Municipales : une campagne rythmée par le coût du logement ? (3/4)

Depuis quelques trimestres, Toulouse enregistre, tout à la fois, une hausse des prix du mètre carré à l’achat et une augmentation des loyers. Une situation qui monopolise l’attention des candidats au Capitole.
Entre 2018 et 2019, les prix des biens immobiliers neufs ont grimpé de 5 % à Toulouse.

Le constat est sans appel dans la Ville rose. S'y loger devient de plus en plus cher, d'après une tendance analysée ces dernières années. Pour preuve, dans son récent rapport annuel, l'Observatoire des loyers toulousains fait savoir qu'à la location le prix du mètre carré atteint 11,8 euros hors charges en 2018, contre 10,9 euros en 2013. En intégrant la périphérie, le loyer médian retombe à 11,1 euroscontre 10,3 euros cinq ans en arrière. Même si Toulouse reste parmi les grandes villes les moins chères de France, le maire sortant, Jean-Luc Moudenc, a été alerté par cette situation et a mis en place une commission de travail pour envisager l'instauration de l'encadrement des loyers, comme le permet la loi Élan.

Jusqu'à présent, l'élu se refusait catégoriquement à envisager cette hypothèse, craignant de faire fuir les investisseurs immobiliers. Alors que cette commission doit rendre ses conclusions prochainement, l'opposition crie à l'opportunisme politique en raison de l'approche des élections municipales. Néanmoins, ce projet d'encadrement des loyers est porté unanimement par tous les candidats de gauche pour ce prochain scrutin, aussi bien par Nadia Pellefigue (UNE-PS-PRG-PC), Antoine Maurice (EELV, Archipel Citoyen) et Pierre Cohen (Génération.s). Pour le candidat du Rassemblement national et de la Droite populaire, Quentin Lamotte, le problème est ailleurs.

"Avec une telle mesure, vous touchez au bon vouloir de chacun de faire ce qu'il souhaite de son bien immobilier. De plus, l'encadrement des loyers est une mauvaise solution car vous allez traiter la cause d'un problème sans agir à sa source. Cette hausse des prix est liée au phénomène d'hyper métropolisation, qui concentre tout sur la ville centre. Il faut mettre en œuvre un schéma de rééquilibrage global des territoires de l'agglomération toulousaine", estime l'élu d'opposition au Conseil régional d'Occitanie.

Par ailleurs, cette tendance à la hausse se retrouve aussi dans les prix du marché immobilier du neuf et de l'ancien. Pour ce dernier, le prix du mètre carré a augmenté de 5,5 % entre 2018 et 2019, atteignant le prix moyen de 2 700 euros dans la ville de  Toulouse. La statistique se limitait à 2 500 euros en 2016, d'après des données fournies par les notaires de la Cour d'appel de la Ville rose.

Mais si l'ancien atteint par exemple les 4 800 euros dans le quartier de Saint-Étienne, ces chiffres sont loin d'être exorbitants quand il s'agit du neuf. Selon L'Observer, qui regroupe tous les promoteurs immobiliers et analyse le marché de neuf, le prix moyen du mètre carré dans la ville de Toulouse a atteint le cap des 4 000 euros le mètre carré, en logement collectif, hors aidé et hors parking. Ce qui représente une hausse de 5 % par rapport à l'année dernière, et même de 9 % comparé à 2017. Une telle situation s'explique par une demande toujours aussi forte pour venir s'installer dans la région toulousaine, couplée à une baisse des stocks des promoteurs.

La propriété moins accessible

Par conséquent, certains habitants s'éloignent de la ville-centre pour réaliser leurs projets de vie. "Se rapprocher de Toulouse signifie souvent passer du statut de propriétaire à celui de locataire [...] Et parmi les ménages qui s'éloignent de Toulouse, la moitié quitte un appartement pour une maison individuelle. Et lorsqu'ils s'éloignent de la ville-centre, un tiers des ménages deviennent propriétaires", constataient en octobre l'Insee et l'Agence d'urbanisme et d'aménagement de Toulouse dans une enquête commune. Une situation que regrette la socialiste Nadia Pellefigue.

"Jean-Luc Moudenc a vendu aux enchères du foncier aux promoteurs depuis six ans. Un gaspillage qui a été l'un des facteurs principaux de l'augmentation des prix", estime la candidate au Capitole.

Pour tenter d'enrayer cette hausse, la municipalité sortante a instauré en avril un Plan local d'urbanisme intercommunal et de l'habitat (PLUi-H) à l'échelle de la métropole devant mettre en application le principe de "densité modérée".

"Le PLUi-H prévoit 35 % de logements sociaux alors que la loi nous impose un taux de 25 % [sur les 7 000 logements qui seront construits chaque année dans l'agglomération, ndlr], 10 à 15 % d'accession sociale à la propriété et autant de logements à prix maîtrisé. Ce qui fait que deux logements sur trois sont proposés aux Toulousains à des prix inférieurs aux tarifs du marché. Nous allons ainsi agir pour contraindre les prix et ne pas laisser faire la loi du marché, qui exclut de la ville pour se loger. De plus, notre action est bien plus solidaire que la municipalité précédente. Depuis 2015, nous avons produit 27 % de logements sociaux de plus par rapport à la période 2009-2014", avance Jean-Luc Moudenc.

Dans les faits, la municipalité dirigée par l'ex-maire Pierre Cohen a livré 8 437 logements sociaux à Toulouse entre 2009 et 2014. Mais sur les cinq années suivantes, ce sont 10 713 logements sociaux qui ont été mis à disposition des habitants. Une politique volontariste sur ce point qui s'est accompagnée d'un renouvellement en 2016 du prêt à taux zéro pour les primo-accédants de la Ville rose.

Séparer le foncier du bâti

Enfin, lors du dernier conseil de Toulouse Métropole, le 21 novembre, son président Jean-Luc Moudenc a fait approuver une délibération afin de créer un organisme de foncier solidaire.

"Avec cette structure, nous allons séparer le coût du terrain de celui du bâti. Ainsi, la collectivité gardera la propriété du terrain pour que le prix final aux acheteurs d'un bien soit moins important qu'il ne l'aurait été sans notre intervention", explique le maire sortant, également président de France urbaine.

Une mesure qu'approuve Nadia Pellefigue, sans pour autant partager la vision urbanistique de son adversaire.

"Nous mettrons en place une stratégie pour chaque quartier afin de rompre avec le développement anarchique des faubourgs et des quartiers de la ville. Il faut développer d'autres centralités », avance la vice-présidente du Conseil régional d'Occitanie, chargée du développement économique, de la recherche, de l'innovation et de l'enseignement supérieur.

Une fois élue, cette dernière compte ainsi lancer ce qu'elle appelle La Fabrique des quartiers. "C'est l'engagement de construire des projets avec les habitants et les usagers du quartier. Nous considérons que lorsqu'un projet voit le jour, il faut mettre tout en oeuvre pour que les habitants se l'approprient. C'est une manière très différente de bâtir Toulouse que de lancer des concours avec quelques urbanistes sans associer les habitants", ajoute-t-elle, dans une allusion au concours "Dessine-moi Toulouse". Quelle que soit la vision qui l'emportera en mars 2020, la Ville rose doit être reconstruite sur elle-même afin d'être en capacité d'accueillir les milliers de nouveaux habitants qui arrivent chaque année.

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Commentaire 1
à écrit le 19/12/2019 à 9:01
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Le logement devrait être soustrait à la spéculation financière car bien trop vital pour les productifs et le pouvoir d'achat.

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