est actuellement accompagnée et financée par la SATT Paris-Saclay dans le cadre d'un contrat de maturation pour développer des récepteurs à partir d'un matériau beaucoup plus léger et moins onéreux, de quoi atteindre la rentabilité à l'usage.

La startup, identifiée par le dispositif Lanceur d'étoiles, aimerait commercialiser à grande échelle son innovation dès 2026 avec de premières pré-séries en 2025. Sur ce créneau, Iris Lab est pour l'instant en concurrence avec deux sociétés : Power Light Technologies qui développe la transmission par laser pour l'armée américaine et en Europe, le Luxembourgeois Skygrids veut utiliser le laser pour alimenter les drones. Pour se démarquer, la pépite française entend engager en premier la transmission par LED pour les robots logistiques, un marché sur lequel l'innovation pourrait plus facilement trouver des débouchés commerciaux. La collaboration avec un prestigieux laboratoire de recherche français, considéré parmi les meilleurs en Europe, pourrait l'aider à optimiser le flux et améliorer les performances de transmission. Iris Lab vise une levée de fonds de deux millions d'euros d'ici mi-2024 pour recruter une dizaine de personnes et financer un second prototype.

Lire aussiLanceur d'étoiles veut devenir le guichet unique de l'innovation aéronautique et spatiale à Toulouse

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Commentaires 2
à écrit le 10/01/2024 à 10:06
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Ondes qui viendront s'ajouter au brouillard électromagnétique déjà bien trop élevé dans notre environnement.

le 10/01/2024 à 14:34
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Ces ondes pourraient ainsi se cacher dans le brouillard existant. :-) "la réception de l'énergie est réalisée par de petits convertisseurs photovoltaïques" rendement du laser (entre l'énergie consommée vs lumineuse générée, celle reçue dans le drone...

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