Marchés publics : 2 milliards d'euros d'achats en Midi-Pyrénées

Pour la première fois, une enquête sur la commande publique dans la région permet de mesurer les enjeux économiques de ce secteur. Dans un contexte de crise conjoncturelle, quand la commande privée s'effondre, on se tourne vers les marchés publics. Mais le secteur public, lui-même en pleine restructuration, peut-il compenser ? 1er acheteur : CHU de Toulouse (montant HT maximum 537 139 276 euros). 1er fournisseur (pour le CHU de Toulouse).

Pour la première fois, une enquête sur la commande publique dans la région permet de mesurer les enjeux économiques de ce secteur. Dans un contexte de crise conjoncturelle, quand la commande privée s'effondre, on se tourne vers les marchés publics. Mais le secteur public, lui-même en pleine restructuration, peut-il compenser ?

1er acheteur : CHU de Toulouse (montant HT maximum 537 139 276 euros).

1er fournisseur (pour le CHU de Toulouse).

3 254 fournisseurs ont travaillé avec les administrations de Midi-Pyrénées.

Montant global de la commande (HT) : 2 276 318 487 € (environ 3 % du PIB).

Chaque fournisseur a remporté en moyenne 2,36 marchés par an, dont environ 1900 réalisant un CA supérieur à 1 M€.

Origine géographique : 47 % Haute-Garonne, 32 % autres départements Midi-Pyrénées, 20 % reste de la France.

23% des entreprises qui travaillent avec les administrations de Midi-Pyrénées sont des entreprises de BTP.

1/3 du montant global de la commande publique a été remporté par 3,6 % des fournisseurs.

63 % du montant global de la commande publique concerne des administrations en Haute-Garonne.

Partage de la commande publique : 70 % PME, 19 % TPE, 11 % grandes entreprises.

39 % de la commande est attribuée au BTP, 14 % à l'architecture-ingénierie, 12 % aux transports.

2 milliards 276 millions 318 mille 487 euros ... C'est le montant global HT de la commande publique pour la région Midi-Pyrénées en 2008. Le palmarès régional des acheteurs publics affiche en tête de liste le CHU de Toulouse, le Conseil Régional Midi-Pyrénées, le Conseil Général de Haute-Garonne, la Ville de Toulouse ou encore Tisséo. Suivent de près les Conseils Généraux des autres départements. Ces éléments sont révélés dans une enquête publiée par l'entreprise toulousaine Secteur Public, spécialisée dans le traitement de la donnée publique. « Notre étude (1) est une tendance et non une photographie exhaustive, prévient Pascal David, co-fondateur de Secteur Public. Elle reflète environ 75 % du montant global de la commande publique régionale. »

La transparence, un premier pas

« Je suis partisan de la plus grande transparence dans ce domaine, réagit Étienne Morin, conseiller délégué aux marchés publics de la Ville, et président des Commissions d'appel d'offres, à la lecture de l'enquête. C'est un bon premier pas et ce sera encore plus intéressant avec plusieurs années de référence. » Si elle n'offre pas encore d'éléments de comparaison antérieurs, l'enquête permet néanmoins de situer les enjeux économiques des marchés publics régionaux aujourd'hui, quand on sait qu'en France, le montant global de la commande publique s'élève à environ 137 milliards d'euros, soit 10 % du PIB. Et que les collectivités financent 73 % de l'investissement public en France.


Suivant les tendances nationales, le grand gagnant des secteurs d'activité travaillant avec la commande publique en Midi-Pyrénées, est le BTP qui remporte plus du tiers de la commande. Suivi de l'architecture et de l'ingénierie, des transports et de la logistique. Environ 4 000 entreprises régionales travailleraient avec des acheteurs publics au niveau national, ce qui est peu au regard des quelques 100 000 entreprises que compte la région.

Les PME hors course ?

La vision caricaturale des marchés publics « pipés » et réservés aux gros opérateurs a la vie dure mais s'érode doucement. Tout comme la perception d'une administration payant ses fournisseurs dans des délais hors normes, ceux-ci ayant été ramenés à 30 jours au lieu de 45. « Je constate qu'en 20 ans, la relation s'est améliorée entre le service public et les entreprises, déclare Daniel Thebault, président du Medef Midi-Pyrénées. Ce que nous pouvons faire, c'est donner des conseils sur la façon de travailler en amont avec les acheteurs publics qui ne sont pas des clients ordinaires, mais il y a encore des freins du fait de la complexité des procédures, même si elles ont été simplifiées. » Une lourdeur administrative et juridique que les acheteurs publics tentent d'alléger : « On simplifie au maximum les mémoires techniques », précise-t-on à la mairie de Toulouse. « On allotit plus souvent pour faciliter la candidature des PME », dit-on chez Tisséo.


« La législation permet maintenant une dispense d'obligation de mise en concurrence et de publicité pour les marchés en dessous de 20 000 €, mais les acheteurs, craignant d'être poursuivis pour favoritisme, préfèrent conserver des procédures, ce qui peut pénaliser les PME, explique Jean-Michel Moreau, président de la commission Secteur public à l'Ordre des experts-comptables de Midi-Pyrénées. L'autre difficulté, ce sont les délais de réponse souvent très courts. »

Soutenir les entreprises locales ?

Pourtant, et contrairement aux idées reçues de PME à la porte du secteur public, elles occupent bel et bien la place : 64 % des marchés publics leur seraient attribués en France pour 37 % des montants de ces marchés (2). Et même 70 % en Midi-Pyrénées. « Par contre, on ne sait pas si elles ont accès aux gros marchés, commente Pascal David. Mais avec un tiers de la commande globale remportée par 3,6 % des fournisseurs, et 2,36 marchés par entreprise et par an, on constate que la commande publique est très atomisée et que les marchés ne sont pas toujours attribués aux mêmes. »


47 % des entreprises qui ont travaillé avec des administrations de Midi-Pyrénées seraient de Haute-Garonne et 32 % de la région, affirme l'enquête de Secteur Public. Certaines PME déplorent pourtant l'absence de soutien du tissu économique local par les acheteurs publics. « Impossible, répond catégoriquement Étienne Morin à Toulouse, ce serait un délit de favoritisme ! » Au Medef, Daniel Thebault aimerait que le Small Business Act (3), que l'on tente de mettre en place au niveau européen, inclut un principe de quotas à l'américaine, permettant aux acheteurs publics de confier des marchés aux entreprises de leur territoire. « On ne sait pas encore ce que pourrait contenir ce Small Business Act, précise Jean-Michel Moreau, mais en effet, un des problèmes récurrents est l'impossibilité de faire valoir le critère de proximité d'une entreprise comme critère de choix. »


Incertitudes et prudence

Si certaines PME ou TPE hésitent, d'autres au contraire ont institué une véritable démarche commerciale, marketing et relationnelle à destination des acheteurs publics. Quitte à dédier une personne spécialement à la commande publique. Car les marchés publics sont des leviers de croissance et souvent des stabilisateurs économiques en période de crise pour pallier une faiblesse du secteur privé. Reste le contexte : la crise conjoncturelle mondiale qui va continuer d'affecter le secteur public et mettre les budgets sous tension, un projet de réforme des collectivités territoriales qui laisse les protagonistes plein d'interrogations quant aux transferts de compétences inhérents, une taxe professionnelle en voie de disparition et dont on se demande comment elle sera compensée. Les incertitudes sur les ressources fiscales au-delà de 2011 génèrent de l'inquiétude et, hormis ce que le plan de relance gouvernemental permettra, l'heure n'est pas aux chantiers de grande envergure. « On avance dans un brouillard dense, ça ne favorise pas les projets trop ambitieux. Il faut faire preuve d'une certaine prudence... C'est une situation spéciale et unique dans l'histoire !», conclut Etienne Morin.

L'analyse ne donne qu'une tendance puisqu'elle ne porte que sur une partie des acheteurs publics de la région : un conseil régional, 8 conseils généraux, 36 communes, 8 intercommunalités, 11 établissements hospitaliers, 5 CPAM, 4 offices publics de l'habitat, 2 universités, 2 unités d'achats du ministère de la Défense, Tisséo, VNF, Agence de l'eau.

Cécile Chaigneau


(1) Les chiffres sont basés sur l'analyse des informations publiées par les acheteurs publics dans le cadre de l'article 133 du Code des marchés publics. Ils ne couvrent que les organismes soumis au Code des marchés publics. Ainsi, les achats des établissement publics à caractère industriel et commercial (notamment les chambres consulaires), des entreprises publiques (EDF, SNCF...) et des administrations déconcentrées de l'État (les préfectures par exemple) ne sont pas comptabilisés.


(2) Selon l'Observatoire Économique de l'Achat Public


(3) Loi du Congrès des Etats-Unis votée en 1953 visant à favoriser les PME, et comprenant notamment des dispositions qui leur réservent certains marchés publics.

En savoir plus :
www.secteurpublic.fr

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