Val Tolosa : est-ce vraiment fini ?

La décision du Conseil d’Etat d’annuler l’arrêté préfectoral autorisant la destruction d’espèces protégées semble avoir mis le programme Val Tolosa à l’arrêt. Deux mois plus tard, les opposants au projet de mega centre commercial de l’ouest toulousain ne désarment pas.
Le centre commercial Val Tolosa verra-t-il le jour ?

C'est une décision qui a fait le bonheur des opposants à Val Tolosa, le nom donné au méga centre commercial en projet sur la commune de Plaisance du Touch (Haute Garonne). Le 24 juillet dernier, le Conseil d'Etat estimait que ce programme n'était pas "d'intérêt public majeur" et annulait l'arrêté préfectoral autorisant la destruction d'espèces protégées sur le plateau de La Ménude. C'est là que le programme aurait dû s'établir, avec ses 63 000 mètres carrés de surface de vente dont un hypermarché, une centaine de boutiques et un grand magasin.

Depuis la décision du Conseil d'État, Philippe Guyot, maire sans étiquette de Plaisance du Touch (soutenu par LREM pour les prochaines municipales) parle au passé du projet qu'il a ardemment désiré. "La taxe foncière de Val Tolosa représentait quatre millions d'euros par an pour la commune, sachant que l'ensemble des taxes sur Plaisance du Touch rapporte huit millions d'euros par an. Ce programme était certainement un bon projet. Val Tolosa créait des emplois, avait une empreinte environnementale sans précédent avec des prises pour les voitures électriques, des panneaux solaires, un lac qui récupérait l'eau et permettait d'alimenter à hauteur de 10% au moins la rivière Aussonelle", énumère celui qui, après la décision du 24 juillet, avait publiquement évoqué l'abandon du projet. Cette annonce marque t-elle l'épilogue d'une longue bataille entre les pour et les anti Val Tolosa ? Pas si simple.

"Ils veulent passer en force"

Ce projet de centre commercial, soutenu depuis le départ par la municipalité de Plaisance du Touch et qui provoque l'ire d'un groupe de citoyens réuni dans le collectif "Non à Val Tolosa", est dans les cartons depuis de nombreuses années. Unibail-Rodamco Westfield, groupe spécialisé dans l'immobilier commercial et promoteur du programme, pensait ouvrir les portes de son immense galerie marchande il y a quelques années déjà. Pour l'heure, il n'en finit pas d'essuyer les revers judiciaires.

En décembre 2017, le Conseil d'État annulait un permis de construire, le deuxième déposé à l'époque par Unibail-Rodamco (le groupe est devenu Unibail-Rodamco Westfield après le rachat de l'australien Westfield Group en 2018). Un peu plus tôt cette année-là, en juillet 2017, la cour administrative de Bordeaux avait retoqué un arrêté préfectoral autorisant la destruction d'espèces protégées sur le site.

L'année suivante, c'est le tribunal administratif de Toulouse qui mettait un coup d'arrêt au programme en annonçant, le 7 septembre 2018, l'annulation de deux arrêtés préfectoraux. Le premier concernait le site lui-même car le préfet avait délivré un second arrêté autorisant la destruction des espèces protégées présentes sur le plateau de la Menude. Le second visait à annuler l'autorisation de destruction d'espèces protégées dans le but de construire une route devant mener au centre commercial.

"Actuellement, un permis de construire est étudié par le tribunal de Toulouse. On en est au troisième ! Juridiquement, ce projet ne tient pas la route mais s'ils continuent à s'entêter comme ça, c'est parce qu'ils veulent passer en force. Ceci explique pourquoi Unibail-Rodamco dépense autant d'argent en avocats et en procédures. Ce groupe a une puissance considérable et ne lâchera pas le projet comme ça. Des industriels qui commencent des travaux en toute illégalité, ce n'est pas quelque chose qui les effraie. En juillet 2017, ils avaient déjà essayé de passer en force donc nous restons vigilants", lance Pascal Barbier, membre du bureau "Non à Val Tolosa", ancien co-président du collectif et élu de l'opposition.

Car Pascal Barbier garde en tête l'action que des opposants au mega centre commercial ont initiée il y a deux ans. Ce jour-là, le 24 juillet 2017, une quarantaine de militants ont investi le site et ont essayé d'en bloquer les accès. Objectif : empêcher les ouvriers d'une entreprise de BTP de faire des travaux sur le site de Val Tolosa. À cette époque, la décision de la cour administrative d'appel de Bordeaux qui interdisait la destruction des espèces protégées venait d'être rendue. L'entreprise de BTP se base pourtant sur un arrêté préfectoral, antérieur d'une journée à la décision de justice, pour agir.

Et après Val Tolosa ?

Si le groupe Unibail-Rodamco Westfield reste silencieux**, le maire de Plaisance du Touch réfléchit déjà à un plan B pour lequel il compte associer le promoteur.

"La Ménude c'est une surface de 120 hectares. Ce projet s'étend sur 40 hectares, il appartient toujours au même propriétaire et il est hors de question de le garder en friche. Pour le moment, nous n'avons pas de contact avec Unibail-Rodamco, nous travaillons avec les Plansançois, nous avons encore cette légitimité pour quelques mois", avance l'édile, dans une allusion aux futures municipales.

Car pour les prochaines élections, Philippe Guyot veut faire de l'avenir du site une carte maîtresse de sa campagne. "La population attendait majoritairement ce centre. Nous prenons acte de la décision prise et nous ferons tout pour avoir un projet qui corresponde à ce que les Plaisançois veulent. Dans notre programme électoral, nous réfléchissons à proposer quelque chose qui soit valorisant pour le quartier, pour Plaisance du Touch et pour l'ouest toulousain. Nous ferons une réunion publique à ce sujet. Une fois élus, nous discuterons avec le promoteur. C'est lui le propriétaire donc on ne peut pas lui imposer quoi que ce soit", souligne par ailleurs le maire.

Mais pour l'heure, l'élu se veut prudent et affirme attendre les municipales pour avancer plus précisément sur un nouveau projet : "Je fais confiance à l'intelligence collective. Nous avons trois objectifs au niveau de cette campagne. La jeunesse, la lutte contre le gaz à effet de serre avec la préservation de la biodiversité et la croissance démographique de Plaisance du Touch car la ville comptera bientôt 20 000 habitants. On peut imaginer que le nouveau projet prendra en compte ces trois critères", résume Philippe Guyot. En attendant l'issue d'une bataille vieille de quinze ans, le dossier Val Tolosa n'en finit pas de faire parler de lui et s'invite désormais dans les prochains débats électoraux.

** Suite à la publication notre article, le groupe a adressé par mail, lundi 30 septembre, à la rédaction de La Tribune la réponse suivante : "Le Groupe Unibail-Rodamco-Westfield a pris note de la décision du Conseil d'Etat relative au projet Val Tolosa et étudie actuellement les différentes options envisageables pour l'avenir du site."

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