"L'objectif est d'être en-dessous de deux euros le kilowatt d'hydrogène vert pour ne pas dépasser un coût de production de 40 euros le mégawatt à terme", lance Florence Lambert, la nouvelle PDG de Genvia. Pour cela, la mission de cette joint-venture émergente sera de fabriquer des électrolyseurs haute température à oxyde solide, technologie mise au point par le CEA de Grenoble.
"Je suis convaincue que l'hydrogène sera un élément clé de la transition écologique. Mais cela sera possible si, et seulement si, nous arrivons à produire cette molécule en très grande quantité. Genvia vise donc la maturation industrielle de cet électrolyseur à haute température, qui regroupe plus de 40 brevets", commente la dirigeante.
Et ce chantier d'importance se déroulera à Béziers (Hérault), sur le site industriel de Cameron, filiale du groupe Schlumberger. L'usine, historiquement spécialisée dans la fabrication d'équipements pour l'industrie pétrolière, a reçu les premiers modules de la ligne de fabrication pilote. Les partenaires de ce projet industriel ont ainsi inauguré la nouvelle activité du site, mardi 30 mars.
"La première ligne pilote de fabrication sera prête en juillet, de manière à commencer à produire en pré-série les premiers modules, mais aussi à former les personnels et à travailler sur les fenêtres de procédés. En 2022, nous augmenterons la cadence pour faire les premiers systèmes complets. Et l'objectif est de produire plusieurs démonstrateurs de 300 KW en 2023 et des électrolyseurs d'une capacité de plusieurs mégawatts en 2024. Notre objectif est d'atteindre la fabrication d'électrolyseurs d'une capacité d'au moins 1 GW en 2030", a même détaillé la dirigeante, dans une récente interview accordée à La Tribune.
Un démonstrateur, avant une gigafactory ?
Sans surprise donc, cette joint-venture a, depuis sa naissance au 1er mars, deux actionnaires majoritaires qui sont le CEA de Grenoble, détenteur de la technologie, et le groupe Schlumberger qui doit "apporter son expérience en matière d'industrialisation de nouvelles technologies", selon les propos de ce second actionnaire. En apportant 3,5 millions d'euros, le conseil régional d'Occitanie est le troisième actionnaire de Genvia et détient désormais 6,5% du capital. Par ailleurs, l'État, dans le cadre de France Relance et sa partie dédiée au développement d'une filière hydrogène, apporte une subvention de 2,5 millions d'euros pour ce projet industriel.
Sans vouloir en donner le chiffre précis, le capital de la nouvelle entité est de "quelques dizaines de millions d'euros", selon Florence Lambert. "Nous avons de quoi avancer sur les prochaines années, jusqu'à la décision de la gigafactory", poursuit-elle. En clair, sur la base des résultats de la ligne pilote et des projets de démonstration envisagés, il sera acté (ou non) l'investissement dans la construction d'une gigafactory à Béziers, dès 2025, pour la production de ces électrolyseurs haute température à oxyde solide, mais aussi de piles à combustible.
Si cette montée des cadences de production par les investissements est actée, l'objectif avec la vente de ces systèmes de puissance est de donner accès le plus possible à la technologie aux acteurs français et européens, selon le consortium d'actionnaires. "Genvia devra être en lien permanent avec des intégrateurs pour que le projet soit une réussite", prévient la PDG. Une prise de position qui justifie la présence dans le capital du groupe Vinci, qui va travailler sur les applications dans la mobilité, ou encore celle du groupe Vicat, le producteur de matériaux (ciment, béton, granulats) engagé sur une trajectoire de neutralité carbone d'ici 2050.
"Le premier projet dans lequel Genvia sera impliquée en Occitanie concernera le projet Hyd'Occ, du nom de la société de projet portée par le producteur d'énergies renouvelables Qair et l'Arec Occitanie. Ce projet consiste à construire une usine de production d'hydrogène vert à Port-La-Nouvelle dès 2023, qui répondra à terme à 21% des besoins en hydrogène de l'Occitanie", annonce Carole Delga, la présidente du conseil régional, aux côtés de Florence Lambert pour l'inauguration.
Bientôt un centre de formation dédié à l'hydrogène
Néanmoins, le développement de ces applications sera conditionné à l'émergence des compétences nécessaires sur le site de Béziers pour accompagner la maturation industrielle de cette technologie. Pour le moment, 40 personnes de Cameron vont se consacrer au développement de Genvia, tout sauf un hasard. De par ses activités, le site biterrois dispose déjà de compétences en matière de mécanique, chaudronnerie et de métallurgie. Des talents nécessaires au développement de ces électrolyseurs mis au point par le CEA de Grenoble, mais pas suffisantes pour assurer le bon développement de cette nouvelle activité. Le conseil régional d'Occitanie prévoit donc l'ouverture d'un centre de formation dédié à l'hydrogène sur le territoire de Béziers.
"Nous travaillons avec l'État sur l'élaboration du futur Contrat de plan État-Région (CPER) qui comprendra en partie le financement d'un centre de formation spécifique sur cette industrie. Ce centre proposera des formations diplomates initiales, mais aussi pour les demandeurs d'emploi, ou en continu, pour les salariés qui souhaitent se doter de nouvelles compétences", fait savoir Carole Delga.
Sans attendre ce centre de formation, espéré pour 2022, le groupe Cameron a lancé un important plan de formation en interne pour ses salariés qui vont désormais travailler sous la direction de Genvia. Si la gigafactory dédiée à ces électrolyseurs voit le jour, pas moins de 500 emplois directs nouveaux sont attendus à Béziers. Les besoins de formation sont donc importants.
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