L'excellence selon Oscar Garcia, chef étoilé toulousain

Oscar Garcia a 28 ans. En 2014, ce natif de Lardenne, à Toulouse, a fait sensation en devenant l'un des plus jeunes chefs de France à gagner une étoile du guide Michelin. Désormais associé à Thomas Fantini, il livre les ingrédients secrets de sa recette pour atteindre ce niveau d'excellence, dans un milieu où "l'absence de critique devient un compliment."
Oscar Garcia, une étoile au Guide Michelin, a 28 ans

Un fond de précocité

Une toque et un livre de cuisine commandés au Père Noël à cinq ans. Une participation à un concours de gastronomie au Canada à neuf ans. Et des notes qu'il améliore de plusieurs points en CM2 "car on m'avait dit qu'elles n'étaient pas suffisantes pour entrer au lycée hôtelier de Toulouse". Né dans le quartier de Lardenne à Toulouse en 1988, Oscar Garcia a toujours voulu cuisiner.

Vers 13-14 ans, le jeune garçon découvre l'univers de la cuisine professionnelle aux Jardins de l'Opéra, le restaurant dirigé à l'époque par le chef Dominique Toulousy. Il y reste tout le mois de juillet et tant pis si ce stage d'été le prive de vacances avec les copains. "C'est dur, mais cela met les choses en place : la restauration, c'est travailler quand les autres s'amusent, remarque-t-il. Pendant mes études, mes amis me proposaient d'aller faire la fête. Il faut apprendre à dire non et accepter d'avoir une vie décalée par les amplitudes horaires."

Une dose de résistance

Si, à force de travailler 90 heures par semaine en cuisine, Oscar Garcia a eu parfois envie de "rendre le tablier", sa passion ne le fera jamais changer de métier. De ses petits boulots intérimaires, il garde un souvenir mitigé : "C'était moins difficile, mais aussi moins épanouissant. La restauration est un métier très dur, mais qui permet d'avoir un vrai contact avec la clientèle quand on est chef. Avant, il faut accepter de travailler pour celui-ci sans le retour des clients."

Et ce, même quand les chefs en question sont des plus rudes. "Le chef Franck Putelat - que je considère comme mon père spirituel - m'a dit un jour 'Si je ne te dis rien, c'est que tu ne m'intéresse pas. Comme je vois ton potentiel, je te secoue'. Il me poussait toujours à faire plus. Dans ce milieu, faire très bien est la normalité : on n'a pas le droit à l'erreur. Les critiques forgent. Et, au final, l'absence de critique devient un compliment."

Une pincée d'amour du beau geste

De la Table de Franck Putelat à Carcassonne à la sienne à Uzès, le second devenu chef centre sa cuisine autour du bon produit, local et de saison. Mais, au-delà de cette matière première, c'est le geste technique, celui qu'on réalise à la perfection, qui fait vibrer le jeune chef. "Une taille de viande ou de légumes parfaite. Quand on lève parfaitement un poisson (décoller les filets de l'arête dorsale, NDLR), il y a du respect pour une matière que peu de gens peuvent acheter."

Et pour arriver à la perfection du geste, il faut faire et refaire, encore et encore. "Quand on s'occupe à la chaîne de 48 kilogrammes de coquilles Saint-Jacques, il ne faut pas oublier que chaque noix se retrouvera dans l'assiette du client. Une noix mal faite, c'est 2,5 euros perdus. L'approche chiffrée nous apprend aussi à respecter les produits car on ne peut se permettre de les gâcher et de travailler pour rien." Passionné, Oscar Garcia n'en est pas moins pragmatique.

Un zeste d'âme de compétiteur

Rigueur, répétition, entraînement et abnégation, Oscar Garcia pratique la gastronomie comme un sport de haut niveau. "Je veux toujours aller plus loin, me dépasser et me démarquer des autres. La cuisine, c'est comme le sport : ceux qui percent sont ceux qui ont du talent et qui font des efforts", compare-t-il.

En commis stagiaire dévoué à son chef, Oscar Garcia propose "naturellement" au chef Putelat de l'assister dans sa préparation pour le concours du Meilleur ouvrier de France 2007. Pendant une semaine, le duo remet le couvert après le service, de 23 h jusqu'à 5 h du matin. Les nuits sont courtes mais l'expérience - qu'il renouvellera une seconde fois en 2011 - profite au jeune commis. "C'était costaud, très dur, mais très formateur. Il faut du courage pour tenter ce concours quand on est responsable d'une cuisine", reconnaît-il, admiratif. Le plus jeune chef étoilé de France vise-t-il lui aussi le "Graal" de la cuisine française ? "Ce n'est pas un objectif à court terme pour moi, car il faut une expérience, des connaissances, un gros bagage technique et un budget de 20 000 à 30 000 euros", affirme-t-il aujourd'hui.

Quand, en 2013, il signe pour la Table d'Uzès, le défi est là aussi à la hauteur. "L'objectif contractuel était d'avoir une étoile en deux ans. Je n'avais pas mesuré la difficulté, d'autant que Putelat m'a dit 'vas-y'. C'était inconscient mais j'avais les moyens techniques et je m'y suis donné à fond pendant un an." L'effort paye et Oscar Garcia remporte son pari bien plus tôt que prévu. À la fierté d'être devenu, à 25 ans, l'un des plus jeunes chefs étoilés de France (son record a été battu cette année par Julia Sedefdjian, 21 ans, NDLR), se mêle toutefois un regret : celui d'avoir été trop dur avec son personnel. "Je n'ai pas su faire adhérer toute l'équipe au projet en si peu de temps. J'ai manqué de patience et j'ai été dur. Comme chez Putelat, où les choses sont strictes. Je le regrette, car je suis un gentil."

Un soupçon d'humilité

Après l'euphorie de la première étoile, Oscar Garcia est revenu sur terre. Pas question de fanfaronner "par respect pour le travail que cela représente pour ceux qui l'obtiennent plus tard que moi", explique-t-il. Et, aussi, car il fallait confirmer la performance. "Certains ont pensé que ce n'était qu'un coup médiatique piloté par Putelat. On ne peut pas le leur reprocher", sourit Oscar Garcia, qui gardera son étoile pendant deux ans.

Car l'aventure gardoise s'est arrêtée en avril dernier sur fonds de désaccords avec la direction de l'établissement de la Table d'Uzès. Sans fourneaux, ni brigade, Oscar Garcia est aujourd'hui un peu désœuvré. Une situation nouvelle et presque déroutante pour lui.

"Ce passage à vide est un peu perturbant, reconnaît-il en riant. Il faut vite que je retravaille, mais en même temps je n'ai jamais autant vu mes amis et pris des vacances."

Déjà, le jeune Lardennais travaille sur le futur restaurant qu'il compte ouvrir avec le soutien de Thomas Fantini, le patron de la Compagnies des Pergos. Ouverture prévu courant 2017. Son nom ? "Pourquoi pas À la table d'Oscar ?", plaisante le chef Garcia. Une table étoilée, forcément.

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