300 personnes se sont retrouvées hier soir à Toulouse pour échanger autour d'une thématique à la fois large et pointue : quelle est la relation entre les performances économiques et le lien social ? Midi-Pyrénées était prédestinée à accueillir ce forum-débat. En effet, le projet est né il y a un an, lors de la présentation du rapport 2013 "L'État social de la France et de ses régions", publié par l'Odis. L'étude a classé Midi-Pyrénées en 1re position en termes de lien social, et en 4e en termes de performance économique. Dans le même classement, l'Île-de-France est 1re en performance, mais 19e en lien social. Des résultats qui interpellent les acteurs économiques locaux.

Ont participé aux échanges Jean-Louis Chauzy (président du Ceser), Jean-René Bouscatel (président du Stade Toulousain), Gérard André (président de Tisséo Réseau Urbain), Françoise Barutello (Présidente du club Réussir), Jean-François Knepper (délégué syndical FO au comité central Airbus), Aldo Mucciardi (secrétaire général d'ATR), Francois-Régis Valette (président du Sicoval) et Françoise Vallin (déléguée syndicale CFE-CGC au comité central d'Airbus). Tous ont été préalablement auditionnés lors d'une enquête régionale. Le directeur de l'Odis Jean-François Chantaraud a piloté la soirée, ouverte par le directeur général d'Harmonie Mutuelle François Venturini.

Performance versus lien social
Le rapport sur l'état social en France a permis de constater que le lien social (la capacité des habitants à s'investir pour la communauté et à vivre ensemble) amène la performance économique. "C'est valable en France, mais aussi en Europe et partout dans le monde, précise Jean-François Chantaraud. Cela se vérifie en Norvège ou en Suède, qui trustent les premières places. Le développement passe par une harmonie entre lien social et performance. Privilégier l'un au détriment de l'autre ne fonctionne pas sur le long terme." Un lien entre bien-être et performance résumé par Jean-Louis Chauzy : "Si le taux de croissance ne garantit pas le bonheur, l'absence de taux croissance pérennise le malheur."

Le rôle du dialogue social
Syndicalistes, chefs d'entreprise, institutionnels : ils sont tous d'accord pour affirmer que le dialogue social est capital dans la réussite d'entreprise. L'exemple est à portée de main : Airbus. Pour Jean-Louis Chauzy, c'est clair, "Airbus doit aussi son succès au dialogue social". Jean-François Knepper (FO Airbus), ne dit pas le contraire, mais se montre prudent : "EADS se transforme, espérons que l'entreprise ne fera pas fi du dialogue social qui a fait son succès." Il faut même aller plus loin selon Françoise Vallin (CFE-CGC Airbus) : "Il faut transposer ce que l'on peut faire dans une grande entreprise comme Airbus aux PME et PMI de la région. Une entreprise qui marche est une entreprise qui a une utilité sociale." C'est également l'avis d'Aldo Mucciardi : "ATR, 1.000 salariés, a une équipe motivée, dans une entreprise où le lien est fort entre les gens. Et quand un client achète un avion, c'est une concession de confiance qu'il nous fait."

Les faiblesses de Midi-Pyrénées
Dialogue, confiance, créativité : les recettes de la performance semblent faire l'unanimité, "et Midi-Pyrénées est une terre de consensus plus que de débat" ajoute François-Régis Valette. Pourtant, "la région avance à deux vitesses", souligne Jean-François Chantaraud, notamment à cause de la concentration des activités sur Toulouse et la prépondérance de l'aéronautique. Des faiblesses connues, mais qui n'ont pas encore trouvé de parade efficace. Et la question ne se pose pas que dans le monde de l'entreprise. "En tant qu'élu, je vois aussi que les citoyens critiquent beaucoup, mais trouvent toujours une raison pour ne pas s'impliquer, note Gérard André. Il y a de vraies difficultés à mettre en place une démocratie locale." "Ne manque-t-il pas en Midi-Pyrénées des décideurs politiques qui donneraient une autre dimension à la région ?" interroge de son coté Jean-René Bouscatel, en manque de leader charismatique.

Quelques pistes de réflexion ont été évoquées lors d'un échange avec les personnes présentes dans la salle. Le débat va se poursuivre. C'est en tout cas le souhait de Françoise Barutello, présidente du club Réussir, qui organisera dans les semaines à venir une rencontre pour approfondir la réflexion.

Sophie Arutunian
© photo Rémi Benoit