À quand un vol Toulouse-Paris sans pilote à bord ?

Avec l'émergence de taxis aériens autonomes et l'automatisation accrue des systèmes de pilotage, va-t-on bientôt voir voler des avions commerciaux sans pilote à bord ? Plusieurs études notamment de la Nasa sont menées actuellement pour répondre à cette question. Selon l'Académie de l'air et de l'espace qui tenait il y a quelques jours une conférence à Toulouse sur ce thème, il faudra beaucoup d'étapes avant d'y parvenir tout en faisant baisser le nombre d'accidents.
Va-t-on bientôt voir voler dans le ciel toulousain des avions commerciaux sans pilote à bord ?
Va-t-on bientôt voir voler dans le ciel toulousain des avions commerciaux sans pilote à bord ? (Crédits : Rémi Benoit)

Le marché des taxis aériens autonomes est en pleine ébullition. En février dernier, le Chinois Ehang a posté une vidéo d'un premier vol sans pilote  avec un passager à bord. Quelques jours auparavant, Airbus avait publié une photo de son premier essai à cinq mètres du sol avec son prototype Vahana en Californie. Sans compter le Toulousain Eva qui planche depuis Francazal sur un engin autonome capable de transporter deux personnes. Ces avancées technologiques sont-elles transposables dans l'aviation commerciale ?

Dès 2010, le PDG de Ryanair : "Abandonnons le 2e pilote"

Au cours de l'histoire, les compagnies aériennes ont progressivement diminué l'effectif à bord. Dans les années 50, l'équipage était composé de cinq personnes : le pilote, le copilote, l'ingénieur de vol, l'opérateur radio et le navigateur. Avec les progrès technologiques et l'automatisation d'une grande partie des systèmes, l'effectif a été allégé et aujourd'hui ne subsistent que le pilote et le copilote. La prochaine étape logique serait donc de passer à un seul pilote. Dès 2010, le PDG de Ryanair, Michael O'Leary, lançait : "Abandonnons le deuxième pilote. Laissons l'ordinateur faire voler l'avion". Ces propos ont déclenché une avalanche de critiques et le dirigeant n'a plus évoqué par la suite cette option.

Boeing planche sur des vols sans pilote grâce à l'IA

Plus récemment, au salon du Bourget en juin 2017 le géant américain Boeing a annoncé vouloir lancer dès cette année un vol d'essai sans pilote. Le constructeur a mis en place un simulateur de pilotage basé sur l'intelligence artificielle alimenté par un historique de 600 millions de vols afin de pouvoir réagir suivant n'importe quel type d'incident. Malgré l'impressionnante diminution du nombre de crashs (en 2017, on a recensé seulement un accident mortel pour 7,360 millions de vols), l'humain reste à l'origine de la moitié des accidents aériens. En théorie, une machine pourrait renforcer la sécurité dans le ciel. L'automatisation représenterait également des gains colossaux pour les compagnies aériennes. Selon une étude menée par la banque suisse UBS, le secteur pourrait réaliser 30 milliards d'euros d'économie principalement sur l'effectif pilote et leur formation.

"Il faudra beaucoup d'étapes avant d'y parvenir"

Mais persistent encore de nombreux freins : "Il faudra beaucoup d'étapes avant d'y parvenir et d'ici 2050 il semble irréaliste de voir voler des avions sans pilote", a estimé Alain Garcia, l'ancien directeur technique d'Airbus à l'occasion d'une conférence organisée à Toulouse par l'Académie de l'air et de l'espace. L'association a mené une enquête en interrogeant les industriels (Airbus, Thales) et les laboratoires comme l'Onera pour évaluer les perspectives de l'automatisation.

"La réduction du nombre de pilotes à bord ne pourra avoir lieu que lorsque l'on se sera assuré d'une probabilité d'accidents suffisamment faible. Cela prendra du temps. Jusqu'en 2050, on devrait maintenir au moins un pilote à bord des avions et on devra passer par une assistance au sol pour diminuer l'effectif", avance-t-il.

C'est en effet l'option étudiée depuis plusieurs années par la Nasa. Les chercheurs ont d'abord fait un test en mettant le pilote et le copilote dans des pièces séparées du simulateur. Ils pouvaient communiquer par un casque équipé d'un micro mais sans vision globale du tableau de bord, le pilotage s'est révélé peu aisé. Dans un second temps, des tests ont été réalisés en équipant cette fois les deux pièces de caméras pour que pilote et copilote voient l'ensemble des signaux lumineux.

"Une première étape pourrait être que le pilote au sol soit en mesure de surveiller 10 à 20 vols en même temps. Cela nécessite de former le personnel pour qu'il puisse reprendre le contrôle de l'avion de manière très rapide et efficace en cas de défaillance du pilote à bord (en cas de malaise par exemple, ndlr)", imagine Alain Garcia.

Un seul pilote possible à terme sur des vols courts-courriers comme Toulouse-Paris

D'un point de vue technique, le recours à un seul pilote serait plus facile dans un premier temps sur les courts-courriers. "Un vol Toulouse-Paris avec un seul pilote, à terme pourquoi pas ? Il existe de nombreux aéroports où l'avion peut être détourné pour atterrir en cas de défaillance sur le trajet : Poitiers, Agen...", décrit l'ancien dirigeant d'Airbus.

Au-delà de ces freins techniques, il faudra adapter la règlementation aérienne mais surtout convaincre les passagers. Un sondage mené sur 8000 personnes à l'occasion de l'étude UBS a montré que 54% des personnes interrogées refuseraient de monter dans un avion sans pilote, seuls 17% seraient favorables à cette idée.

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