C'est un crash qui a marqué les esprits. En 1994, un ATR 72 s'écrase dans la région des Grands Lacs aux États-Unis. En cause, un givre trop important qui mène au décrochage de l'avion.

"Le givre pose un enjeu de sécurité. À travers l'histoire de l'aviation, le nombre d'accidents liés à des problèmes de givrage est très important", rappelle Bruno Sainjon, PDG de l'Onera.

Le 15 mars, le centre français de recherche aérospatiale a célébré sur son site toulousain la pose de la première pierre d'une soufflerie givrante qui sera opérationnelle en 2020. Coût de l'opération : trois millions d'euros, dont 500 000 euros financés par la DGAC, le restant par l'Onera.

Une soufflerie de 16 mètres de haut

La soufflerie permettra de réaliser un écoulement d'air froid à grande vitesse chargé de gouttes afin de simuler les conditions opératoires d'un avion en vol. Cet équipement de 16 mètres de haut, sera capable de recréer des conditions météorologiques que peut rencontrer un aéronef jusqu'à 11 000 mètres d'altitude. La soufflerie pourra par exemple simuler une température de l'air jusqu'à - 40°C et l'arrivée de gouttes sur la paroi d'un avion à une vitesse pouvant atteindre 150 mètres par seconde, etc. Il est aussi possible d'injecter un brouillard dans l'équipement.

Modélisation de la future soufflerie./ (Crédits : Onera)

"La soufflerie doit permettre d'améliorer la compréhension des phénomènes physiques, d'acquérir des données pour l'amélioration de certains modèles (détachement de la glace, formation des cristaux) mais aussi de développer de nouvelles techniques de mesure. Par exemple, actuellement on est incapable de savoir la température d'une goutte d'eau en vol", décrit Pierre Berthoumieu, le chef de projet au sein de centre de recherches.

Un sujet de préoccupation mondial

L'Onera est un pionnier dans l'étude du givre. Ses experts ont travaillé sur la première soufflerie givrante française installée dès 1948 sur le Mont Lachau dans les Alpes. Dans les années 70, les équipes ont mené des essais sur le Concorde.

"À l'époque, on pensait qu'il n'y avait que des petites gouttes d'eau dans l'atmosphère, avance Pierre Berthoumieu. Mais lors du crash de l'ATR en 1994, c'est l'arrivée de grosses gouttes à une vitesse élevée qui a provoqué un givrage de l'appareil en un temps record".

La future soufflerie toulousaine a justement vocation à se spécialiser dans l'impact de ces grosses gouttes en altitude. Actuellement, une dizaine de personnes travaillent au sein de l'Onera à Toulouse sur ces études de givre. Le centre de recherche a également noué des collaborations sur le sujet avec la Nasa (projet Sunset) et dans le cadre de programmes européens (Ice-Genesis, Music-Haic). Des partenariats qui ont donc l'ambition d'améliorer la sécurité du trafic aérien à terme.