Départementales : En Haute-Garonne, le canton de Cazères ne veut pas être abandonné

À l'image du Département, la gauche se présente divisée sur le canton de Cazères, face à une droite unie, représentée par la jeune Jennifer Courtois-Perissé, mise en avant par Jean-Luc Moudenc. Les candidats souhaitent tous maintenir les services de proximité dans ce territoire rural mais s'affrontent sur la question des ressources financières du Département.

91 communes. 5 communautés de communes. 41 760 habitants. Avec celui de Luchon, le canton de Cazères, territoire de Carole Delga, est l'un des plus étendus de Haute-Garonne. Une trentaine de kilomètres de petits vallons et de champs séparent Rieumes, l'autre ville principale de la circonscription, de Cazères, le chef-lieu. Un abîme pour certains. "Les électeurs ne comprennent pas ce grand canton, assure Patrick Boube, conseiller général PCF sortant de l'ancien canton d'Aurignac et maire de Boussan. On passe d'une égalité des territoires à un département coincé entre la métropole et le reste, avec le risque de reléguer le Comminges et le Volvestre." Maire de Rieumes et conseillère sortante divers droite sans étiquette, Jennifer Courtois-Périssé fait le même constat : "Le chef lieu est à l'autre bout du canton. Avec l'annonce de la concentration des services publics là-bas, ce n'est pas sans conséquence pour les habitants qui devront s'y déplacer. Cela montre la méconnaissance du territoire."

Un canton abandonné ?

Ce sentiment d'abandon que relèvent les deux élus, Sandrine Duarte, la candidate socialiste, le tempère : "Le canton de Cazères est nouveau mais c'est un territoire où le Département a tissé un maillage de solidarité reconnu par tous, citoyens comme élus."

L'adjointe au maire de Bérat, et candidate remplaçante aux cantonales 2011, assume et défend le bilan du Conseil général sortant dirigé par une écrasante majorité socialiste.

"Nous sommes issus de la majorité sortante. Nous l'affichons clairement car le Département a fait ses preuves en matière de solidarité et d'équité. La droite parle de clientélisme mais ce n'est qu'un concept. Les actions du Département sont des faits : gratuité des transports, RSA, Afpa. C'est la réalité. "

Dans un canton rural comme celui de Cazères, les candidats de tous bords prennent un soin particulier à ne pas opposer métropole et "ruralité". "Nous avons la chance d'avoir une métropole dynamique dont les cantons ruraux profitent grâce à la redistribution, poursuit Sandrine Duarte. Mais Toulouse bénéficie aussi des cantons qui lui apportent des travailleurs."

"Le Département doit rester un partenaire du rural, prévient pour sa part Jennifer Courtois-Périssé. C'est la première fois que la ruralité sera sous-représentée à l'assemblée départementale. Nous devons faire valoir un vrai équilibre entre la Métropole et la ruralité."

Sur le territoire du canton, le nombre d'élus passe en effet de 14 à 6 alors que l'effectif de la future assemblée reste constant. "Il y a un déséquilibre en faveur de la Métropole, s'inquiète Patrick Boube (PCF). Si le Département bascule à droite, j'ai peur que la Haute-Garonne fasse comme à Lyon où le département a disparu face à la métropole."

Une crainte partagée par Sandrine Duarte. "Nos adversaires de la droite proposent un autre projet politique pour le département. Jean-Luc Moudenc a annoncé qu'il financerait la 3e ligne de métro et la 2e rocade de Toulouse avec le Département. Le conseil général attribue 54 % de ses ressources à la Métropole. Nous ne savons pas quelle sera la part du gâteau pour les cantons ruraux à l'avenir."

Trouver des financements

Quelle doit être l'action du Département vers les territoires ruraux ? L'enjeu n'est pas propre au canton de Cazères mais il divise, sans surprise, les différents candidats.

Pour redynamiser le territoire, le Département pourrait mettre l'accent sur la transition énergétique, selon l'un des candidats de Nouvelle Donne. "Mettre des capteurs solaires sur les collèges et du bio dans les cantines, cela créerait des emplois dans notre territoire délaissé", assure en effet Jacques Polaillon.

"Nous allons nous mobiliser pour maintenir ces services de proximité et renforcer le social en faveur du rural, déclare Jennifer Courtois-Périssé. Avec les baisses de dotations de l'État, nous allons supprimer les doublons qui ponctionnent les financements du Département."

Si la candidate socialiste convient de l'importance du maintien des services de proximité, son adversaire communiste entend d'abord trouver des financements. "Nous étions sous perfusion de l'État, j'ai peur qu'on entre en soin palliatif, remarque Patrick Boube. La candidate de droite veut faire des économies mais ce ne sont que des broutilles."

Une seule solution selon lui : s'attaquer à la fraude fiscale "d'un milliard d'euros en Haute-Garonne et taxer les actifs financiers à 0,5 % pour financer les collectivités locales". Peu importe que cela ne soit pas dans les compétences du Département, "les élus feront pression sur le gouvernement en ce sens, poursuit Patrick Boube. On ne peut pas faire de promesses sans résoudre cette question."

Pour résoudre cette équation financières, le FN propose quant à lui de faire un "état des lieux des dépenses publiques et d'économiser celles qui sont inéquitables". "Des associations dont je ne citerai pas les noms en reçoivent alors qu'elles ne devraient pas, précise Christine Mère, la candidate FN en binôme avec Claude Galiana. Il faudrait également contrôler la fraude au RSA." Sur ce point le Front National et la droite unie sous l'étiquette "Ensemble pour la Haute-Garonne" se rejoignent. "Nous avons des idées communes, confirme Christine Mère, mais ce qui nous différencie, c'est la ligne politique. Jennifer Courtois-Périssé, que je connais, s'affiche sans étiquette alors qu'elle est à l'UMP."

Une droite sans étiquette

"Je ne suis pas à l'UMP", s'insurge cette dernière. Je n'appartiens pas à un parti. Je suis indépendante. Nous sommes sans étiquette mais pas sans valeur. Je travaille avec Ensemble pour la Haute Garonne mais j'ai déjà voté des décisions de la majorité socialiste."

Malgré ses dénégations, la maire de Rieumes s'est affichée aux côtés de l'UMP Jean-Luc Moudenc lors la présentation des candidats Ensemble pour la Haute-Garonne (rassemblant UMP, UDI, Modem et MPF). "Quand je l'ai rencontré, je lui ai dit que ce n'était pas courageux de se présenter masquée, raconte Patrick Boube, le candidat PCF. Je reconnais qu'elle défend la ruralité et la proximité des élus dans leurs territoires, mais ces choses là sont terminées vue l'ampleur du canton."

Abstention et Front national

De gauche comme de droite, les candidats sillonnent le canton pour convaincre les électeurs. Une lourde tâche vus les taux d'abstention records à ces élections (plus de 50 % en 2011).

"Les électeurs sont parfois en colère, reconnaît Sandrine Duarte, la candidate PS. J'espère qu'avec de la pédagogie nous pourrons la désamorcer."

"Sur les marchés, les gens nous disent que la politique ne les intéresse pas, ajoute Jacques Polaillon, le candidat Nouvelle Donne. Ils ne font pas la différence entre la gauche et la droite, mais ils disent qu'ils ne veulent pas voter pour le FN. Nous leur expliquons que nous construisons un mouvement citoyen pour mobiliser les électeurs autour des projets du Département." Pour Patrick Boube, trois éléments expliquent le risque élevé d'abstention : "les affaires discréditent les politiques ; les jeunes ne voient pas l'enjeu ; le découpage est incompris."

Le FN, dont tout le monde parle, pourrait profiter de la situation pour confirmer sa percée de 2011. À l'époque, ses candidats avaient atteint le second tour dans 6 cantons. "La montée du FN est réelle. Le PS en est en partie responsable car il ne répond pas aux attentes des citoyens. C'est un vote de contestation, pas d'adhésion", veut croire le candidat communiste.

"Le FN, sur le canton, on ne les voit pas, mais il y aura sûrement un fort vote, considère également Jennifer Courtois-Périssé. C'est un vote de contestation, même si nous travaillons en proximité pour redonner confiance aux gens en la politique."

"Le FN ne fait pas campagne en dehors de l'affichage mais il y a un risque réel, confirme Sandrine Duarte. Il joue sur le flou de son programme et la crédulité des gens." "Nous n'avons pas fait de réunions publiques mais nous sommes allés sur les marchés", assure pourtant Christine Mère, la candidate FN en binôme avec Claude Galiana.

À Cazères en tous cas, les candidats évitent de faire des pronostics sur les résultats du premier tour. La gauche avance divisée en trois listes. Une situation "regrettable", selon Sandrine Duarte, mais dont la responsabilité incombe au PS selon Patrick Boube. "Le PS a voulu faire l'union mais ne tient pas compte des précédents scrutins où son hégémonie s'est effritée, analyse-t-il. Le département restera à gauche s'il y a un respect de toute la gauche."

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