le Conseil général du Tarn estime les dégâts causés par les anti-barrage à plus de 300 000 €

Alors que le Conseil général du Tarn estime à plus de 300 000 € les dommages liés aux actions des opposants au projet de barrage, ces derniers comptent sur les conclusions du rapport des experts mandatés par Ségolène Royal pour mettre un coup de frein au projet. En attendant, le chantier continue. La mobilisation également.
Le chantier du barrage est sous la garde des gendarmes. © photo Rémi Benoit

 Une petite rivière coule toujours au milieu de la vallée du Testet mais ses berges ont bien changé en un mois. De la forêt de Sivens, nulle trace. Le dernier arbre, surnommé le Mirador par les opposants au projet de barrage, est tombé vendredi 3 octobre, à l'aube. Ne restent que quelques arbustes dans une plaine remplie de souches et de copeaux de bois.

Ce lundi matin, à la reprise des travaux d'aménagement du site, une quarantaine de gendarmes des compagnies de Gaillac et d'Albi a précédé les ouvriers et leurs engins de chantier. Déployés en ligne d'un bout à l'autre de la vallée, ils ont repoussé dans le calme la trentaine de zadistes (militants protégeant la zone à défendre) toujours présente sur le site. Hormis un opposant perché sur un mirador construit en fin de semaine, les militants anti-barrages se sont retrouvés contenus dans la Gazad, un terrain appartenant à l'État occupé par trois véhicules aménagés où vivent certains d'entre eux, et visé par une procédure d'expulsion.

Arrivés à 7h30, les gendarmes ont "sécurisé" la zone vers 8h30, permettant ainsi la poursuite des travaux. Après la phase de déboisement, ceux-ci entrent dans une nouvelle dimension : le décapage du terrain. Une étape redoutée des opposants au projet car synonyme de destruction irréversible de la zone humide, si précieuse à leurs yeux. Ce lundi, face aux pelleteuses qui progressaient, les militants essayaient de rester optimistes. "Le barrage n'est pas encore construit, on peut encore faire des choses, veut croire Arthur, militant d'une cinquantaine d'années. De toute façon, ce que nous faisons ici est important car cela nous permet de sensibiliser les gens. D'autres projets comme celui-ci seront sans doute développés plus tard."

Plus de 300 000 € de dégâts

Parfois calme, comme ce lundi matin, parfois tendue, comme la semaine dernière, la confrontation a occasionné des dégâts matériels et physiques de part et d'autres. Du côté des opposants, on accuse les forces de l'ordre de se livrer à un "harcèlement pur" des opposants. "Ils ont lacéré les tentes et uriné dans nos duvets", relate Zia, une occupante de Gazad. "Vendredi soir, trois gendarmes mobiles ont brûlé livres et instruments de musique dans la Maison des druides", ajoute Arthur. "Lors d'une action de blocage, les gendarmes ont blessé 13 personnes et endommagé des véhicules", affirme Ben Lefetey, porte-parole du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet.

Pour les pouvoirs publics, la note est d'ores et déjà salée. Outre 7 gendarmes blessés depuis le mois de mai, d'après la préfecture du Tarn, "un pont menant au chantier devra être refait, un coût d'environ 200 000 € ; le nettoyage de plus 30 tonnes de matériaux utilisés par les opposants dans les barricades a coûté environ 50 000 € ; du bois coupé n'a pu être valorisé, un défaut de recette de 50 000 €", liste le Conseil général, qui estime à plus de 300 000 € les dégâts occasionnés par les opposants.

Un chantier ralenti ?

À une quarantaine de kilomètres de là, une quinzaine d'opposants a manifesté lundi matin devant le Conseil général du Tarn, à Albi, pour réclamer un débat contradictoire sur le projet. Parmi eux, Ben Lefetey, le porte-parole du Collectif pour la sauvegarde de la zone humide du Testet.

"Nous avons constaté un ralentissement du chantier. Le décapage n'a pas encore commencé, déclare-t-il. C'est sans doute lié au rapport des deux experts mandatés par Ségolène Royal, la ministre de l'Écologie, du développement durable et de l'énergie. Il devrait être rendu cette semaine."

Après une première rencontre avortée le 11 septembre, car boycottée par les opposants qui réclamaient la suspension du déboisement, ceux-ci ont finalement rencontré les experts du Commissariat général au développement durable, mercredi 1er octobre. "Ils cherchaient à savoir si la retenue d'eau allait bénéficier à 83 irriguants, comme annoncé par la Chambre d'agriculture et le Conseil général, ou 19, comme nous l'avons calculé", rapporte Ben Lefetey, qui espère que les experts concluront à un surdimensionnement du projet.

Le chantier serait-il "mis en suspens" en attendant ledit rapport ? La CACG affirme que non. "Les seuls retards sont dus aux contraintes de sécurité liées à un contexte difficile, reconnaît le service de communication du maître d'œuvre. Nous avons les autorisations légales pour poursuivre le chantier." Du côté du Conseil général du Tarn, maitre d'ouvrage du projet de barrage, on concède cependant "être dans une phase intermédiaire du chantier".

"Dans un premier temps, nous avons accéléré le déboisement en déployant plus d'engins, explique Stéphane Mathieu, le directeur de l'eau pour le Conseil général. Après une pause obligatoire de 15 jours suite au déboisement, nous terminons le broyage de la végétation. Nous avons construit la base de vie du chantier en l'entourant d'une double douve du fait de la présence des opposants et nous avons sondé le terrain pour voir la qualité du matériel bientôt utilisé pour la digue."

Et de poursuivre : "Nous ne serions pas allés jusqu'à transformer le site de façon irréversible avant d'avoir le rapport des experts. Mais leur mission concerne surtout les mesures d'accompagnement et de compensation, ainsi que la gestion future de la ressource en eau, plutôt que l'utilité et le dimensionnement du projet lui-même." D'après le directeur de l'eau, une part d'eau moins importante pourrait ainsi être dévolue à l'irrigation, en fonction des conclusions du rapport.

Les conclusions du rapport devraient être transmises aux pouvoirs publics cette semaine. Dans la vallée du Testet, la mobilisation continue. Une manifestation d'envergure y est organisée le 25 octobre prochain.

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