Les chefs d’entreprise d'Occitanie se lancent dans le Grand Débat National

La Chambre de commerces et d’industrie (CCI) d’Occitanie a organisé une réunion locale affiliée au Grand Débat National, voulu par le président de la République en réponse au mouvement des Gilets Jaunes. Cette réunion, comme vont s’en dérouler des milliers d’autres en France jusqu’au 15 mars a réuni près de 150 chefs d’entreprise de l’agglomération toulousaine. Et ils sont tous d’accord sur un point : oui pour payer de l’impôt, mais un impôt repensé. Reportage.
La salle était pleine pour le débat organisé par la CCI Occitanie à Blagnac.
La salle était pleine pour le débat organisé par la CCI Occitanie à Blagnac. (Crédits : Pierrick Merlet)

Alors que l'Acte XIII des Gilets jaunes s'est déroulé samedi 9 février dans la Ville rose, les chefs d'entreprise et commerçants, premières victimes de ce mouvement par les conséquences économiques qu'il engendre, ont décidé de prendre la parole. Pour cela, en plus d'actions coup-de-poing comme la mise en vente fictive de centaines de commerces du centre-ville toulousain, la Chambre de commerce et d'industrie d'Occitanie (CCI) a décidé de leur organiser une réunion locale du Grand Débat National.

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Pour rappel, cette initiative du chef de l'État, Emmanuel Macron, est une réponse au mouvement social des Gilets jaunes. Il doit se dérouler du 15 janvier au 15 mars, et faire remonter les colères et demandes de tous les Français. Le nombre de participants au niveau national conditionnera la réussite de cette initiative politique.

Une opportunité que les chefs d'entreprise locaux ne vont pas laisser passer. Le rendez-vous est fixé au siège du corps intermédiaire, à Blagnac, en fin d'après-midi, mardi 12 février. "L'objectif de notre soirée est de faire entendre la voix de l'entreprise, qui est trop souvent absente des débats", estime Alain Di Crescenzo, le président de la CCI Occitanie et fondateur d'IGE+XAO. Après avoir rappelé les règles de bon conduite, devant une salle comble de 150 personnes ce soir-là, il annonce le grand thème de la soirée : "La fiscalité et les dépenses publiques. Les enjeux de compétitivité de notre économie".

Des idées pour réduire les dépenses publiques

Les entrepreneurs toulousains ne se font pas prier pour prendre la parole et présenter leur analyse.

"La France a 20% de fonctionnaires de plus que la plupart des autres pays européens et développés. Ces 20% d'effectifs supplémentaires rognent la compétitivité de nos entreprises, car celles-ci sont les premiers financeurs de l'État", lance un dirigeant.

Un autre le complète en expliquant que "l'Allemagne a le même nombre d'élèves que la France, des professeurs payés 30% de plus que ceux en France et pourtant le budget de l'éducation allemand est 10% inférieur à celui de la France. C'est mal géré, il faut dépenser mieux". Pour cet homme d'une cinquantaine d'années cela passe par une Cour des comptes qui ne contente pas de pointer du doigt ce qui ne va pas dans ses rapports, mais aussi "aller chercher ce qui marche ailleurs".

Pour d'autres, les économies afin de réduire les dépenses publiques qui représentaient 56,5% du PIB français en 2017 sont à aller chercher dans la réduction du millefeuille territorial national.

"Aujourd'hui, nous avons quatre niveaux, à savoir les Régions, les Départements, les communautés d'agglomération et enfin les communes. N'est-ce-pas trop ? Quel niveau dans ces cas-là on doit supprimer ? Il me semble qu'il y autant de communes en France que dans tout le reste de la zone euro rassemblée. C'est inconcevable", analyse un chef d'entreprise.

Seulement, deux jours après ce débat, Toulouse Métropole a annoncé renoncer à la fusion avec le Département de Haute-Garonne. Le Grand Débat National va-t-i faire remonter à la surface ce projet ?

Mettre fin à l'impôt sur la production

Une fois la partie dépenses publiques terminée, place à celle portant sur la fiscalité des entreprises. Une seconde partie qui a dû retenir l'attention, du préfet de région, Étienne Guyot, et Sophie Garcia, présidente du Medef Occitanie, tous deux présents dans la salle.

"Actuellement, la fiscalité des entreprises est de 33% en France, contre 15% en Allemagne et 25% en Espagne. Mais l'objectif du gouvernement français actuel est de faire tomber ce taux à 25%", tient à faire remarquer Alain Di Crescenzo, pour lancer le débat. Les idées des dirigeants ne manquent pas pour aider le gouvernent à atteindre cet objectif.

"Payer des impôts, je suis d'accord. Mais payons des impôts sur nos bénéfices nets et non plus sur des tranches pré-définies par l'État !", lance une commerçante de la région. Ce qu'elle vise particulièrement, c'est l'impôt sur la production, une fiscalité que toute entreprise doit payer quel que soit le chiffre d'affaires qu'elle réalise.

"L'impôt sur la production est un impôt injuste, qu'il faut stopper. Nous payons cet impôt même si aucun euro de richesse n'est apporté à l'économie", ajoute Alain Di Crescenzo, tout en soulignant que cet impôt rapporte 72 milliards d'euros par an à l'État.

Pour d'autres, une meilleure compétitivité de leur entreprise passe par une harmonisation de la fiscalité des sociétés au niveau européen.

Baisser les charges patronales

 Mais la fiscalité des entreprises, c'est aussi le coût du travail. Selon les chiffres fournis par la CCI Occitanie, il était de 38,3 euros de l'heure en France en 2017, contre 36,6 euros en Allemagne et 25,6 euros au Royaume-Uni.

"En réduisant le coût du travail, on permettrait plus facilement des embauches certainement. Aujourd'hui, les entreprises se retiennent parfois d'embaucher une personne car cela coûte trop cher", avance un chef d'entreprise basé à Blagnac.

Pour une participante, la marge de manoeuvre se trouve dans les charges patronales.

"Elles ont un poids significatif par rapport à d'autres pays comme l'Allemagne où ces charges sont moins importantes, et par conséquent les salaires sont plus élevés. Une action doit être réalisée à ce sujet".

Toutes ces suggestions ont bien été notées par une personne installée à proximité des participants et dont l'animateur n'a pas manqué de présenter. "Elle sera chargée de faire remonter au gouvernement toutes nos remarques", a précisé Alain Di Crescenzo. Comment ? Le gouvernement a lancé un site internet sur lequel, il est possible pour les organisateurs de débats comme celui-ci de restituer le compte-rendu. Maintenant, après deux heures d'échanges, reste à savoir quelles idées retiendra le gouvernement à l'issue de cet exercice démocratique inédit.

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