Semaine cruciale pour l’usine Bosch de Rodez

Depuis plusieurs mois désormais, l’inquiétude monte autour de l’avenir d’une partie des 1600 emplois de l’usine Bosch de Rodez, spécialisée dans la production d’injecteurs diesel pour les automobiles. Le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, a rencontré lundi 22 janvier le PDG de Bosch pour obtenir des garanties. De hauts dirigeants du groupe sont attendus sur le site aveyronnais vendredi 26 janvier pour y faire des annonces aux salariés.
Plusieurs centaines d'emplois sont menacées à l'usine Bosch de Rodez.
Plusieurs centaines d'emplois sont menacées à l'usine Bosch de Rodez. (Crédits : DR)

"La filière diesel en France c'est 12 000 emplois directs et il n'y en a rien que 1 600 au sein de l'usine Bosch de Rodez", d'après des propos tenus par le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, sur une radio nationale le vendredi 19 janvier. L'ancien candidat à la présidence du parti Les Républicains s'est permis cette précision récemment car cette antenne aveyronnaise du groupe allemand Bosch pourrait voir ses effectifs prochainement réduits.

Spécialisée dans la production des injecteurs diesel, cette usine Bosch emploie plusieurs centaines de personnes grâce aux deux lignes de productions présentes sur le site. "Il y avait 2 400 salariés quinze ans en arrière", tient à rappeler Christian Teyssèdre, maire de Rodez et président de Rodez Agglomération. L'élu pourrait prochainement regretter la période actuelle, une partie des emplois du site étant menacée.

En juin 2017, Bosch a gelé un investissement de 15 millions d'euros qu'il devait réaliser afin de moderniser ses deux lignes de fabrication. L'objectif était de passer de la production d'injecteurs diesel de 1ère génération à des injecteurs 2e génération, pour des moteurs plus propres répondant aux futures normes européennes appliquées dès 2020.

"Si aucun investissement n'est réalisé, la totalité des 1 600 emplois est menacée à terme. Mais la tendance est plutôt à l'annonce de l'investissement sur une seule ligne de production. Dans ce cas, 300 à 700 emplois pourraient disparaître d'ici deux ans », explique Yannick Anglares, secrétaire CGT de l'usine Bosch à Rodez.

Appel à la solidarité industrielle française

Des annonces sont attendues concernant l'avenir de l'usine vendredi 26 janvier. Ce jour-là, le président de la division Diesel Monde de Bosch, Uwe Gackstatter se rendra à Rodez. Il rencontrera les collectivités à la préfecture le matin, avant d'aller à l'usine pour échanger avec l'intersyndicale, la direction locale et les salariés. Un discours devant l'ensemble des effectifs est prévu. Mais les syndicats n'ont pas attendu ce rendez-vous pour lancer la mobilisation.

L'intersyndicale devait rencontrer le Premier Ministre, Édouard Philippe, lors de sa venue à Cahors jeudi 14 décembre pour aborder la situation à Rodez. Mais le tragique accident entre un bus scolaire et un train à Millas le jour même avait contraint le chef du gouvernement à annuler l'entretien. Depuis, les défenseurs des salariés ont été reçus à Bercy mardi 16 janvier par deux proches conseillers du ministre de l'Économie, Bruno Le Maire.

"Nous avons fait trois demandes auprès des conseillers : que les ministres du gouvernement stoppent leur 'dieselbashing', que l'État mette la pression sur les constructeurs automobiles français afin qu'ils passent des commandes auprès de notre entreprise et non pas chez des entreprises étrangères. Nous souhaitons également que le gouvernement intervienne auprès des dirigeants de Bosch pour obtenir les investissements nécessaires au maintien des emplois dans l'usine", détaille Yannick Anglares.

Élus locaux et syndicats de l'usine l'assurent : si PSA et Renault, dans lesquels l'État est actionnaire, passent 30 % de leurs commandes d'injecteurs diesel à l'antenne Bosch de Rodez tous les emplois seraient sauvés.

Bercy et l'Élysée sont à la manœuvre

Devant la situation critique du premier employeur privé du département de l'Aveyron, le président de Rodez Agglomération, Christian Teyssèdre, a tenu à s'entretenir directement avec le plus haut dirigeant de l'État. "J'ai demandé personnellement au président de la République, Emmanuel Macron, qu'il intervienne lui-même dans ce dossier", assure l'élu. Par la suite, Bercy est monté au front pour défendre le site ces dernières semaines. Coïncidence ? Certainement pas.

Alors qu'il était encore ministre de l'Économie, Emmanuel Macron s'était rendu le 4 août 2016 à l'usine de Rodez. Depuis Bruno Le Maire et Peter Altmaier, ministre fédéral allemand des Finances, reçu en fin de semaine dernière à Paris auraient abordé tous deux ce dossier sensible lors de leur entretien. Le ministre français met également la pression dans les médias.

"Je verrai lundi (22 janvier, nldr) à Versailles, le président de Bosch, Volkmar Denner. Je vais en discuter longuement avec lui. Je vais lui faire deux demandes. La première, qu'il fasse un investissement sur l'une des deux lignes de production du site. La deuxième, qu'il diversifie les activités de l'usine Bosch à Rodez", déclarait vendredi 19 janvier Bruno Le Maire au micro de la radio Europe 1.

Ce dernier doit rencontrer le dirigeant du groupe allemand lors du sommet pour l'attractivité organisé à Versailles par Emmanuel Macron, qui a invité 140 chefs de grandes entreprises. Nommé "Choose France", cet événement doit permettre de convaincre des grands groupes d'investir dans l'Hexagone à la veille du début du Forum économique mondial de Davos.

Bientôt tournée vers les véhicules du futur ?

Même si les investissements étaient réalisés dans les prochaines semaines, le sauvetage de l'usine ne serait que provisoire. Le problème n'est pas financier mais bien plus profond. Scandales à répétition, mauvaise pub, législation de plus en plus défavorable, la filière diesel est dans une situation plus qu'inconfortable. L'usine Bosch de Rodez, pour assurer son existence, ne doit plus dépendre de ce marché.

"Il faut engager la reconversion industrielle du site. Plusieurs pistes sont actuellement étudiées par l'Élysée, Bercy et les collectivités locales. Tourner l'usine vers les véhicules électriques pourrait être une solution", estime le maire de Rodez, Christian Teyssèdre.

C'est également dans ce sens que le président du Conseil économique social et environnemental régional d'Occitanie (Ceser), Jean-Louis Chauzy, a adressé une lettre au président de la République jeudi 18 janvier. Pour lui, "la création de deux lignes de fabrication d'injecteurs de nouvelle génération est la seule décision qui évitera un plan social et donnera 4 ans de visibilité industrielle". Une durée suffisante pour engager une reconversion ?

"Nous voulons une transition industrielle. Mais pour modifier une usine comme Rodez, il faut entre trois et cinq années. Nous sommes ouverts à toute transformation du domaine d'activité du site tant que tous les emplois sont conservés", conclut Yannick Anglares, le représentant CGT au sein de l'usine.

C'est bien une semaine cruciale qui démarre pour l'usine Bosch et ses salariés suspendus aux annonces qui seront faites vendredi 26 janvier. Plus qu'un site industriel c'est tout un territoire qui tremble. L'usine Bosch de Rodez est le poumon économique du département.

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