Nicolas Sarkozy à Lauzerte pour défendre sa politique agricole

Nicolas Sarkozy a visité ce mardi 15 mars l'exploitation de Sophie Poux, agricultrice du Tarn-et-Garonne, avant de participer à Lauzerte à une table ronde consacrée à la modernisation des filières agricoles, devant près de 500 personnes. Dans les réponses du chef de l'État, pas d'annonce mais un soutien renouvelé à l'agriculture française. Il a aussi évoqué la situation au Japon, « absolument dramatique, d'une ampleur considérable ».Il lui avait promis de venir.

Nicolas Sarkozy a visité ce mardi 15 mars l'exploitation de Sophie Poux, agricultrice du Tarn-et-Garonne, avant de participer à Lauzerte à une table ronde consacrée à la modernisation des filières agricoles, devant près de 500 personnes. Dans les réponses du chef de l'État, pas d'annonce mais un soutien renouvelé à l'agriculture française. Il a aussi évoqué la situation au Japon, « absolument dramatique, d'une ampleur considérable ».

Il lui avait promis de venir. Un an après, il est finalement venu : Nicolas Sarkozy a visité ce mardi 15 mars l'exploitation de Sophie Poux, agricultrice de Lacour-de-Visa qui lui avait tenu tête en janvier 2010 lors de l'émission de TF1 « Questions de Français ». Arrivé en fin de matinée, le président de la République s'y est d'abord rendu, accompagné par quelques médias triés sur le volet, avant de participer à une table ronde dans le village voisin de Lauzerte. La salle des fêtes accueillait pour l'occasion 500 personnes : agriculteurs, élus des environs... Un dispositif policier impressionnant avait été mis en place dans tout Lauzerte, pas moins de quatre contrôles successifs étant par exemple nécessaires en 500 mètres pour retirer les accréditations presse. Outre Nicolas Sarkozy et le ministre de l'Agriculture Bruno Le Maire, la table ronde était composée de Fabien Sudry, préfet du Tarn-et-Garonne ; Sophie Poux, agricultrice ; Bernard Rey, maire de Lauzerte ; François Martinet, Jean-Paul Rivière, Stéphane Bec, agriculteurs ; Yvon Sarraute, président de la MSA départementale ; Françoise Roch, présidente de l'organisation de producteurs fruitiers Quercy-Soleil et Philippe de Vergnette, président de la Chambre d'agriculture départementale.

Assis aux côtés de Bruno Le Maire, ministre de l'Agriculture, Nicolas Sarkozy a été accueilli par quelques mots bien sentis de Philippe de Vergnette, évoquant « une situation se dégradant lentement pour l'ensemble de la profession ». Le président de la République a immédiatement contre-attaqué : « Il est toujours plus difficile de faire que de dire. Je ne laisserais jamais attaquer les agriculteurs, des entrepreneurs au réel savoir-faire. L'agriculture est un secteur économique vital pour la France, aussi important que d'autres, de pointe, comme l'aérospatiale ou l'aéronautique. » Le chef de l'État s'est prononcé en faveur d' « une agriculture durable, respectueuse de la qualité, de la santé. Nous avons l'agriculture la plus engagée d'Europe dans le respect des normes sanitaires. »

"Le problème, c'est les prix !"

Le premier intervenant, Stéphane Bec, exploitant et ancien président des Jeunes agriculteurs du département, a rappelé « qu'en huit ans, 1/5 des exploitations ont disparu. A l'horizon 2050, si ce rythme se poursuit, il n'y aura plus aucun agriculteur dans le département. » Il a évoqué « des revenus faibles et fluctuants, une mauvaise image du métier et des difficultés liées au foncier » comme freins à l'installation. Nicolas Sarkozy a affirmé « ne pas partager ce point de vue. Ne vous laissez pas intoxiquer par ce petit milieu qui critique tout, qui n'aime rien, qui ne s'aime même pas lui-même ! Les Français font confiance aux agriculteurs. Ce qui s'est passé pendant 30 ou 40 ans, c'est que les gouvernements ont considéré que les prix n'étaient pas importants puisque les agriculteurs bénéficiaient de subventions. Le problème, c'est les prix ! Et la seule façon d'arrêter avec la paperasse et les contrôles, c'est de remettre des prix. » Sous-entendu : les encadrer. Nicolas Sarkozy a estimé « important de dire au consommateur : certes, c'est plus cher mais c'est plus sain, et de meilleure qualité ». Son objectif : « 7.000 nouvelles exploitations par an. Mais je ne prends pas l'engagement que vous serez le même nombre d'agriculteurs dans les prochaines années, car des filières se moderniseront. Je préfère moins de producteurs, mais vivant mieux, que plus mais mourant tous. »

Jean-Paul Rivière, président de la Fédération départementale des syndicats d'exploitations agricoles, s'est alarmé des variations des prix des matières premières et du poids de la grande distribution « toute puissante », citant en exemple « le kilo de pommes payé au producteur 15 centimes d'euros, et vendu 2,50 € dans la grande surface la plus proche ». Pour Nicolas Sarkozy, « c'est le consommateur qui a choisi les grandes surfaces alors que l'agriculture les négligeait. Ce fut une erreur historique pour le secteur de ne pas entrer au capital des groupes de la grande distribution à leurs débuts. Je crois pour ma part en la nécessité de développer les circuits courts. Quand le producteur n'est pas au contact du consommateur, il se fragilise doublement car il ne maîtrise pas sa marge et n'adapte pas sa production aux désirs du consommateur. »

"Mettre d'accord 26 pays"

Le chef de l'État a aussi évoqué la contractualisation entre les agriculteurs et les industriels, prévue dans le cadre de la Loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche : « Créer une taxe qui sera reversée à la profession si le distributeur vous chipe des marges, c'est nouveau ! On croit en la contractualisation, on pense que c'est anormal qu'un producteur de lait vende son lait sans savoir à quel prix on va lui payer, c'est injuste ! »

Nicolas Sarkozy a aussi rappelé la difficulté à trouver une politique européenne unifiée : « On est à vos côtés, l'agriculteur français n'est pas seul mais il doit se convaincre que la France n'est pas toute seule et qu'on doit mettre d'accord 26 autres pays dans le cadre de la communauté européenne, ce n'est pas si simple. » Rappelant que « la question de la régulation du prix des matières premières est portée par la France », il a annoncé la tenue "au mois d'avril vraisemblablement, d'un sommet des ministres de l'Economie et de l'Energie pour parler de cette question des matières premières, bien sûr des matières premières énergétiques fossiles, mais aussi des matières premières agricoles."

L'Europe a justement été au centre de la question d'Yvon Sarraute, président de la Mutualité sociale agricole : « C'est bien, mais à condition que tous travaillent à armes égales. Il faut absolument une harmonisation des pratiques dans les pays voisins », citant en exemple les charges sur l'emploi des saisonniers. Pour le chef de l'État, « la clé, c'est la compétitivité ». L'occasion d'un tir en direction des 35 heures : « Est-ce que vous dites à vos enfants : Travaille moins, ça va aller beaucoup mieux ? » L'Europe, toujours : « Elle doit avoir le courage de fermer ses frontières aux produits qui viennent de pays qui ne garantissent pas la traçabilité. Ces produits doivent être taxés : ce n'est pas du protectionnisme, c'est de la saine concurrence. »

"Des événement dramatiques au Japon"

Rappelant que 300 millions d'euros allaient être engagés dans la modernisation des filières, le président de la République a aussi affirmé sa volonté de ne pas ouvrir en grand la bourse : « On vous donnera des moyens, mais dans le cadre d'un budget. On ne peut pas dire oui à tout ! » Agriculteur, François Martinet a soulevé lors d'une dernière question la problématique de l'eau et de l'irrigation, tout en affirmant que « ces gens qui n'aiment personne et que vous citiez tout à l'heure, il y en a plein vos ministères et vos administrations ! Ce sont eux qui vous empêchent de tenir vos promesses. » Réponse du président : « La question de l'eau n'est pas qu'une affaire d'écologistes. La loi sur l'eau est nécessaire, mais son application est trop rigide, notamment pour le bassin Adour-Garonne. » Une concertation devrait avoir lieu prochainement afin de l'assouplir pour le bassin du Sud-Ouest, entre Bruno Le Maire, ministre de l'Agriculture, et Nathalie Kosciusco-Morizet, ministre de l'Écologie et de l'environnement.

Interrogés au sortir de la table ronde sur leur ressenti, les deux adversaires politiques du département, Jean-Michel Baylet et Brigitte Barèges, étaient d'opinions radicalement différentes. « D'avis, je n'en ai point, affirmait le président du Parti radical de gauche et président du Conseil général de Tarn-et-Garonne. Ce n'était pas une table ronde sur l'agriculture mais une réunion électorale avec la profession dans le rôle de Monsieur Loyal. » Pour la députée-maire UMP de Montauban, « c'était vraiment un débat de qualité. J'ai beaucoup apprécié le discours du président, un discours de vérité, sans propos de convenances. » Le Conseil régional n'ayant pas été invité, n'avait pas délégué de représentant. Mais ce soir Martin Malvy a déclaré : « Nicolas Sarkozy avait annoncé qu'il venait en Tarn-et-Garonne pour annoncer des solutions aux graves problèmes laitiers. Il est effectivement venu à la campagne. Mais pour faire campagne. Les agriculteurs attendaient des solutions. Ils ont eu des promesses. La ruralité et l'agriculture en crise attendaient autre chose qu'un discours maintenant rodé et dont l'objectif n'est pas le quotidien de nos concitoyens mais le rendez-vous de 2012 ».

Au cours de cette journée en Tarn-et-Garonne Nicolas Sarkozy a évoqué brièvement la situation au Japon : « Les événements qui se sont produits sont absolument dramatiques, d'une ampleur considérable. Je me tiens informé minute par minute de l'évolution de la situation, pour en tirer toutes les conséquences nécessaires. J'aurai l'occasion au Conseil des ministres demain (mercredi) de l'évoquer. J'aurai l'occasion de parler du nucléaire, de ce qu'il apporte à la France, de la sécurité du processus français du nucléaire mais en même temps de notre obligation de regarder ce qui s'est passé ailleurs pour faire un retour d'expérience, pour garantir aux Français que ça ne peut pas se passer chez nous. »

Mikaël Lozano

En photo : le président de la République, Nicolas Sarkozy, en visite dans le Tarn-et-Garonne mardi 15 mars (© Rémi Benoit)

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