C'est (peut-être) un jour à marquer d'une croix blanche pour les pro-LGV entre Toulouse et Bordeaux. Un peu moins de 48 heures en arrière, le Sénat, la chambre haute du parlement, a adopté quelques amendements décisifs concernant le financement de la LGV Toulouse-Bordeaux, aussi connue sous le nom de GPSO (Grand Projet ferroviaire du Sud-Ouest). Ces mesures concernent également les projets de ligne à grande vitesse entre Montpellier et Perpignan, ainsi que Marseille-Nice. Une démarche qui s'est déroulée dans le cadre de l'examen du PLF 2023.
L'un d'eux concerne tout d'abord la taxe spéciale sur les équipements (TSE), créée il y a quelques mois dans le projet de loi de finances 2022. Celle-ci a vu le jour avec la volonté d'alimenter uniquement la société de projet dédiée à GPSO et ainsi réduire la part d'investissements des collectivités locales d'Occitanie et de Nouvelle-Aquitaine concernées par ce futur équipement.
Une TSE pour 29 millions d'euros par an de recettes ?
Initialement, elle devait rapporter 24 millions d'euros par an au projet, et concerner toutes les personnes physiques et morales se situant à une heure de route d'une gare desservie par cette future LGV entre Toulouse et Bordeaux. Le Medef de Haute-Garonne était (et est toujours) vent debout contre cette fiscalité nouvelle, tout comme la CPME Haute-Garonne.
"À partir du moment où vous avez une LGV, une activité économique exceptionnelle est générée et les entreprises peuvent ainsi espérer une croissance supérieure à ce qu'elles auraient eu sans elle. Nous devons tenir compte de cet effet d'aubaine. Grâce à l'investissement public, les entreprises privées vont se développer plus qu'elles ne l'espéraient", avait justifié Jean-Luc Moudenc, le maire de Toulouse et président de la Métropole lors d'un débat en conseil métropolitain en octobre 2021. Du côté du conseil régional d'Occitanie, la volonté dans la communication a été de toujours minimiser son impact. "Elle ne concernerait que les ménages propriétaires. 42% des foyers ne seraient donc pas concernés", précisait-elle encore il y a peu. Selon la collectivité, la majoration de cette TSE sur la taxe foncière pour la population serait de 0,4%, ce qui générerait un montant moyen par foyer d'impôt supplémentaire situé entre trois et quatre euros. C'est peu, certes, mais dans un contexte d'inflation et de réduction du pouvoir d'achat c'est hautement inflammable politiquement parlant.
Seulement, ce calcul ne tient pas compte des modifications apportées fraîchement par le Sénat. L'amendement adopté par celui-ci gonfle et fixe le produit de cette TSE à 29,5 millions d'euros par an, dès 2024, alors que la collecte de celle-ci doit démarrer en 2023.
"Des ressources complémentaires seront toutefois requises pour permettre aux collectivités territoriales d'apporter le financement nécessaire à l'avancement du projet. C'est pourquoi, pour tenir compte des demandes des collectivités concernées, le présent amendement propose, à compter de 2024 :
- d'une part, de relever le plafond de la TSE de 24 millions d'euros à 29,5 millions d'euros par an ;
- d'autre part, de créer, sur le modèle de la TSE, une taxe spéciale complémentaire répartie uniquement entre les personnes assujetties à la cotisation foncière des entreprises (CFE), pour un montant annuel de 21,5 millions d'euros", peut-on lire dans le texte voté par le Sénat.
Cette dernière doit ainsi devenir la taxe dite de "bureaux", en s'inspirant du modèle de financement du Grand Paris Express. D'ailleurs, le modèle économique de ce projet de transport urbain a toujours été la source d'inspiration des collectivités à la tête de GPSO, à savoir les conseils régionaux d'Occitanie et Nouvelle-Aquitaine, ainsi que les Métropoles de Toulouse et Bordeaux.
Les touristes vont passer à la caisse
Si ce premier amendement concerne particulièrement la LGV entre Toulouse et Bordeaux, le second adopté par le Sénat concerne les trois projets de LGV du pays et "s'attaque" particulièrement aux flux touristiques des territoires concernés.
"Afin de financer ces lignes, les collectivités territoriales ont demandé la mise en place d'un nouveau panier de ressources et plus spécifiquement une taxe additionnelle à la taxe de séjour ou à la taxe forfaitaire de séjour. Cette taxe d'un taux de [34 %] s'ajoutera à la taxe de séjour instituée par la commune ou l'EPCI sur le territoire des départements concernés par les futures lignes. Elle sera instituée dès 2023 pour le financement de la Ligne Nouvelle Provence Côte d'Azur et à compter de 2024 pour les deux autres projets de lignes nouvelles", est-il écrit sur le texte adopté par la chambre haute du parlement.
Ainsi, ce seront aux collectivités qui récoltent chaque année le produit de la taxe de séjour de verser à leur tour aux différentes sociétés de projet la part additionnelle créée par la législation.
"Eurosud Team et tous ses partenaires se félicitent aujourd'hui de l'action parlementaire transpartisane décisive, menée par les sénateurs des territoires", s'est ainsi réjoui dans un communiqué Jean-Louis Chauzy, le président d'Eurosud Team, une association qui oeuvre en coulisses depuis des années pour la concrétisation de la LGV entre Toulouse et Bordeaux. Reste maintenant à savoir si l'Assemblée nationale adoptera tel quel le texte modifié par le Sénat, sur ce point tout particulièrement.
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