Fabrice Brégier, Président et CEO d'Airbus

Pourquoi avoir choisi les États-Unis et le site de Mobile ?


Nous investissons aux États-Unis et y avons des partenariats depuis près de 40 ans. Nous y avons des centres d'ingénierie, de formation et de support client, tout comme des partenariats en termes de R&D et des partenariats universitaires. L'implantation de cette chaîne était donc la prochaine étape logique. Les États-Unis représentent actuellement le plus gros marché pour les appareils monocouloirs, et le resteront pour les 20 années à venir. Nous voulons donc être plus près de nos clients dans une région où nous prévoyons une croissance significative pour ce type d'avions. De plus, déplacer une partie de nos coûts de production vers la zone dollar nous aidera à réduire l'impact des fluctuations des taux de change. Par ailleurs, une grande partie de notre supply chain se trouve aux États-Unis, tout comme beaucoup de nos clients. Enfin, l'industrie aéronautique est une industrie globale, et les États-Unis sont un hub d'activité aéronautique pour la production et la recherche.

D'autres villes étaient-elles prêtes à accueillir Airbus?
Il y avait d'autres candidats aux USA, mais nous avons choisi Mobile en raison de sa situation géographique, couplée avec l'expérience que nous avions déjà dans cet État. Notre décision repose en effet sur l'existence d'infrastructures aéronautiques (Brookley Aeroplex, une ancienne base militaire de grande taille et sous-exploitée), sur une logistique existante en termes de transport (le port de Mobile) et une présence d'Airbus déjà ancrée (Centre d'ingénierie, Centre de support Airbus Military). Nous avons eu une expérience extrêmement positive à Mobile durant ces dernières années : les habitants, le monde économique, le gouvernement local et l'ensemble de la communauté ont tous été très accueillants et ont beaucoup soutenu nos activités là-bas.

Le site fournira-t-il uniquement les marchés nord et sud-américains ?
Il est prévu que les avions assemblés à Mobile soient livrés à nos clients nord-américains.

Comment sera formé le personnel américain ?
Notre objectif est de recruter localement. De plus, certains employés actuels d'Airbus joueront un rôle dans la formation de leurs nouveaux collègues à Mobile. La formation se déroulera très probablement des deux côtés de l'Atlantique. Le recrutement lié à la construction de l'usine démarrera cette année. Celui associé à la production des appareils à Mobile démarrera en 2013. À pleine cadence, la chaîne d'assemblage final et les activités annexes (fournisseurs et fonctions support chez Brookley Aeroplex) devraient employer près de 1 000 personnes hautement qualifiées. De plus, une étude récente estime à plus de 1 900 les emplois liés à la construction de l'usine, durant les deux années à venir.

La création du site de Tianjin était assortie d'une grosse commande. Ce n'est pas le cas cette fois, est-ce une inquiétude ?
Si vous demandez aux compagnies aériennes, elles vous diront que nous ne pouvons pas livrer les avions assez vite pour leur permettre de réduire l'augmentation du prix du carburant et d'atteindre les objectifs en termes d'émissions et de réduction du bruit. La demande pour des avions commerciaux dernier cri demeure très forte et nous prévoyons qu'elle sera encore plus importante d'ici 2016 (quand la chaîne de Mobile commencera ses livraisons). La famille A320 est la plus moderne et la plus efficace sur ce segment, un best-seller dans la famille Airbus. Aux États-Unis particulièrement, la demande de monocouloirs est énorme. Pour le marché américain nous prévoyons une demande de l'ordre de 4 600 monocouloirs dans les 20 années à venir. Une chaîne d'assemblage final sur place, proche de ces clients, est donc très pertinente en termes de marché (comme c'était le cas en Chine).

Comment les compagnies américaines accueillent-elles la nouvelle ?
Nous avons reçu le soutien de plusieurs compagnies américaines, qui nous ont d'ailleurs accompagnés durant la cérémonie d'annonce à Mobile. Par ailleurs, nous avons reçu un support clair de la part des populations et élus américains pour étendre notre production aux États-Unis et créer des emplois et de la croissance économique. Nous sommes fiers de contribuer à cette croissance, tout comme nous l'avons fait ailleurs dans le monde. Depuis environ 30 ans, notre part de marché aux États-Unis (en nombre de livraisons cumulées, tous appareils) est de 17 %. Sans aucun doute, l'A320 est un des avions best-sellers dans le monde. Fin mai, nous comptions pour cet appareil 246 clients pour 8 418 avions livrés, dont 7 clients basés aux États-Unis (et plus de 775 appareils de la famille A320 actuellement en opération au sein de compagnies américaines).

Inciterez-vous la supply chain à vous rejoindre, notamment pour réduire vos coûts logistiques ? Ce site peut-il être une tête de pont avancée pour les entreprises de Midi-Pyrénées ?
Bien sûr. Airbus recherche constamment les meilleurs fournisseurs-partenaires dans le monde, et nous encourageons toutes les sociétés qui pensent qu'elles ont quelque chose à offrir à contacter notre équipe des achats. La chaîne d'assemblage de Mobile fera partie du réseau global de production Airbus et fonctionnera selon les mêmes principes : les offres seront publiées au niveau global, le service des achats étudiera les propositions, et les fournisseurs seront choisis en fonction de leurs produits, de la qualité, des prix...

Avez-vous déjà rencontré les syndicats ? Plusieurs semblent inquiets. Votre rival Boeing évoque une promesse de délocalisation d'emplois de l'Europe vers les USA.

Oui bien sûr, nous rencontrons régulièrement l'ensemble de nos partenaires sociaux. D'ailleurs, la consultation des syndicats est un préalable obligatoire avant l'annonce de ce type de décision. Quant à délocaliser nos emplois, bien au contraire ! Cette nouvelle chaîne d'assemblage va générer de la croissance, et cette croissance va créer des emplois en Europe.

Combien d'emplois seront créés en Europe grâce à cette nouvelle usine ?

Pour chaque emploi créé à Mobile, ce sont 4 emplois qui seront créés chez Airbus en Europe, et plus encore dans l'ensemble de notre supply chain, qui reste majoritairement sur notre continent.

Pouvez-vous garantir que les cadences de production européennes seront maintenues ?
Les cadences européennes ne seront pas impactées, bien au contraire. Actuellement, nous ne pouvons pas livrer plus d'avions que nous ne le faisons en raison de l'activité très forte chez nos partenaires fournisseurs et sous-traitants. Cette nouvelle chaîne nous permettra d'aller au-delà. La cadence prévue pour Mobile sera de 4 avions par mois les premières années.

Le fait de s'installer en zone dollar a-t-il pesé dans la balance ?

Bien sûr ! Le déplacement d'une partie de nos coûts de production vers la zone dollar nous aidera à créer une couverture de change naturelle, réduisant ainsi notre exposition aux fluctuations des taux de change.

À combien s'élève le surcoût logistique, avec le transport des tronçons jusqu'au site de Mobile ?
Les coûts de transports sont négligeables par rapport au coût total de production d'un avion.

Où sera assemblé le successeur de l'A320neo ? Toulouse, Hambourg, Tianjin, Mobile, ou les 4 ?

Il est encore bien trop tôt pour le dire. Toutefois cet investissement à Mobile nous positionne aux États- Unis pour plus de 20 ans, donc si notre stratégie fonctionne, tout laisse à croire que l'aventure se poursuivra là-bas aussi.

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