Moto Display, le GPS qui va changer la vie des motards

À 24 ans à peine, Romain Duflot, Quentin Salmon et Thomas de Saintignon ont imaginé un système de navigation pour deux-roues utilisant les technologies d'affichage "tête-haute", utilisées notamment dans l’aviation. Leur boîtier, le Moto Display, permet de garder les yeux sur la route et un prototype devrait voir le jour cette année. Rencontre avec trois entrepreneurs en devenir.
Avec le Moto Display, les informations apparaissent directement sur la route : le motard n'a plus à baisser les yeux

Rendez-vous est fixé au Père Léon, en centre-ville de Toulouse. Romain Duflot, Quentin Salmon et Thomas de Saintignon, la vingtaine à peine passée, s'installent timidement sur les chaises de la brasserie. Les trois étudiants n'ont pas l'habitude des médias, et ça se voit. Il faut dire qu'il y a un an à peine, personne dans le monde de l'entreprise ne connaissait les trois garçons. Leur système de navigation Moto Display n'était encore qu'une idée à l'époque. Aujourd'hui, c'est une idée qui vaut cher...

Romain Duflot, Thomas de Saintignon et Quentin Salmon ont imaginé un GPS utilisant une technologie d'affichage dite "tête-haute" à l'attention des deux-roues. Grâce à cette solution innovante, les informations apparaissent au motard directement à hauteur des yeux, grâce à un boitier qui équipe le casque de la réalité augmentée. Ainsi, le motard suit les indications de son GPS sans quitter la route des yeux.

"Notre technologie est plus avancée que nos concurrents et plus prometteuse en termes de technique, que ce soit la distance de l'image ou la taille de l'écran. Le nôtre, par exemple, fait plusieurs mètres quand ceux de nos concurrents font moins d'un mètre", explique Thomas de Saintignon, responsable technique du projet.

Un système de navigation digne d'un avion de chasse

Les informations projetées à même la route ont surtout pour avantage d'être plus sûres. Le conducteur - le motard en l'occurrence - n'a pas à baisser les yeux sur son guidon. Mais le boîtier de Moto Display veut aller plus loin : "On sait que moins de cinq informations aident à la conduite. Au-delà, cela peut être dangereux, explique Romain Duflot. C'est pourquoi nos images ne seront pas projetées n'importe comment." Enfin, un système pour alerter les secours en cas de problème est même prévu dans le boîtier. Mais comment trois étudiants ont-ils réussi à mettre au point une telle technologie ?

C'est en Israël, terre d'innovation, que Romain Duflot a trouvé la technologie nécessaire au concept de Moto Display. Une société qui équipe depuis des années les F16 de l'armée en système de navigation "tête-haute" cherche justement à diversifier ses activités. Elle propose des kits de développement. Une aubaine pour le jeune entrepreneur qui n'hésite pas une seconde.

"Au début, je les ai contactés par mail pour obtenir un kit de développement. Forcément, en me présentant comme étudiant, qui plus est en France, je n'ai pas eu de réponse. J'ai alors décidé d'appeler et, à force de persuasion, j'ai trouvé une oreille attentive", détaille Romain. Sa chance - si l'on peut parler de chance tant le jeune homme a fait preuve d'abnégation - c'est d'être supporté par des personnalités du monde économique. Parmi eux, Anne-Laure Charbonnier, la directrice de l'Incubateur Midi-Pyrénées, mais aussi la multinationale Vidon, mandataire du brevet aujourd'hui.

L'école comme tremplin

Pour comprendre comment Moto Display a vu le jour, il faut remonter près de deux ans en arrière. À l'époque, Romain Duflot effectue des séances d'entraînement en vue de passer son permis moto. Passionné d'aviation, il imagine alors ce GPS inspiré des systèmes de navigation utilisés dans les avions. L'idée fait son chemin et Romain décide d'utiliser son école d'ingénieurs pour peaufiner son projet. Cela tombe bien : l'Icam, l'Institut Catholique des Arts et Métiers, vient de donner six mois à ses étudiants pour mettre en place un projet de création d'entreprise. Moto Display est né.

Quentin Salmon et Thomas de Saintignon font partie du groupe de travail de Romain. Les deux garçons comprennent très vite la portée de l'idée et s'y associent immédiatement. Les professeurs, un peu moins : "On nous disait que l'idée était bonne mais impossible à mettre en place, trop compliquée techniquement", se souvient Thomas, également responsable de l'unité technique. "Le plus dur fut de convaincre une première personne que 'oui, c'est possible'", renchérit Romain Duflot.

Les mois passent et les étudiants décident, envers et contre tous - ou presque -, de présenter leur projet au Crece, le Concours régional des étudiants créateurs d'entreprise. Bingo : Thomas, Romain et Quentin raflent la mise. "Ça nous a ouvert des portes. D'un seul coup, des gens sont venus nous voir, nous ont contactés", explique Quentin.

"on compte sur l'impact de la communauté"

Seul problème pour les trois étudiants : ils sont ingénieurs, pas chefs d'entreprise. Aucun des trois garçons n'a jamais réalisé de business plan. "On a préféré être minimaliste dans nos prévisions. Nous nous sommes donnés comme objectif 1 % du marché global à 5 ans. Et on ne prend pas en compte les trois roues ou les scooters", explique Quentin Salmon, le responsable du plan de financement. Un objectif qui permettrait aux trois Toulousains de réaliser 1,5 M€ de chiffre d'affaires à trois ans, puis 2 à 2,5 M€ cumulés sur trois ans.

Moto Display a tout pourtant pour s'imposer sur le marché. Deux fois moins cher que les GPS de ses concurrents, le boîtier des Toulousains utilise une technologie plus avancée, "plus prometteuse aussi. Et en plus, pas besoin de changer de casque", sourit le chef de projet. Thomas, Quentin et Romain ont choisi de passer par la vente directe pour distribuer leur Moto Display et ils misent sur une stratégie de marketing communautaire viral.

"On compte sur l'impact de la communauté - très fort chez les motards - pour faire connaître Moto Display. On va d'abord passer par un site web, par les réseaux sociaux, les clubs, etc.", précise Romain Duflot. De même, les apprentis-entrepreneurs se concentrent pour l'instant sur le marché français. Une vision en effet "minimaliste" quand on sait que le marché européen - pour lequel les brevets sont déjà déposés - est dix fois supérieur à celui de l'Hexagone.

L'industrialisation comme dernier rempart

Pour financer le projet, les étudiants passeront par des fonds propres - un peu - mais surtout par le crowdfunding, et quelques "business angels". "Notre principal concurrent, Skully, a réussi à lever plus de 2 M€ lors de sa campagne de crowdfunding alors qu'ils n'en demandaient que 250 000", souligne Romain Duflot.

Le plus gros défi pour les trois ingénieurs reste donc la capacité d'industrialisation de la technologie. "Nous savons que nous pouvons le faire. On se donne encore six mois de R&D et, d'ici à un an, on saura si on est prêts, insiste celui qui est à l'origine du projet. Nous savons à quoi il va ressembler, nous avons les codes, les modèles 3D... donc, oui, nous y croyons."

Le 24 mars prochain, Romain, Thomas et Quentin iront à Paris présenter leur projet lors de la finale du Prix La Tribune Jeune Entrepreneur. De quoi faire connaître davantage leur projet et engranger de la confiance.

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Commentaires 6
à écrit le 08/12/2015 à 13:03
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Très intéressant, par contre pourquoi avoir opté pour un dispositif qui bloque intégralement le champ de vision d'un coté et surtout vers la droite ?

à écrit le 03/12/2015 à 19:30
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J'aimerai bien devenir testeur de ce système qui me semble vraiment bien, quand on roule tous les jours

à écrit le 08/05/2015 à 19:32
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Bravo j'espère que cette outil sera très rapidement chez tous nos marchands d'accessoires de motos

à écrit le 19/03/2015 à 10:15
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superbe initiative ! le succes de ce produit dépendra grandement de sa pertinence : LE POIDS ! a mon avis cela sera la clé de la reussite

à écrit le 16/03/2015 à 20:14
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Bravo ! Il faut des jeunes comme vous pour faire avancer la sécurité à moto... j espère que vous trouverez le soutien et l aide dont vous avez besoin.MD

à écrit le 15/03/2015 à 17:43
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Il y a encore et toujours des jeunes qui vont au bout de leurs idées. Notre pays est riche de cette jeunesse active. Faisons-leur confiance !

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