À Toulouse, le CHU mise sur l'intelligence artificielle pour lutter contre le cancer du sein

Le CHU de Toulouse et l’Institut Claudius Regaud vont utiliser des outils d'intelligence artificielle pour créer un atlas décrivant plus précisément les tumeurs du sein. À plus long-terme, cette initiative pourrait aider l'industrie pharmaceutique à personnaliser les traitements des patientes.
Le projet Apriorics vise à utiliser l'intelligence artificielle pour mieux décrire les tumeurs du sein.
Le projet Apriorics vise à utiliser l'intelligence artificielle pour mieux décrire les tumeurs du sein. (Crédits : Reuters)

"Nous sommes confrontés à une frustration quotidienne. Nous étudions des images microscopiques de cancers du sein qui livrent une information biologique très riche mais nous manquons de vocabulaire et d'outils pour les décrire et les quantifier. Et au final, notre compte-rendu est relativement pauvre", fait remarquer Camille Franchet. Ce médecin pathologiste (spécialiste de l'analyse des tissus biologiques) est le coordinateur du projet Apriorics.

Un atlas des cancers du sein

Porté par le CHU de Toulouse, en partenariat avec l'Institut Claudius Regaud (ICR) au sein de l'Institut Universitaire du Cancer de Toulouse Oncopole (IUCT-O), ce projet vise à utiliser l'intelligence artificielle pour mieux décrire les tumeurs du sein.

"Nous allons créer un atlas de toutes les composantes universelles des tumeurs du sein. Il faut imaginer qu'une lame microscopique a une résolution de plus d'un milliard de pixels avec plus d'un million de cellules tumorales. Il n'est pas envisageable d'annoter à la main une telle image pour identifier les noyaux d'une tumeur. Nous avons conçu un outil d'annotation automatique afin d'identifier des briques élémentaires des tissus tumoraux comme les noyaux des cellules, les cellules de défense de l'organisme, les vaisseaux, etc", poursuit le Dr Camille Franchet.

En regardant la photo d'une maison, votre cerveau est capable d'identifier le toit, les volets, etc. Une machine de reconnaissance d'images va devoir s'entraîner pour identifier un toit. De la même manière, si en regardant au microscope je suis capable d'identifier des vaisseaux ou des cellules, une machine ne verra que des pixels. L'atlas servira à entraîner l'intelligence artificielle et que les réseaux de neurones artificiels comprennent notre langage".

Chaque année, environ 1 500 femmes sont traitées à l'IUCT-O pour un cancer du sein, le cancer le plus fréquent en France. Le projet Apriorics prévoit d'entraîner les algorithmes d'intelligence artificielle à partir d'images macroscopiques de 1 000 patientes. L'atlas devrait être au point d'ici fin 2021.

Grâce à l'IA, les médecins pensent obtenir de nouvelles données sur les cancers du sein comme la densité des noyaux, leur taille et leur forme. Surtout, la méthode pourrait être reproduite à tous les types de cancers. "Entre un pancréas, un cerveau et un sein, les tissus ne se ressemblent pas. Mais les noyaux des cellules sont universels et cette donnée sera acquise par la machine. À l'échelle cellulaire, il est très probable que le passage d'un organe à l'autre soit très simple", souligne Camille Franchet.

Des traitements anticancéreux plus personnalisés

Dans cette optique, les porteurs du projet prévoient non seulement de publier les résultats du projet dans des revues scientifiques mais surtout de livrer en open source la majeure partie des algorithmes d'intelligence artificielle. À plus long-terme, l'atlas réalisé par Apriorics pourrait être utilisé par l'industrie pharmaceutique pour mieux cibler les traitements des patientes souffrant d'un cancer du sein.

"Quand une industrie pharmaceutique développe un médicament, notamment un traitement anti-cancéreux, il est important de trier les patients. Des biomarqueurs sont utilisés à partir du séquençage de l'ADN des tumeurs. Il est possible d'imaginer la même chose au niveau morphologique à partir des données du projet Apriorics. De même, tout le monde parle de l'immunothérapie. Mais il est difficile de cibler les patientes qui vont répondre au traitement. Or, si un traitement n'est pas efficace et ne comporte que des effets secondaires, c'est un problème. L'idée est de trier les patients pour des traitements plus ciblés. C'est l'objectif de la médecine personnalisée", développe Camille Franchet.

Le projet Apriorics a été lauréat de l'appel à projet de Health Data Hub, la plateforme publique qui doit centraliser des données de santé françaises à des fins de recherche. Les chercheurs vont bénéficier d'une aide de 300 000 euros (sur un budget total de 1,2 million d'euros).

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