Le comité d'entreprise de l'aéroport Toulouse-Blagnac s'oppose à la privatisation

Par Gael Cérez  |   |  690  mots
Le comité d'entreprise de ATB rend un avis défavorable à la privatisation. (Crédits : Rémi Benoit)
Consulté sur la privatisation de la société de gestion de l'aéroport Toulouse-Blagnac, le comité d'entreprise ATB a remis ce lundi 16 février un avis défavorable. Les syndicats déplorent l'opacité de l'opération et s'inquiètent des risques pour la "robustesse" de l'entreprise.

Pour le comité d'entreprise de la société de gestion de l'aéroport Toulouse-Blagnac, c'est non. "À l'unanimité", le comité (composé de 4 élus CFDT, 2 élus Unsa et un élu CFE/CGC) a rendu un avis défavorable sur le projet de "transfert au secteur privé d'une participation majoritaire au capital de la société ATB". En clair, les syndicats s'opposent à la privatisation de leur entreprise.

Le comité d'entreprise déplore "la méthode choisie par l'État : l'opacité".

"L'État a imposé une forte confidentialité à tous les acteurs (candidats, direction ATB, collectivités locales, Syncea expert du CE, comité d'entreprise) qui a généré une opacité sur :

  • la méthode de sélection,
  • les différents avis (APE, CPT, collectivités),
  • les pactes d'actionnaires,
  • le contenu des offres,
  • les critères de sélection.

L'absence de transparence sur ce projet de cession des parts d'une société qui gère un bien public ne nous permet pas de rendre un avis éclairé sur le choix de l'État et ses motivations."

Des risques de fragilisation de l'entreprise

D'autre part, le comité d'entreprise, dont la consultation a été lancée lors de la réunion plénière du 16 décembre 2014, met en avant les risques économiques que fait courir à ATB cette privatisation.

"Aujourd'hui, ATB assure en toute autonomie le financement de ses investissements de croissance. Le comité fait le constat d'une bonne gestion de l'entreprise et de ses perspectives de croissance qui assurent la stabilité et l'avenir de la société et de ses salariés. La structure financière est saine, équilibrée, stable et pérenne.

Demain, l'exigence du cahier des charges d'un projet économique ambitieux (de Symbiose, NDLR) pourrait fragiliser cette robustesse. Cette ambition ne se retrouve pas aussi clairement sur les aspects sociaux."

Enfin, le CE relève que "l'absence de visibilité sur les offres de reprise et sur les critères de sélection ne nous permettent pas de nous prononcer sur les déterminants du choix de l'État". Ces conclusions, basées sur le travail d'un expert mandaté par le comité d'entreprise, amènent "les élus à prononcer à l'unanimité un avis défavorable à ce transfert au secteur privé d'une participation majoritaire au capital d'ATB".

Rappelant que "l'adhésion du personnel sera un facteur clé pour la réussite du projet industriel et social, quel qu'il soit", le CE annonce qu'il "sera amené à se positionner sur ce projet industriel de Symbiose au cours des prochaines consultations obligatoires, notamment celle sur les orientations stratégiques".

Les réactions

Contacté l'après-midi, Jean-Michel Vernhes, le président du directoire d'ATB, n'a pas souhaité faire de commentaire. Avis simplement consultatif, la conclusion du Comité d'entreprise "ne devrait pas avoir de conséquences sur la procédure", selon la direction d'ATB.

Un avis que ne partage pas Christophe Lèguevaques, l'avocat des requérants contre la privatisation de l'aéroport :

"Lors de l'audience devant le juge des référés du conseil d'état, le 29 décembre 2014, les représentants de l'État avaient expliqué que si le comité d'entreprise affichait une opposition de principe, le gouvernement ne donnerait pas suite et que l'acquéreur resterait « pressenti ».

Compte tenu de l'avis défavorable, il appartient au gouvernement de
respecter sa parole et ses engagements en annulant une procédure viciée par
un défaut de transparence de plus en plus suspect."

Pour le président du Ceser, les conclusions du CE sont complètement justifiée du fait du "refus du consortium chinois de communiquer au comité d'entreprise le contenu du projet industriel et économique, le montant et le calendrier des investissements nécessaires pour porter le nombre de passagers à 20 millions", réagit Jean-Louis Chauzy.

"La politique du secret affaiblit la démocratie. La gestion de l'aéroport de Toulouse-Blagnac aurait dû rester dans le périmètre de la puissance publique parce que cette infrastructure avec ses zones d'activité est le premier levier de croissance et d'emplois, et ce, au moment où le projet de loi portant sur la nouvelle organisation territoriale de la République propose la compétence économique aux régions et aux métropoles.