La face cachée de la fermeture des bars et restaurants à Toulouse et en Occitanie

Alors que l’épidémie de la Covid-19 regagne du terrain en France, la filière CHR (cafés, hotels, restaurants) voit son activité se réduire de jour en jour. En Occitanie, si de grandes disparités existent encore entre les établissements urbains et ruraux, le ras-le-bol et les cris de détresse commencent à se généraliser. Cette situation affecte aussi d’autres branches d’activité liées aux métiers des bars et des restaurants. Un appel au grand rassemblement est donc souhaité par les représentants syndicaux avec pour objectif de faire entendre leurs revendications auprès de la classe politique.
La filière CHR est bien décidée à contester les décisions prises par le gouvernement à leur encontre.

"Durant le confinement, nous avons perdu 300 000 euros de chiffre d'affaires et 70 000 euros de trésorerie. Actuellement, nous tenons le choc avec une diminution de 20 % du volume des transactions. Mais nous ne pourrons pas survivre en cas de fermeture, alerte Luc Massol, gérant du pub irlandais O'Sully's à Albi.

D'autant plus qu'il y a le PGE (Prêt garanti par l'État) à rembourser. On ne sait même pas à quel taux celui-ci va être. Nous ne savons pas non plus si nous aurons des aides lorsque nous ne pourrons plus ouvrir. C'est d'autant plus révoltant quand on sait que nous sommes loin d'être responsable de la propagation du virus. Il n'y a qu'à aller faire ses courses au supermarché pour se rendre compte de quels établissements offrent le plus de risques sanitaires."

Comme lui, de nombreux membres de la filière CHR (cafés, bars et restaurants) de l'Occitanie se sont donnés rendez-vous, à Cornebarrieu (Haute-Garonne) lundi 12 octobre, afin d'exprimer leur mécontentement.

"Il faut qu'on suive une ligne directrice et qu'on se batte tous ensemble. La région Nouvelle Aquitaine au travers des présidents de l'UMIH et des Brassards noirs adhère au mouvement. Nous espérons rassembler un grand arc Atlantique-Méditerranée pour faire bouger les choses", explique Cyril Buesa, responsable du restaurant Le Rive Gauche à Narbonne.

Des établissement de plus en plus contraints

Les secteurs du bar, de l'hôtellerie et de la restauration sont parmi les plus touchés par la crise de la Covid-19. La chute du tourisme a déjà engendré des pertes considérables pour les établissements concernés. En plus, les professionnels de la branche ont dû se plier à de nombreuses contraintes afin de respecter les normes de sécurité sanitaire : distanciation entre les tables, fin du service debout, etc. Mais depuis peu, la reprise épidémique a convaincu le gouvernement de prendre des mesures supplémentaires. Certains établissements doivent fermer plus tôt (1 heure du matin pour les restaurants, 22 heures pour les bars selon la zone géographique).

À Toulouse, les débits de boissons sont obligés à fermer, et ce pendant deux semaines. La Ville rose et 16 communes de sa métropole passent en zone d'alerte maximale à partir de ce mardi 13 octobre. Par ailleurs, le préfet de Haute-Garonne, Étienne Guyot a sommé les restaurants d'avoir "des protocoles renforcés, ainsi que six personnes maximum par table".

Les filières amont également impactées

Mais ces décisions de plus en plus strictes commencent à avoir un impact sur les filières situées en amont.

"Au delà de la filière CHR, c'est toute une économie qui risque de s'effondrer, explique Michaël Azemar, le directeur général du fournisseur Raymond Boissons. Derrière les restaurants, l'hôtellerie et les bars, il y a beaucoup d'autres secteurs qui vont souffrir : les industriels, les brasseurs et l'agriculture vont en pâtir. À titre personnel, notre entreprise voit 70 % de sa clientèle fermer. Les dommages collatéraux vont être énormes".

Des dommages qui pourraient être conséquents dans la région sachant que la filière viticole est également touchée. Pierre Ninville, animateur du syndicat vigneron de l'Aude, craint le pire.

"Notre secteur représente 700 000 emplois en France. Avec la fermeture des bars à Paris, la perte d'activité est de 80 % sur la capitale. Nous avons désormais peur pour Toulouse. Si on ajoute à cela un contexte international défavorable avec la taxe Trump par exemple, nous avons 50 % de pertes d'activité pour 2020. La branche viticole souffre déjà énormément à cela pourrait encore empirer".

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Une fermeture généralisée de l'ensemble des bars sur toute la France pourrait donc influencer l'avenir de plusieurs millions d'emplois en comptant tous les secteurs en amont de la filière CHR. Tous revendiquent collégialement le "droit de travailler". Si cela n'est pas possible des aides sont demandées à l'État.

Des aides trop conditionnées

Pour l'instant, les subventions accordées par l'État ne leur conviennent pas. "Ou est passé l'argent ? Très peu d'entre nous ont pu le voir. Il y a toujours une condition qui fait qui nous ne pouvons pas toucher d'aide", s'offusque Valérie Pons, la présidente de l'Union des métiers de l'industrie et de l'hôtellerie du Tarn et Garonne (UMIH82). Pour y remédier, Ivo Danaf, le président de l'UMIH de Haute Garonne, en appelle au gouvernement.

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"Certaines mesures ne coûteraient rien à personne. Et puis, il existe trop de conditions pour obtenir les aides. De plus, nous ne pouvons plus assumer un report de charges. Nous demandons d'en être simplement exonérés".

Mais la communication avec les administrations est compliquée. Cyril Buesa estime que la filière n'est "pas écoutée par les politiques". "Le député LREM de mon département m'a lui-même confié que nous vivons actuellement un déni de démocratie", témoigne-t-il.

Un parlementaire au rassemblement

Seul parlementaire présent à la réunion de syndicats du 12 octobre, Pierre-Antoine Lévy, sénateur du Tarn-et-Garonne, admet que le combat de la filière va être difficile.

"C'est le comité scientifique qui décide aujourd'hui des directives à prendre. Il ne va pas être facile de se lever contre lui, tant que la crise sanitaire perdurera. Mais si toutes les branches touchées par ces mesures difficilement compréhensibles arrivent à se réunir, ils seront plus nombreux. Et je pense qu'il sera alors possible de faire bouger les choses".

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