Les cinq questions qui se posent après la fusion MPI-MPE

Issue de la fusion de Midi-Pyrénées Innovation (MPI) et Midi-Pyrénées Expansion (MPE), la nouvelle Agence de l’Innovation et du Développement Economique regroupe les 56 salariés au sein d’une nouvelle entité. Une réponse au nouveau rôle de la région comme chef de file du développement économique qui n’est pas sans poser question avant la fusion programmée le 1er janvier 2016 avec Languedoc-Roussillon.

Pourquoi la fusion MPI-MPE n'intervient-elle que maintenant ?

En 2010 déjà, un rapport du Conseil économique, social et environnemental régional (Ceser) de Midi-Pyrénées prônait la fusion de MPI et MPE. "À l'exemple d'autres régions françaises et européennes, il est temps de proposer le regroupement des structures agissant en matière de développement économique, d'innovation, de financement. La fusion des structures existantes est nécessaire pour faire des économies dans les coûts de fonctionnement et surtout pour permettre une plus grande efficacité d'action", peut-on lire dans ce rapport du 20 octobre 2010, intitulé L'innovation en Midi-Pyrénées. Les membres de la commission proposaient également d'associer à cette future agence l'Incubateur Midi-Pyrénées. La création d'une Agence régionale de l'innovation et du développement économique était aussi réclamée par les entreprises puisque l'auteur du rapport précité était Daniel Thébault, alors président du Medef Midi-Pyrénées.

Alors pourquoi la fusion intervient-elle seulement maintenant ?

"C'est l'aboutissement d'un processus, explique-t-on à la Région. La montée en puissance de MPI a justifié dans un premier temps le rapprochement des deux agences sur un même site (l'immeuble du Belvédère à Toulouse), puis de préparer leur fusion."

Une fusion également confortée par la réforme territoriale qui désigne la Région comme chef de file du développement économique. Par ailleurs, les régions se sont vues confier la gestion directe des fonds structurels européens Feder. Dès décembre 2013, Martin Malvy estimait que le moment était venu "d'engager la fusion de nos deux agences afin de faciliter les synergies entre leurs missions respectives, après les années qui étaient nécessaires à la structuration de MPI et qui justifiait, au départ, l'existence parallèle de deux agences. (...) L'objectif est de constituer, en mutualisant les moyens, un grand pôle d'innovation et de développement, aux compétences croisées, ouvert à l'international." C'est chose faite depuis le 1er janvier 2015.

Cette fusion correspond à une logique de simplification s'inscrivant dans l'air du temps. Parmi les régions pionnières, citons la Bretagne qui, dès 2011, a lancée Bretagne Développement Innovation (BDI), née de la fusion de l'Agence économique de Bretagne (AEB) et de Bretagne Innovation (BI). Les voisins aquitains ont eux aussi simplifié la donne en 2012 avec la création de l'agence ADI (Aquitaine Développement Innovation), née de la fusion d'Innovalis Aquitaine et de 2ADI. Pour autant, Midi-Pyrénées n'est pas en queue de peloton. Rhône-Alpes y travaille tandis qu'en Languedoc-Roussillon, aucune fusion n'est à l'ordre du jour. Cette dernière dispose toujours de trois entités : l'Agence régionale de développement économique Invest Sud de France, Languedoc-Roussillon Agence de développement (LRAD) et Transferts LR, l'Agence régionale de l'innovation du Languedoc-Roussillon.

Selon Jacques Thouroude, président du groupe Union des élus de la droite et du centre, la fusion MPI-MPE arrive tardivement.

"Dès 2010, nous avons alerté Martin Malvy sur la nécessité de fusionner les deux entités, rappelle le conseiller régional UMP. Le soutien à l'innovation et le développement économique sont intimement liés et ne doivent pas être cloisonnés comme c'était le cas jusqu'à présent. Plusieurs années ont été perdues alors qu'elles auraient pu servir de recul à la nouvelle agence au moment de la fusion des régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon. Il ne reste plus qu'une année à la nouvelle structure pour faire ses preuves. Nous analyserons ses résultats en fonction des moyens accordés."

Quelle était la raison d'être
de ces deux agences ?

L'une est une agence de "développeurs", l'autre est une agence "d'ingénieurs". MPE (Midi-Pyrénées Expansion) participe depuis 1987 au développement des entreprises ainsi qu'à l'attractivité économique du territoire. Elle est en contact direct avec les collectivités territoriales à travers, par exemple, les réseaux de pépinières, mais également en lien étroit avec les entreprises. Plusieurs dispositifs votés par la Région sont mis en œuvre par l'agence : plan Croissance PME, plan Usine du futur... À titre d'exemple, le salon Aeromart, initié par la Chambre de commerce et d'industrie de Toulouse, en partenariat avec MPE, est devenue un rendez-vous mondial pour les donneurs d'ordre et les sous-traitants de l'industrie aéronautique.

De son côté, MPI (Midi-Pyrénées Innovation) a été créée par Martin Malvy en 2006 pour conduire au quotidien la stratégie de la région en matière d'innovation. Chasseur de nouveaux talents, MPI accompagne les entreprises innovantes, notamment en leur apportant des réponses technologiques et non-technologiques (marketing, ressources humaines). Plus de 2 000 projets ont été accompagnés depuis la création de MPI, ce qui représente environ 288,6 millions d'euros d'investissements générés. Coordinateur du dispositif régional d'aide à l'innovation, MPI accompagne les entreprises qui souhaitent répondre aux appels à projets Innovation de Midi-Pyrénées : Digifab, Silvereco, Aerosat, Agil-it ou Epicure...

"La nouvelle agence, véritable bras armé de l'action économique régionale, regroupe les missions de MPI et de MPE autour de trois volets, détaille Christophe Nicot, directeur général de ce nouvel ensemble opérationnel depuis le 1er janvier 2015. Accompagner de manière ciblée les projets des entreprises régionales avec une attention particulière portée à l'innovation et l'internationalisation. Structurer des filières, notamment dans le cadre des pôles de compétitivité et clusters. Et renforcer l'attractivité du territoire régional, par exemple avec la création d'une zone d'activités ou d'une pépinière."

La fusion peut-elle permettre
de réaliser des économies ?

Efficacité et simplification sont les maîtres-mots de cette fusion. Efficacité car "l'objectif de la fusion n'est pas de réduire les postes mais bien d'optimiser, avec le même budget, nos actions en matière d'innovation et de développement tout en accomplissant une mission supplémentaire de soutien à l'export, livre Christophe Nicot, directeur général de la nouvelle agence. L'ambition est de faire mieux mais aussi de faire plus. En accompagnant les entreprises sur le chemin de l'innovation et en les aidant à se structurer (fusion, renforcement du fond de roulement...), nous souhaitons qu'elles se tournent davantage vers l'international."

Simplification car les outils proposés par les deux agences seront harmonisés et l'entreprise conserve un seul interlocuteur. Cet accompagnement rassure d'ailleurs les financeurs : "Pour les entreprises, nous sommes un argument, une forme de label, pour convaincre les investisseurs à la recherche de nouvelles pépites. Selon une étude réalisée auprès de 387 entreprises accompagnées par MPI sur la période 2008-2012, 63 % d'entre elles ont créé ou sauvegardé des emplois, 73 % ont augmenté ou maintenu leur chiffre d'affaires et 70 % ont gagné en rentabilité."

Le budget de la nouvelle agence sera de 6 millions d'euros, soit la somme des budgets de MPI et de MPE.

"Il s'agit d'un budget de fonctionnement mais également d'action puisqu'il concerne l'organisation d'événements comme Midinnov, Aeromart ou notre participation au Bourget", détaille encore Christophe Nicot, ancien directeur général de MPI et nouvel homme fort de l'entité constituée.

"J'espère que cette fusion permettra de rationaliser les fonctions support afin de redéployer les effectifs sur le terrain, en contact avec les entreprises et les élus, insiste Jacques Thouroude, président du groupe Union des élus de la droite et du centre à la Région. Les sources d'économie sont là ! L'argent public devient rare, ce qui décuple l'exigence de performance à attendre d'une telle agence."

Comment l'agence régionale peut-elle s'articuler avec l'agence nationale
de développement économique annoncée jeudi 5 février par François Hollande ?

Ce n'est pas trop s'avancer que d'écrire que l'annonce présidentielle prend de court la Région Midi-Pyrénées, au moment même où elle inaugure sa nouvelle agence de développement économique. Quels seront les contours de cette agence nationale ? Quels seront ses statuts et ses moyens ? Des synergies seront-elles possibles avec l'agence régionale ? Bien qu'il faille encore attendre une description précise de cette structure, l'Association des Régions de France (ARF) a immédiatement réagi après l'annonce du président de la République de créer une agence nationale de développement économique.

"Elle doit être un outil commun entre l'État et les Régions [...]. Aux côtés de Bpifrance et de la Caisse des dépôts et consignations dont le président de la République a annoncé qu'elles participeraient à la création de cette nouvelle agence, les Régions doivent être étroitement associées à sa gouvernance et au choix de ses orientations stratégiques. Faute de quoi, cette agence ne serait qu'une structure de plus, qui doublonnerait avec les moyens mis en œuvre par toutes les Régions pour assurer le développement économique de leur territoire et l'accompagnement des PME et ETI, au risque de gaspiller l'argent public et d'être inefficace."

Quelle pérennité peut avoir la nouvelle agence alors que la fusion Midi-Pyrénées
et Languedoc-Roussillon est actée
au 1er janvier 2016 ?

L'agence est-elle déjà une structure mort-née ? "J'espère qu'il ne s'agit pas simplement d'un coup de communication et que tout le travail ne sera pas à refaire dans un an", souligne Jacques Thouroude, président du groupe Union des élus de la droite et du centre. "Avec un seul exécutif et un seul budget, il y aura forcément une harmonisation rapide des moyens d'action sur le territoire, réagit Christophe Nicot, nouveau directeur de l'agence économique de Midi-Pyrénées. Les entreprises de Midi-Pyrénées et celles de Languedoc-Roussillon pourront accéder aux mêmes dispositifs. La fusion MPI-MPE n'a pas de lien direct avec la future grande région. Mais il était important de proposer un outil cohérent et synchronisé avec la future loi NOTRe (Nouvelle organisation territoriale de la République) où l'État confie aux régions de nouvelles compétences économiques. Martin Malvy nous donne une chance de faire nos preuves avant la fusion de Midi-Pyrénées et de Languedoc-Roussillon. Nous disposons d'une année pour bâtir un navire solide et pour le faire flotter ! Il y aura des évolutions mais pas de révolution. Les appels à projet vont se poursuivre normalement et nous ne pourrons pas mettre en place de nouveaux dispositifs six mois avant les élections régionales." On peut donc légitimement penser que cette agence ainsi constituée a vocation à servir de modèle lors du lancement d'une agence commune entre Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon.

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