Crédit immobilier de France : 80% des 250 emplois menacés dans le Sud-Ouest

La semaine dernière, la plupart des salariés du Crédit Immobilier de France étaient en grève, beaucoup s'étant rendus à Paris pour manifester leur colère. L'établissement spécialiste des prêts immobiliers est menacé de disparition depuis la dégradation de sa note par l'agence Moody's. Bruno Risser, son directeur général dans le Sud-Ouest, fait le point sur la situation. Quel est le poids économique du Crédit Immobilier de France dans le Sud-Ouest ?
Bruno Risser, directeur général du CIF dans le Sud-Ouest

La semaine dernière, la plupart des salariés du Crédit Immobilier de France étaient en grève, beaucoup s'étant rendus à Paris pour manifester leur colère. L'établissement spécialiste des prêts immobiliers est menacé de disparition depuis la dégradation de sa note par l'agence Moody's. Bruno Risser, son directeur général dans le Sud-Ouest, fait le point sur la situation.

Quel est le poids économique du Crédit Immobilier de France dans le Sud-Ouest ?
Nous sommes présents dans 16 départements : Aquitaine, Midi-Pyrénées, une partie de la Charente Maritime et du Massif Central, pour un total de 250 collaborateurs. Le CIF dans le Sud-Ouest, c'est 4 000 dossiers de crédit par an, 50 000 clients et la gestion de 3,4 milliards d'euros d'encours de crédits immobiliers. Au plan national, le CIF emploie 2 500 personnes, sans compter les 56 Sociétés coopératives d'intérêt collectif pour l'accession à la propriété (SACICAP), qui sont nos actionnaires uniques, et leurs autres filiales.

Vous voulez aussi rappeler le rôle que joue le CIF dans l'accession sociale à la propriété...

Nous acceptons des ratios de risque dont les autres ne veulent plus en raison de la réglementation Bâle III. 70 à 80 % de nos clients sont des ménages modestes, et ce ne sont d'ailleurs généralement pas avec eux que nous avons des problèmes de retards ou d'impayés. Soulignons aussi que les 56 SACICAP utilisent leurs bénéfices pour mener des missions sociales à titre gratuit.

Vous réfutez les difficultés financières que certains vous prêtent ?

On a pu lire dans la presse que le CIF était en faillite. Ceci n'est pas représentatif de la réalité de nos difficultés. Notre compte de résultat est dans le vert, le groupe est rentable ! Dans le Sud-Ouest, en cinq ans nous avons dégagé 62 millions d'euros de résultat net. Résultat net qui est déjà de 6 millions d'euros au 1er semestre 2012. Notre taux de CDL (créances douteuses) est un peu plus important que la moyenne des banques généralistes mais nos résultats nous permettent d'assumer ce choix.

Pourquoi Moody's a-t-elle alors dégradé votre note de trois crans fin août ?

Les agences ne nous ont pas dégradés pour notre fonds de portefeuille mais disent que notre système de refinancement est problématique. Il faut bien comprendre que nous ne sommes pas une banque de dépôt. Nous nous refinançons uniquement sur les marchés financiers. Ce qui ne nous empêche pas d'être rentable, d'avoir du sens. Mais nous payons aujourd'hui ce mode de fonctionnement atypique.

Les critiques des agences ne sont pourtant pas nouvelles...
Le CIF n'a pas réussi à s'adosser à une grande banque, ou encore à diversifier ses sources de refinancement avec par exemple des emprunts obligataires. Il faut bien comprendre que, dans le cas du CIF, les agences de notation ne créent pas le mouvement, mais elles le précipitent. Moody's n'a fait qu'acter la fragilité du mode de refinancement du CIF dans une période marquée par deux crises financières d'ampleur.

Le gouvernement français est venu à votre secours en apportant sa garantie. Quels sont maintenant vos craintes ?
Une accélération de la mécanique de fin. L'Autorité de contrôle prudentiel nous impose quasiment de nous arrêter de produire, c'est la sanction normale dans le cadre d'une mesure d'urgence visant à protéger le système financier français. Mais si nous stoppons l'octroi de nouveaux crédits, je serais contraint de licencier 70 à 80 % des effectifs ! C'est aussi, potentiellement, un nouveau coup dur pour l'accession sociale à la propriété des ménages à revenus modestes.

Quelles sont les solutions ?
Au niveau du Groupe, et dans le cadre d'une année classique d'activité, nous avons besoin de l'ordre de 8 milliards d'euros pour nous financer, soit un montant inférieur à la seule progression des encours de crédit à l'habitat français en 2011 (les dits-encours atteignant 800 Md€). Le besoin annuel de financement du CIF est bien modeste au regard des 298 Md€ en dépôt à la Caisse des Dépôts au titre de la centralisation du Livret A, et de l'épargne financière des Français qui atteint près de 4 000 Md€ en 2011... Jusqu'à présent, la place bancaire n'a pas marqué d'intérêt voire n'a pas fait preuve de solidarité. La préoccupation partagée du logement social par les banques, l'État, les organismes HLM, les SACICAP, entre autres, devrait constituer l'opportunité de mettre en œuvre via le CIF, une mission d'intérêt général qui s'appuierait par exemple sur un système de collecte d'épargne à vocation sociale. Avec de la volonté, on doit pouvoir y arriver. Des solutions existent.

Propos recueillis par Mikaël Lozano, Objectif Aquitaine
© photo ML

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