L'équipementier Actia face à "la grande inconnue" de la pénurie mondiale des composants

Le fabricant toulousain d'équipements électroniques est frappé de plein fouet par la pénurie mondiale de composants, alors même que son carnet de commandes est plein. Actia a évité la fermeture partielle de son usine installée dans la Ville rose mais doit se préparer à une crise partie pour durer.
Actia emploie 3.800 collaborateurs dans le monde dont 750 à Toulouse où est implanté son siège social.
Actia emploie 3.800 collaborateurs dans le monde dont 750 à Toulouse où est implanté son siège social. (Crédits : Actia)

"Nous sommes face à une grande inconnue. Chaque semaine, nous devons remettre en question notre outil de production en ne sachant pas quels composants nous seront livrés et en quelle quantité alors même que notre carnet de commandes est plein", alerte Catherine Mallet, directrice générale déléguée du groupe Actia.

Ce fabricant toulousain d'équipements électroniques pour l'automobile, le spatial et les télécoms (3.800 collaborateurs dans le monde dont 750 à Toulouse) est durement touché depuis le début de l'année par la pénurie mondiale de composants. À tel point qu'au printemps dernier, Actia a envisagé de fermer quelques jours par semaine son usine implantée dans la Ville rose.

Crise sanitaire et incidents climatiques

"Dans le domaine de l'électronique, par définition, notre matière première est le composant. Ce marché a déjà connu des tensions depuis 2017. Les capacités étaient insuffisantes pour accompagner la digitalisation croissante de l'économie mondiale et les acteurs sont concentrés surtout en Asie et aux États-Unis.

Avec la crise sanitaire de 2020, les acteurs de l'électronique ont dû lever le stylo, ce qui a engendré des délais supplémentaires dans les livraisons des composants et des semi-conducteurs en particulier. Sans compter des phénomènes climatiques : une tempête au Texas a mis à l'arrêt pendant près de six semaines l'un des principaux sites de l'un de nos fournisseurs de composants NXP, une sécheresse en Thaïlande a perturbé la fabrication des semi-conducteurs et des galettes de silicium, qui est très consommatrice en eau, il y a eu des incendies d'usines au Japon...", se remémore Catherine Mallet.

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Une série noire aggravée par l'explosion de la demande mondiale d'ordinateurs et d'outils de digitalisation pour continuer à travailler malgré la situation sanitaire. Fin février, les fournisseurs préviennent Actia qu'en raison notamment des difficultés rencontrées par NXP, seules 5% des commandes fermes passées par le groupe seraient livrées au cours du deuxième trimestre.

Cellule de crise et production recentrée sur de petites séries

Le groupe met alors en place une war room (cellule de crise) qui mobilise une dizaine de salariés du service des achats, de la production, du commerce, de la R&D et du juridique. "Chaque semaine, cette équipe fait un état des lieux des composants les plus en tension qui risquent d'arrêter notre production. Cette connaissance nous permet d'aller chercher des composants sur le marché secondaire (brokers) ou auprès de nos fournisseurs pour trouver une solution alternative qui vienne se substituer aux composants manquants", décrit la directrice générale déléguée d'Actia. Grâce à cette méthode, le groupe a pu réceptionner 65% de ses pièces commandées au cours du second trimestre.

La réorganisation totale de la production a également permis d'éviter la fermeture partielle de l'usine toulousaine. "Nous essayons de produire au maximum même si l'activité est ralentie en nous focalisant sur de plus petites séries qui demandent beaucoup d'heures de travail. Là où nous fabriquions avant la crise une série de 5.000 pièces par semaine, nous produisons actuellement trois à quatre lots de 800 à 1.000 pièces par semaine", explique Catherine Mallet.

Une situation toute de même frustrante pour la dirigeante puisque avec un carnet de commandes très rempli, Actia aurait pu retrouver son niveau d'avant-crise sans cette pénurie de composants. En 2019, le chiffre d'affaires du groupe avait dépassé pour la première fois les 500 millions d'euros pour s'établir à 520 millions d'euros contre seulement 440 millions d'euros en 2020. Mais dès le deuxième trimestre 2021, son chiffre d'affaire est quasiment revenu au niveau d'avant la pandémie. Actia a aussi décroché de gros contrats depuis le début de l'année notamment dans le domaine des satellites pour la constellation de OneWeb puis celle de Telesat mais également dans le domaine de l'électrification des véhicules.

Malgré ces bonnes nouvelles, le groupe se prépare à une crise des composants partie pour durer. "Le pic de la pénurie était annoncé pour le deuxième trimestre. En réalité, cette crise devrait perturber notre organisation pendant au moins deux années", conclut Catherine Mallet.

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Commentaire 1
à écrit le 06/09/2021 à 22:28
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je suis électronicien de métier et de passion début 1959! Jusque récemment les cartes électroniques étaient payées 20 cmes le kilo, si la profession avait organisé le recyclage, économie circulaire ils l'auraient leur matériel,

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