
Les menstruations font partie intégrante de la vie des femmes. En moyenne, celles-ci ont leurs règles durant environ 40 ans, environ cinq jours par mois, soit près de 2 400 jours au cours de leur vie, ce qui représente six ans et demi. Le liquide menstruel se retrouve en général sur une serviette ou dans un tampon qui finissent à la poubelle après une brève utilisation.
Or les serviettes contiennent généralement du plastique, de la base étanche aux produits synthétiques qui absorbent le fluide ainsi que dans l'emballage. Les tampons eux, sont emballés et encapsulés dans des applicateurs en plastique, avec des ficelles à leur extrémité. Certains modèles incluent même une fine pellicule de plastique dans la partie absorbante. Au mois de février 2019, l'association 60 Millions de Consommateurs avait déploré la présence de résidus de glyphosate et de phtalates dans ces produits.
À Tarbes, Armelle Dhainaut, créatrice d'accessoires zéro déchet, a décidé de confectionner des serviettes hygiéniques réutilisables. Ces serviettes en tissu lavables, de la même forme et taille que des serviettes industrielles classiques, sont fabriquées et assemblées à la main. Les tissus utilisés sont bio et ne contiennent pas de produits nocifs pour l'environnement et la santé.
"J'utilise un tissu à motifs en coton imperméable, directement en contact avec la peau, auquel viennent s'ajouter un lange absorbant en éponge de coton et un tissu en micro éponge de coton. J'assemble les différentes parties et renforce les bords à la machine à coudre afin que la serviette tienne le plus longtemps possible", décrit la créatrice.
Des produits adaptés à tous les cas
Des boutons à pression semblables à ceux que l'on trouve sur les vêtements pour bébés sont placés sur les ailettes de la serviette afin de l'accrocher au sous-vêtement. Pour l'entretien, Armelle Dhainaut conseille de les laver à l'eau froide et au savon de Marseille. Afin de répondre aux différents attentes de chacune, elle propose deux modèles, un pour flux normaux et un plus grand pour la nuit et les flux abondants.
"Par exemple, des mamans qui craignent les cycles qui suivent l'accouchement me demandent des versions pour flux très abondants et dans ce cas, je les adapte ", précise-t-elle.
Avant de mettre en vente ses créations, elle et ses proches ont testé le produit durant de nombreux mois "afin de s'assurer de son efficacité".
Un amortissement rapide
Le prix de vente est fixé à 13 euros pour les serviettes flux normaux et 19 euros pour les protections de nuit sur le site "Le Fil d'Armelle". Elles sont également disponibles dans différentes marketplaces et boutiques de créateurs à Tarbes, Bagnères-de-Bigorre, Pau et Toulouse. Depuis la mise en vente au mois de novembre 2018, 200 serviettes ont été écoulées. Étant donné que le produit a une durée de vie assez longue, sa créatrice compte "sur la nouvelle clientèle pour agrandir son activité".
"Le prix est amorti en à peu près quatre mois. Elles sont durables donc trois, quatre serviettes sont largement suffisantes. Par exemple, j'utilise encore celles faites il y a deux ans et elles sont intactes et toujours aussi efficaces", assure-t-elle.
En plus de la composition saine du produit, le prix est également un argument de vente. En effet, les règles coûtent cher. Une femme dépense cinq à sept euros par mois en serviettes ou tampons. Selon une étude menée en Grande-Bretagne en 2015, le coût des règles s'élèverait à 18 450 livres dans une vie, soit près de 21 300 euros. Le montant inclut les protections hygiéniques, mais aussi les antidouleurs ou encore les sous-vêtements qu'il faut remplacer.
En France, la gratuité de ces dispositifs est discutée depuis quelques mois. En mai dernier, la secrétaire d'Etat, Marlène Schiappa, a réuni, ministres, parlementaires, industriels et associations afin de mettre en place une stratégie de lutte contre la "précarité menstruelle" et étudier un projet d'expérimentation de la gratuité des protections hygiéniques. Pour l'heure, le projet est à l'état embryonnaire et aucun calendrier n'a été révélé. En Écosse par exemple, l'initiative est déjà en cours pour une partie de la population féminine puisqu'en août 2018, le gouvernement a instauré la gratuité des protections hygiéniques pour les étudiantes.
Une façon de vivre
Comptable de formation, Armelle Dhainaut, souhaite voir se démocratiser les serviettes lavables ainsi que le mode de vie "zéro déchet". "Mon but n'est pas de devenir riche, mais de faire découvrir des alternatives saines et de vivre simplement de mon entreprise", commente-t-elle.
Aujourd'hui, elle se consacre entièrement à la confection d'objets réutilisables du quotidien qu'elle met en vente sur son site internet. Parmi lesquels des sacs à vrac réutilisables, des charlottes, des cotons démaquillants, des mouchoirs, des sopalins ou encore des éponges en coton. Minimaliste, elle a commencé à réduire ses déchets après la lecture du livre de Bénédicte Moret, Jérémie Pichon et Nicolas Hulot, Famille presque zéro déchet : Ze guide.
"Au bout de trois mois, le niveau de notre poubelle avaient diminué des trois quarts, et nous faisions 15 à 20 euros d'économie par semaine. Aujourd'hui, nous jetons la poubelle une fois tous les neuf mois. Le mot zéro déchet est assez gênant, car on ne l'est jamais, notre empreinte carbone ne sera jamais de zéro. Il faut donc rassurer les gens sur son accessibilité. Il suffit de faire de petits gestes qui améliorent vraiment notre quotidien", conclut-elle.
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