L'Occitanie va mieux mesurer les pesticides dans l'air

Pour la première fois, Atmo Occitanie dispose de huit sites à travers la région pour mesurer les pesticides dans l'air. De quoi mieux connaître à terme les effets sur la santé des produits phytosanitaires. En parallèle, les Faucheurs volontaires de l'Ariège ont lancé au printemps une campagne pour détecter la présence de glyphosate dans les urines. Les premières analyses livrent des taux de pesticides largement supérieurs aux valeurs recommandées, y compris pour les habitants des villes. Décryptage.
Atmo Occitanie lance une campagne régionale de mesure des pesticides dans l'air.
Atmo Occitanie lance une campagne régionale de mesure des pesticides dans l'air. (Crédits : DR.)

Dominique Masset vit à Foix, dans l'Ariège, département essentiellement d'élevage et éloigné des grandes cultures céréalières. "Je vis en ville, je mange bio dès que je peux, je suis végétarien et je ne fume pas. Et pourtant mes analyses urinaires montrent que j'ai 3,3 nanogrammes de glyphosate par millilitre, c'est 33 fois supérieur au seuil de 0,1 ng/ml admissible dans l'eau potable", témoigne ce membre des Faucheurs volontaires ariégeois.

Le collectif a lancé au printemps 2018 une campagne nationale pour détecter la présence de l'herbicide tant décrié. Sur les 200 échantillons analysés par un laboratoire indépendant en Allemagne, le taux moyen est de 1,2 ng par ml, et donc 12 fois plus que le seuil recommandé. Une fois avoir eu connaissance des résultats, les participants peuvent se joindre à un dépôt de plainte collectif pour "mise en danger de la vie d'autrui, tromperie aggravée et atteinte à l'environnement" (contre une contribution de 140 euros pour financer notamment la venue des huissiers de justice). La centaine de plaintes déjà recensée est compilée actuellement par le pôle santé publique du tribunal de grande instance de Paris.

Une étude qualitative pour connaître l'impact du mode de vie sur la présence de pesticides

La base de données va être enrichie puisque 1 500 personnes supplémentaires en France se sont portées volontaires pour réaliser des prélèvements. Ainsi, dans 55 départements, des prélèvements seront organisés. À Toulouse par exemple, la prochaine campagne de détection est prévue vendredi 21 décembre.

"Au-delà des résultats quantitatifs, nous allons également mener des études qualitatives. Le jour du prélèvement, le participant va remplir un questionnaire pour connaître son âge, son mode de vie, son travail, etc. Une équipe de sociologues va mener une étude pendant deux-trois ans", poursuit Dominique Masset.

De quoi permettre à terme d'établir des corrélations entre telle profession ou tel mode de vie et un niveau d'exposition au glyphosate.

Huit sites de mesures des pesticides en Occitanie

De son côté, Atmo Occitanie réalise pour la première fois des relevés de différents pesticides (herbicides, fongicides, insecticides) dans l'air sur une année complète (entre le printemps 2018 et juin 2019). Huit sites font l'objet de mesures : les terres viticoles du Grand Cahors dans le Lot, de l'Hérault, l'Aude et à proximité de Nîmes, mais aussi les grandes cultures céréalières du Lauragais en Haute-Garonne et plus globalement dans le Grand Toulouse et enfin les cultures arboricoles du Tarn-et-Garonne et des Pyrénées-Orientales. "L'idée est d'observer différentes productions agricoles", fait remarquer Dominique Tilak, directrice générale d'Atmo Occitanie.

Au cours des dernières années, l'organisme a déjà réalisé des mesures sur certains de ces territoires.

"Dans le Lauragais, des concentrations cumulées importantes de produits phytosanitaires ont été observées sur la campagne 2014-2015, avec 106 ng par m3 de pesticides et 14 molécules quantifiées. Mais lors de la campagne 2016-2017, les niveaux étaient trois fois moins importants. Des conditions météo particulières comme par exemple des épisodes de grêle peuvent favoriser l'apparition de maladies et un recours massif à des fongicides. Ce qui pourrait expliquer le pic en 2015", suggère Dominique Tilak.

À l'inverse, le Lot "apparaît comme la zone la plus préservée en terme de phytosanitaires sur l'ensemble des campagnes qui ont été effectuées jusqu'alors sur la région Occitanie", avec une concentration cumulée de seulement 1,6 ng/m3 de produits phytosanitaires.

Pourtant, il est difficile à ce jour de décrypter ces chiffres bruts. L'experte souligne qu'actuellement "il n'existe aucune valeur règlementaire pour la présence de pesticides dans l'air. Il faudrait plusieurs années de mesures pour constituer une solide base de données et savoir quel est l'impact sur la santé des phytosanitaires".

Pour y parvenir, il faudra aussi le soutien des pouvoirs publics. Sur trois sites occitans, les relevés sont réalisés avec le soutien de l'ARS (agence régionale de santé), du Lot et de la Région Occitanie. Les cinq autres sites sont intégrés dans la campagne nationale lancée par l'Anses (agence nationale de sécurité sanitaire) pour un budget d'un million d'euros par an.

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