Le Cnes veut développer le "covoiturage" spatial

Confronté à la montée en puissance de nouveaux acteurs privés à l'image de SpaceX ou Rocketlab, le Cnes a présenté à Toulouse ce jeudi 25 janvier sa feuille de route en matière de lanceurs. L'Europe va proposer aux petits satellites conçus par des startups d'embarquer sur le futur lanceur Ariane 6 et pourrait coacher les jeunes sociétés qui innovent en matière de microlanceurs.
Le Cnes pourrait dans les années à venir mettre à disposition la base de Kourou pour les petits satellites conçus par des sociétés privées.
Le Cnes pourrait dans les années à venir mettre à disposition la base de Kourou pour les petits satellites conçus par des sociétés privées. (Crédits : POOL New)

Il sera peut-être un jour aussi simple de prendre une place pour son satellite sur Ariane 6 que de réserver un hôtel sur Booking ou Airbn'b. Face à l'arrivée de nouveaux acteurs dans l'industrie spatiale, le Cnes et l'Agence spatiale européenne veulent proposer de nouveaux services pour se mettre à l'heure du NewSpace.

"Avec l'initiative ESA L3, à partir de 2020, il sera possible pour un acteur privé de partager un lancement avec un satellite européen depuis Ariane 6 (le lanceur qui succèdera à Ariane 5 en 2020) ou Vega (lanceur européen pour les satellites légers, ndlr). Comme sur Booking, vous pourrez réserver une place pour votre satellite avec une échéance de lancement garantie. On pourra vous dire par exemple 'dans un an votre satellite pourra être lancé'", a expliqué ce jeudi 25 janvier Jérôme Vila, directeur des lanceurs au Cnes, à l'occasion de la journée de l'innovation du centre national d'études spatiales.

 Cette forme de "covoiturage" spatial pourrait permettre aux nouveaux entrants sur le marché des petits satellites de réaliser des lancements à moindre coût. "Il y a une dynamique exponentielle autour des petits satellites. Les facilités actuelles pour trouver des investisseurs privés aiguisent les appétits de sociétés privées qui se lancent sur ce marché", rappelle Jérôme Vila. Mais ces startups, contrairement aux grandes agences spatiales, ne disposent pas de base de lancement. Trois options s'offrent à elles aujourd'hui :  soit elles choisissent de construire leur propre base de lancement, ce qui représente un investissement en millions d'euros (ce qu'a fait par exemple la jeune société Rocketlab), soit elles se greffent à un tir groupé d'autres petits satellites, soit elles optent pour le covoiturage spatial en étant lancé en même temps qu'un gros satellite.

Le Cnes et l'Esa sur les traces de Spaceflight

Depuis quelques années, l'entreprise américaine Spaceflight Industries est devenue un spécialiste de la réservation pour un covoiturage spatial. Sur son site figure la liste des prochains lancement prévus, le type de satellites qui peuvent embarquer ainsi que le prix à payer pour intégrer le lancement suivant le poids du satellite.

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Lancements prévus listés sur Spaceflight.

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Grille des prix de lancement suivant la taille du satellite sur Spaceflight.

D'ailleurs, lors de sa présentation, le directeur du Cnes reprend cette grille de prix de Spaceflight pour présenter l'initiative Esa L3 qui permettra aux acteurs privés d'embarquer à bord d'Ariane 6. "Ces prix paraissent raisonnables. On peut imaginer un coût de lancement de quelques centaines de milliers d'euros pour les plus petits satellites et 4 à 5 millions pour un satellite de 200 kg", avance-t-il.

Les startups du spatial pourront bientôt décoller de Kourou

Au-delà du lancement, cette nouvelle offre pourrait être complétée par d'autres services d'accompagnement des acteurs privés sur les traces là aussi de Spaceflight (dont le slogan est "Nous vous trouvons un lancement, nous pilotons votre mission et nous intégrons votre satellite").

Si le Cnes n'a pas de projet pour fabriquer des microlanceurs dédiés aux petits satellites, il pourrait selon Jérôme Vila "accompagner ces initiatives privées, les coacher, partager des investissements technologiques et mettre à disposition la base de lancement de Kourou en Guyane". Le directeur en profite pour mettre en garde les jeunes sociétés face aux prix dérisoires proposés par certains nouveaux acteurs pour des lancements de petits satellites : "Même si le satellite pesait zéro kilo, le lancement coûterait toujours entre 3 et 5 millions d'euros. N'hésitez pas à venir nous voir, on vous dira quel acteur est sérieux ou non".

Par ailleurs, alors que la société d'Elon Musk SpaceX fait le show avec ses lanceurs réutilisables, le Cnes commence à son tour à plancher sur cette technologie via le projet Callisto. "Il s'agit d'un véhicule d'apprentissage pour réutiliser le premier étage du lanceur. L'objectif de cette démarche est d'expérimenter ce qui fait défaut à l'Europe en matière de réutilisation de lanceurs", décrit Jérôme Vila. D'ici 2020, le Cnes pourrait faire voler Callisto depuis Kourou : "Il y a là à la fois un enjeu en termes d'image mais aussi au niveau de la sécurité puisque le lanceur devrait réatterrir au même endroit sur la base de lancement".

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