Fin des limites d'importation de tabac : quelles conséquences pour Midi-Pyrénées ?

Les députés français voteront demain l'abrogation des quotas sur l'importation de tabac, jugés protectionnistes par l'Union européenne. "Une grosse erreur" pour Gérard Vidal, président de la fédération des buralistes de Midi-Pyrénées, qui craint une explosion des marchés parallèles. "Ça ne changera pas grand chose", lui oppose Serge Audoynaud, directeur régional des douanes, qui explique que les cigarettes vendues au noir dans la région viennent d'Andorre, et non d'Espagne.


Jeudi 5 décembre, les députés français vont voter la fin des limites d'importation de tabac en provenance des autres pays européens, afin de se mettre en conformité avec la législation européenne. Au lieu de cinq cartouches autorisées par véhicule en provenance de Belgique, d'Espagne, du Luxembourg ou encore d'Italie, les fumeurs pourront désormais ramener dix cartouches chacun.

Pour les 27.000 buralistes français, c'est la douche froide. Le grand Sud-Ouest compte environ 4.000 professionnels, représentés par Gérard Vidal, président de la fédération des buralistes de Midi-Pyrénées. Pour lui plusieurs problèmes se posent : la question de la santé publique, celle des marchés parallèles, et enfin la question de la disparition d'un commerce de proximité. "Nous sommes en colère, c'est une grosse erreur", selon lui.

Dans la rue "avant la fin de l'année"

"Nous sommes au courant de cette loi depuis le mois de mars, explique Gérard Vidal, et nous avons manifesté au mois de mai dernier. À Toulouse, nous étions 3 000 dans la rue", se souvient-il. Depuis, les buralistes sont silencieux, mais bouillonnent. "Lever les quotas, oui, mais pas sans harmonisation des prix. Nous avons rencontré hier (mardi 3 décembre) le ministre du Budget. Nous lui avons demandé un moratoire sur les prix. Si rien ne bouge, nous serons à nouveau dans la rue avant la fin de l'année", menace le représentant de la profession.

La spécificité régionale : Andorre

Une colère que tente de tempérer Serge Audoynaud, le directeur régional des douanes. Pour lui c'est clair, le marché noir n'est pas alimenté par l'Espagne, mais par Andorre. La nouvelle loi ne change donc rien. En effet Andorre, qui ne fait pas partie de l'Union européenne, n'est pas concernée par la fin des quotas. En provenance de la principauté, les douaniers ne tolèrent toujours qu'une cartouche et demi par personne. "De fait, notre région n'est pas tellement impactée, selon lui. Les cigarettes en provenance d'Espagne représentent quasiment 0% des saisies des douanes. Tout vient d'Andorre." La preuve : les douanes appliquent déjà depuis le mois de mars la nouvelle législation (10 cartouches par personne) et le nombre de saisies n'a pas diminué : 2 tonnes de cigarettes en 2013 lors de 500 contrôles, pareil qu'en 2012.

Toulouse, numéro 1 de l'achat de tabac à l'étranger

Mais Gérard Vidal ne décolère pas. "Nous sommes à 3 heures de l'Espagne où le paquet de cigarettes coûte 2,5 euros de moins qu'en France". Alors qu'en France, 25% des cigarettes sont achetées hors du territoire, "Toulouse est la ville où, à la fin des soirées, on retrouve sur les trottoirs le plus de paquets vides en provenance de l'étranger", révèle Gérard Vidal. Des paquets qui viennent bien d'Espagne, et des pays de l'est, selon lui. "Ils représentent 39% des emballages ramassés". Le buraliste pointe trois menaces qui pèsent sur sa profession : "les ventes transfrontalières, les ventes par internet, et la contrebande".

"Disparition d'un service public"
Les tabacs, derniers relais de service public à la campagne ? C'est ce que pense Gérard Vidal, qui évoque une mise en péril du commerce de proximité. "Dans le milieu rural, nous assurons un service public. Nous sommes souvent le dernier commerce qui reste", regrette-il. Selon lui depuis 2003, 1.000 buralistes ont mis la clé sous la porte dans la région. "On demande aux gens de ne plus fumer, et pour cela on augmente les tarifs. Mais d'un autre coté on favorise le marché parallèle en ouvrant les vannes. C'est open bar", soupire le professionnel. Le premier janvier prochain, le tabac connaîtra une nouvelle hausse de 30 centimes environ. Il faudra compter 7 euros le paquet.

Sophie Arutunian
© photo Rémi Benoit

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