De l'intelligence artificielle au service de la santé : qu'en pensent les Toulousains ?

À l'occasion des États généraux de la bioéthique organisés dans toute la France jusqu'à fin avril, un débat citoyen sur le rôle des nouvelles technologies dans le secteur de la santé s'est tenu le 4 avril dernier à Toulouse. Intelligence artificielle, big data, robots, télésurveillance envahissent petit à petit la médecine. Mais malgré les avancées promises par les inventeurs de ces nouveaux outils, beaucoup s'interrogent sur la sécurisation des données des patients et le risque de créer une médecine à deux vitesses entre les grandes métropoles et les zones rurales.
Quel rôle doivent avoir les robots dans la médecine ?
Quel rôle doivent avoir les robots dans la médecine ? (Crédits : Reuters)

Sur l'image projetée à l'écran, on voit une personne âgée portant dans ses bras un bébé phoque. Il ne s'agit pas d'une peluche mais de Paro, un robot équipé de sept moteurs qui lui permettent de cligner des yeux et de reproduire le son d'un véritable phoque. L'animal a été adopté par une centaine d'Ehpad (établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) en France avec pour vocation de créer une stimulation cognitive pour les personnes atteintes de troubles du comportement et de la communication.

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 (Crédit : Phoque Paro).

Le robot Paro est l'un des exemples montrés aux participants du débat organisé dans l'amphithéâtre du Museum de Toulouse le 4 avril dernier à l'occasion des États généraux de la bioéthique. Depuis début janvier et jusqu'à fin avril des centaines de rencontres de ce type se tiennent partout en France pour sonder la population avant une révision de la loi bioéthique prévue en fin d'année. À Toulouse, ce soir-là il est question du rôle des nouvelles technologies dans la santé : intelligence artificielle, big data, robots, télésurveillance... Une centaine de personnes a répondu présent parmi lesquels on trouve des étudiants, des médecins, des personnes handicapées,  des retraités....

"Le risque est de réduire le soin à une technique médicale"

Concernant le robot phoque, la salle est assez sceptique. "En quoi une peluche peut améliorer le quotidien des personnes en Ehpad, franchement ?", lance une Toulousaine. Un autre participant complète : "Le risque avec ces systèmes est de réduire le soin à une technique médicale alors que c'est avant tout une relation humaine".

Un médecin intervient pour témoigner "de la pression économique croissante de la part de startups" pour tester ce type de technologies. "On est très sollicités mais quand on voit ce bébé phoque on peut s'interroger : à quel besoin de santé réel répond-il ?". Il alerte aussi sur le devenir des informations médicales. "J'ai échangé avec un responsable d'Orange qui a expliqué que les entreprises ont déjà accès à toutes les données de santé mais pour l'instant ces dernières sont anonymisées. Les sociétés veulent que les professionnels de santé leur donnent accès aux données des patients pour avoir de la matière première afin de tester leurs innovations".

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(Crédit: Rémi Benoit)

Quel impact dans les déserts médicaux ?

 Plus nuancé, un médecin à la retraite avance que "dans l'histoire de la médecine, le progrès a toujours fait peur": "Si on avait organisé une consultation citoyenne à chaque fois qu'il fallait adopter une nouvelle technologie, on aurait jamais pu avancer. Il faut dépasser cette crainte pour voir quels usages nous voulons pour l'intelligence artificielle et ceux que nous refusons et surtout comment la loi peut intervenir".

Du côté des usages positifs, un docteur souligne que "les études de médecine permettent d'avoir une vision globale des maladies mais nous restons tout nu face à la singularité d'un patient. L'intelligence artificielle pourrait nous aider à diagnostiquer plus vite. On peut rêver : ces gains de temps laisseraient plus de place pour la relation humaine avec les patients plutôt que vouloir encore réduire les coûts".

Venu de l'Aveyron, un participant espère aussi : "Rodez se situe à 2h30 de Toulouse. La télémédecine pourrait être une solution pour avoir accès plus facilement à des consultations de spécialistes". Dans la salle, un autre citoyen n'est pas de cet avis : "On risque de créer un système à deux vitesses : si l'on habite en ville, on peut facilement voir un médecin en face-à-face alors que les zones rurales n'auraient accès qu'à des consultations par ordinateur. "

Les débats dans le cadre des États généraux de la bioéthique vont se poursuivre jusqu'à la fin du mois. Ensuite courant juin, une synthèse des échanges sera transmise par le Conseil consultatif national d'éthique à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), un organe d'information commun à l'Assemblée nationale et au Sénat. En fin d'année, le gouvernement doit présenter son projet de révision de la dernière loi bioéthique française datant de 2011.

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