En images : l'ambitieux projet de micro-ferme bio et autonome des soeurs de l'abbaye de Boulaur

Dans le Gers, les soeurs de l'abbaye de Boulaur portent un projet à 4 millions d'euros pour construire une grange avec un élevage bovin, une fromagerie, une charcuterie, des espaces pédagogiques ainsi qu'un magasin de vente directe. Adeptes de la permaculture et du bio, elles veulent décupler la production pour nourrir leur communauté grandissante et espèrent contribuer à valoriser un joyau du patrimoine.
Les soeurs veulent augmenter la production agricole pour nourrir leur communauté grandissante et vivre du travail de la terre.
Les soeurs veulent augmenter la production agricole pour nourrir leur communauté grandissante et vivre du travail de la terre. (Crédits : Rémi Benoit)

"La terre est pour nous un don de Dieu que nous devons protéger", lance Soeur Anne. La religieuse est l'une des 32 femmes qui vivent actuellement dans l'abbaye de Boulaur, en plein coeur du Gers. Elles appartiennent à l'ordre cistercien, qui prône le travail de la terre et la quête d'une certaine sobriété. Autour de l'abbaye, construite en 1142, s'étire sur 1,5 hectare un jardin potager en permaculture.

Les religieuses formées à la permaculture

abbaye de boulaur

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Les soeurs se sont converties depuis quelques années à la permaculture (Crédits : Rémi Benoit).

"Ici, vous avez les tomates. Au pied des tomates, vous avez les blettes. Juste à côté des blettes, un plant de basilic. Les cultures se bonifient entre elles. Celles qui ont des racines profondes vont aérer le sol pour celles qui ont une racine superficielle. Certaines vont repousser les insectes qui nuisent aux autres. Cela permet aussi de limiter l'espace du jardin puisque les cultures sont beaucoup plus concentrées", décrit Soeur Anne.

À quelques mètres d'elle, Soeur Charlotte est à l'ouvrage et récolte d'énormes concombres. "Nous avons testé des associations de légumes qui vont s'entraider mutuellement. Le basilic aide à repousser les pucerons quand on le plante avec les tomates. La menthe permet de lutter contre les altises qui s'attaquent aux choux ou les radis", explique-t-elle.

Toutes ces connaissances, les religieuses les ont acquises en se formant. "Nous sommes parties au Bec Helloin, une ferme en Normandie référente pour la permaculture ainsi qu'auprès d'un monastère orthodoxe de religieuses à la pointe de l'écologie qui nous ont données de précieux conseils en particulier pour la traitement des maladies avec les huiles essentielles", renseigne Soeur Anne.

Un produit phare : la confiture de cornouille

Avec les fruits du jardin, les religieuses réalisent des confitures. "Notre produit phare, c'est la cornouille, un petit fruit rouge", glisse-t-elle.

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Le produit phare de l'abbaye est la confiture de cornouille, un fruit rouge au goût acidulé (Crédits : Rémi Benoit).

Les soeurs élèvent également six cochons par an pour produire du pâté et utilisent le lait des vaches pour fabriquer une tomme des Pyrénées. Sur les 45 hectares de terres agricoles autour de l'abbaye poussent de l'herbe pour nourrir les vaches mais aussi des céréales pour fabriquer diverses farines. Depuis peu, la communauté religieuse s'est initiée aux légumineuses.

Cette riche production en bio sert à nourrir les soeurs mais aussi les visiteurs hébergés dans l'hôtellerie monastique (une vingtaine de chambres, l'été avec le camping l'abbaye peut accueillir jusqu'à 80 personnes).

Problème : l'abbaye de Boulaur est victime de son succès. Outre les visiteurs, le monument attire de plus en plus de vocations. "Sept jeunes filles nous ont rejoints cette année, ce qui est énorme. Nous sommes une communauté très dynamique mais aujourd'hui nous n'arrivons plus à produire assez pour nous nourrir et vivre de notre travail. Il faut savoir que contrairement à certaines idées reçues, nous n'avons aucune aide de l'Eglise ou du Vatican", avance Soeur Anne.

abbaye de boulaur

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L'abbaye est victime de son succès (Crédits : Rémi Benoit).

 Fromagerie et séchage en grange

D'où l'idée de décupler la production en construisant une micro-ferme bio.

"Le chiffre d'affaires actuel de notre exploitation agricole est d'environ 100 000 euros. L'objectif est de le multiplier par quatre. Nous voulons notamment augmenter la production de pâté d'une à cinq tonnes par an. Pour le fromage, nous voulons passer de 2,5 à 15 tonnes. Par ailleurs, la réalisation de farine, qui est une activité de niche pour nous ( 500 kg  sur une année), sera multipliée par quatre", ambitionne Soeur Anne qui était présente à l'événement The Village organisé par la Tribune pour présenter son projet.

 La première tranche de travaux prévoit la construction d'une grange qui hébergera 30 vaches laitières, un local pour faire de la farine ainsi qu'une galerie pour les visiteurs. Le bâtiment servira aussi à expérimenter un système écologique pour le fourrage grâce au séchage en grange.

"Le foin est fauché dans les champs avant qu'il ne soit sec. Cela permet de limiter les passages de tracteurs dans le champ mais surtout de garantir la qualité du fourrage car le soleil grille les vitamines et les oméga-3. Ce système permet d'économiser les énergies fossiles et d'avoir une qualité de nourriture pour les vaches. Le fromage est riche en oméga 3 sans ajout supplémentaire. Les vaches sont en meilleure santé aussi.

Aujourd'hui, on entend beaucoup que le lait de vache est indigeste. Pourtant, pendant plusieurs millénaires, la population en a consommé. Si les vaches sont nourries avec du maïs fermenté, au bout d'un moment elles souffrent d'une cirrhose du foie et cela se ressent sur le fromage", plaide Soeur Anne.

À côté de la grange, des ateliers accueilleront une fromagerie, une charcuterie, un espace pour produire les confitures et stocker les légumes.

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 Une grange et des ateliers sont en construction à proximité de l'abbaye (Crédits : Rémi Benoit).

Les travaux pour cette première tranche ont commencé au printemps. La livraison de la grange est prévue pour Noël et les ateliers seront inaugurés d'ici l'été prochain.

La deuxième tranche du projet prévoit la construction à l'entrée du village d'un espace d'accueil avec un magasin, un grand préau d'expositions et un hall d'accueil pour les visites. Ce volet du projet devrait commencer à sortir de terre à partir de Noël pour une livraison mi-2022. "C'est un chantier plus long car nous allons faire de l'éco-construction. Le bâtiment sera en paille avec des toilettes sèches, un poêle de masse, etc", indique Soeur Anne.

Un projet ambitieux mais aussi très coûteux. La proximité avec l'abbaye, classée parmi les monuments historiques, a fait grimper la facture des travaux. La première tranche est évaluée à trois millions d'euros et la deuxième à 1,5 million. Pour respecter l'architecture de l'abbaye, les nouveaux bâtiments seront construits avec des briques en terre crue. Cet été, plus de 400 volontaires ont participé au chantier participatif lancé par les soeurs pour fabriquer ces briques.

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Un chantier participatif a permis de fabriquer les briques en terre crue de la future grange (Crédits : Rémi Benoit).

Pour financer le premier volet, les soeurs déjà réussi à réunir une grande partie des fonds. "Nous avons récolté 300 000 euros auprès de l'Etat, 250 000 euros via la région Occitanie et 100 000 euros de l'Europe. Ensuite, nous disposons de 400 000 euros de fonds propres et nous prévoyons un emprunt bancaire important", détaille la religieuse.

Surtout, les soeurs ont récolté 400 000 euros de dons via une vidéo de présentation du projet qui a fait le buzz au début de l'année. Une nouvelle campagne de financement participatif est prévue à l'automne pour atteindre le million d'euros de dons. Concernant la deuxième tranche, l'Etat et la région souhaitent également soutenir le projet.

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Commentaires 3
à écrit le 14/09/2020 à 18:42
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les produits des cures et des nonnes sont chers, mais souvent de bonne qualite faut esperer qu'ils ne tartinnent pas trop les prix, sinon le marche va etre ridiculement petit

à écrit le 12/09/2020 à 10:59
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Plus intéressant et enrichissant que de prier c'est sûr.

à écrit le 11/09/2020 à 14:53
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