Rémi Demersseman-Pradel, entrepreneur socialiste

Cofondateur de La Part de Rêve, il y a 10 ans, Rémi Demersseman-Pradel est à la tête de ce réseau de 38 crèches interentreprises réparties dans toute la France. Ancien conseiller municipal socialiste à Plaisance-du-Touch (31), il vient d'entrer au secrétariat national du PS et est candidat aux régionales 2015 sur la liste de Carole Delga. En économie comme en politique, il veut améliorer l'organisation sociale dans la société. Portrait d'un "optimiste déterminé".
Rémi Demersseman-Pradel

"Je suis Rémi Demersseman-Pradel, PDG de La Part de Rêve, ingénieur en mécanique, marié, quatre enfants." Voilà pour la présentation façon "CJD" (Centre des jeunes dirigeants d'entreprises), une institution chère à "Rémi DP", comme il signe ses messages.

Né en 1975 à Dunkerque, dans "la clinique la plus au nord de la France" dans une famille de professeurs "sans exemple d'entrepreneur", rien ne prédestinait Rémi Demersseman-Pradel à devenir chef d'entreprise. Passionné par l'espace et "Star Wars", dont il possède une réplique grandeur nature de Yoda dans son bureau, il aurait voulu "naître 500 ans plus tard". À défaut de voyager dans l'espace, le jeune Rémi décide d'étudier les sciences pour les faire progresser. Direction l'Institut supérieur de mécanique à Saint-Ouen, où il rencontre sa femme Élodie, puis l'Université Pierre et Marie Curie, à Paris, pour un DEA en mécanique, en 1998. Petite désillusion, au cours de ses stages, Rémi Demersseman-Pradel s'aperçoit que "le temps du spatial est trop long" pour lui.

"Quand j'ai compris que je ne voulais pas être chercheur, j'ai décidé de créer mon entreprise avant 30 ans", raconte-t-il.

Pour "valoriser ses études", il entre cependant chez le constructeur Bosch où il dessine les réservoirs de liquide de freins. En 2001, il devient chef de projet et coordonne plusieurs sites européens du groupe allemand. "En 2003, à 28 ans, je rapportais directement au conseil d'administration de Bosch pour un projet en relation avec Jaguar", se rappelle-t-il. Mais "le plus jeune chef de projet" du groupe a atteint le plafond de verre. "Chez Bosch, si on n'est pas Allemand, on plafonne."

Rémi Demersseman-Pradel change alors de branche. Après un passage sur le programme A400M à Velizy pour Messier-Dowty, il devient responsable d'une agence de gestion d'ingénieurs pour une filiale du groupe Safran, en 2005.

L'aventure de La Part de Rêve

Deux ans plus tôt, à la naissance de leur première fille Violette, Rémi et Élodie trouvent une place dans une crèche associative à Versailles. La place de président est vacante, le jeune père l'occupe tandis que sa femme gère la partie administrative. "Le contact avec le personnel, les parents, les institutions, cela me plaisait et nous intéressait", se souvient-il. Associative, la crèche fonctionne grâce aux subventions et aux bénévolats des parents. Pour devenir rentable, il faut se développer. "Le gouvernement encourageait la création de crèches. En 2005, nous avons créé La Part de Rêve avec ma femme et Ronan Le Boulaire, un ami entrepreneur rencontré à l'école."

La première année, le trio enchaîne les déconvenues. "Nos 39 premiers projets de crèches ont été des échecs, sourit-il. La crèche interentreprises plaisait mais c'était un concept nouveau et encore pas bien compris." En 2006, le beau-père de Rémi Demersseman-Pradel, par ailleurs investisseur, leur conseille d'arrêter les frais. "Je lui ai dit qu'il nous restait une piste, à Ploërmel dans le Morbihan." Ce 40e projet est le bon. Rachetée, la Fée Viviane devient, en janvier 2007, la première crèche de la société. La machine est lancée. En juin suivant, La Part de Rêve crée sa première crèche, les Violettes, dans le Var, puis les Capucines en 2008 à Paris, le Petit Jules à Aubagne et le Rêve de Basile à Saint-Denis. Soit les quatre prénoms de ses enfants.

En 2010, le réseau compte 8 crèches. Rémi Demersseman-Pradel quitte son travaille pour se consacrer à temps plein à la direction de La Part de Rêve. "Pour être rentable, il fallait une vingtaine de crèches. Il y avait un cap à passer. Nous avons décidé de lever des fonds via des participations minoritaires pour pouvoir nous développer", rappelle-t-il. Les 2,5 millions d'euros levés permettent de faire face aux pertes jusqu'au seuil de rentabilité.

Rémi Demersseman-Pradel

Bien-être et gouvernance partagée

"Je suis devenu chef d'entreprise avec des responsabilités pas toujours très rigolotes, commente-t-il. Le CJD m'a beaucoup aidé en m'initiant à la notion de bien-être en entreprise, au sens de la réussite, à la sociocratie et à la gouvernance partagée."

S'inspirant d'autres entreprises, Poult notamment, La Part de Rêve, qui compte 38 crèches aujourd'hui, a lancé une démarche de gouvernance partagée dès 2012. "J'ai commencé à mettre en place, avec mes cadres, un fonctionnement sans hiérarchie. Il n'y a pas d'organigramme mais des gens avec des compétences. Depuis six mois, l'équipe du siège sensibilise le reste du personnel pour qu'ils trouvent une organisation qui leur aille bien. Nous imposons seulement des outils communs." La formule fonctionne. "Des gens du CJD viennent voir comment ça marche à présent", se félicite Rémi Demersseman-Pradel.

Son expérience, l'entrepreneur la met aussi au service des autres. Celui qui, plus jeune, s'imaginait peut-être journaliste scientifique, propose son aide aux salariés du Journal Toulousain, en difficulté après les déboires de leur ancien propriétaire, en janvier 2014, "Je leur ai parlé du modèle coopératif et ils m'ont demandé d'être cogérant." Une fonction qu'il a accepté même s'il se voit plus comme un conseiller que comme un patron.

Autre projet à la sauce coopérative : la reprise de l'institut supérieur de formation professionnelle (ISFP) de Blagnac. L'Institut supérieur de journalisme de Toulouse ouvrira sous la forme d'une société coopérative d'intérêt collectif à Gramont en septembre.

"Je pense que c'est une façon de faire que la société s'améliore, explique-t-il. J'ai par principe d'agir plutôt que de râler. Agir dans l'économie peut changer la vie des gens. Agir en sauvant un média ou une école, c'est pareil." Pour porter la bonne parole, Rémi Demersseman-Pradel a d'ailleurs créé un fonds de dotation destiné à diffuser la gouvernance partagée dans l'économie.

Agir sur l'économie et la politique

Rémi Demersseman-Pradel 2

Son engagement en politique en 2007 est mû par la même volonté de "changer les choses". À l'image de son père, maire de la petite commune de Noyelles-lès-Seclin de 2008 à 2014, il s'investit dans la section socialiste de sa commune, Plaisance-du-Touch, où il entre au conseil municipal de 2008 à 2014.

"Je pense que le Parti Socialiste est le meilleur endroit pour changer les choses dans la société et en politique, assure-t-il. Et pour cela, il faut être au cœur."

Ensuite, Rémi Demersseman-Pradel intègre l'organisation fédérale "pour comprendre comment ça marche". En 2012, il rencontre Pierre Larrouturou avec qui il signe la motion "Oser. Plus loin, Plus vite" au congrès de Toulouse, qui arrive en troisième position en réunissant 11,78 % des voix. L'année suivante, il ne suit pas l'économiste dans son aventure avec Nouvelle Donne. "Je ne voyais pas où il allait et je crois encore que le PS est la meilleure organisation pour accompagner la France vers une meilleure organisation sociale."

Secrétaire fédéral en charge de l'Économie sociale et solidaire depuis 2012, il siège également au Conseil national, le parlement du PS, depuis la même année, et est membre du Bureau national depuis 2014. Plus récemment, il a fait son entrée au secrétariat national le 20 juin dernier, comme secrétaire national adjoint au pôle "Animation, élection et vie du Parti" sous l'égide du député socialiste Christophe Borgel.

Avoir les moyens d'agir

Outre la vie interne du parti, Rémi Demersseman-Pradel pourrait faire son entrée au Conseil régional de la future région Languedoc-Roussilon-Midi-Pyrénées.

"Je suis dans l'équipe validée par le Conseil fédéral du PS, lundi 29 juin, pour candidater aux élections régionales, confirme-t-il. Carole Delga m'a confié l'animation du groupe de travail interrégional relatif au développement économique."

Et après ? Candidat à l'investiture socialiste pour les municipales 2014 à Plaisance-du-Touch (battu lors de la primaire par le maire sortant Louis Escoula), l'homme a de l'ambition. Se verrait-il député à l'avenir ? "Pourquoi pas, avoue-t-il. Ce n'est pas une finalité ou pour la gloriole, mais un moyen de faire rayonner les idées et avoir des moyens d'actions."

Son objectif politique :

"Contrer les effets néfastes du libéralisme et rendre aux gens la confiance en l'autre." Un brin optimiste ? "On m'a dit que j'étais un doux rêveur quand j'ai voulu lancer mon entreprise. La Part de Rêve compte aujourd'hui 300 salariés et 1 000 familles. Je suis un optimiste déterminé. Seul, on avance vite. Ensemble, on va loin."

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Commentaires 3
à écrit le 16/02/2016 à 8:43
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Bonjour. Je vous rejoins totalement dans le fait qu'un ingénieur en mécanique n'est pas particulièrement compétent en matière de Petite Enfance. C'est pourquoi j'ai dès le départ, fait le choix de m'entourer de personnes compétentes en leur domai...

le 22/09/2016 à 13:32
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Bonjour, je suis extrêmement curieuse par votre parcours et j'aurais bien aimé avoir des conseils stratégiques sur la création d'une creche. J'imagine que vous avez un emploi du temps hyper compliqué suite à votre nouvel emploi. Mais je pense surt...

à écrit le 03/01/2016 à 17:28
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comment un ingénieur en mécanique peut il avoir des compétences dans le domaine de la petite enfance ?????

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