Finance : faut-il créer une bourse régionale à Toulouse ?

La loi Macron projette de créer des bourses régionales dans chaque métropole "afin de fournir un outil de circuits courts de financement". Objectif : faciliter l'accès des PME aux marchés. Mais, à Toulouse notamment, les professionnels ne voient pas l'utilité d'une relance de ces bourses dans une économie aussi mondialisée. Le gouvernement tranchera sur le sujet d'ici à début 2016.
La Bourse à Paris

Jusqu'au début des années 1990, la France comptait six bourses régionales, en plus de celle de Paris. À savoir les places de Lyon, Nantes, Marseille, Lille, Bordeaux et Nancy. Elles ont toutes été supprimées face à la mondialisation des marchés financiers.

25 ans plus tard, le gouvernement envisage de relancer ces places de marchés en région. L'article 172 de la loi Macron annonce ainsi cet été : "Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le gouvernement remet au Parlement un rapport sur la création de plateformes de cotations régionales ou de bourses régionales dans chaque métropole régionale, en hexagone et dans les outre-mer, afin de fournir un outil de circuits courts de financement régional."

Une proximité régionale
pour rassurer les PME ?

"Cela répondrait à un besoin de plus en plus sensible de fonds propres des PME et des ETI, qui n'ont quasiment pas accès aux marchés de capitaux", expliquait en début d'année Jean-Christophe Fromantin, député UDI des Hauts-de-Seine à l'origine de l'amendement. Ainsi, selon l'Afic (Association des investisseurs pour la croissance), les besoins en fonds propres des PME et des ETI françaises s'élèvent à 11 milliards d'euros par an. Or, les marchés n'ont investi que 6,5 milliards d'euros dans ces entreprises en 2013.

À Lyon, une bourse régionale a été relancée en juillet 2014 à l'initiative de la CCI (chambre de commerce et d'industrie). Opérée par Alternativa, Place d'échange a pour le moment permis à deux entreprises de lever à chaque fois environ 800 000 euros.

Pour Alain Di Crescenzo, président de la CCI de Toulouse et PDG de la société cotée en bourse IGE+XAO, cette réforme irait dans le bon sens :

"Beaucoup de PME ont peur d'aller en bourse, il faut faire en sorte de faciliter l'accès de ces entreprises au marché. Beaucoup d'entre elles veulent trouver un actionnaire local. Les sociétés sont à la recherche d'une proximité qu'une bourse régionale peut leur apporter."

Une proposition anachronique ?

Au contraire, la relance des bourses régionales est considérée comme anachronique par les sociétés de conseil :

"En France, il existe deux types d'investisseurs qui participent aux levées de fonds : les particuliers implantés aux quatre coins du territoire mais qui ne représentent que 15 % des fonds et les investisseurs institutionnels (85 % des opérations). Or, ces sociétés de gestion sont concentrées à 98 % à Paris. On peut le regretter mais les faits sont là, relève Damien Rahier, directeur général de la société de conseil en bourse Portzamparc.

Et puis l'économie a tellement changé en 30 ans. Dans les années 80, il y avait besoin d'une présence physique, pour mettre en réseau les investisseurs. Mais avec les moyens de communication actuels, tout est dématérialisé."

"Au-delà du capital, la PME ou l'ETI va en bourse pour gagner en notoriété. Or, l'effet ne sera pas du tout le même si l'entreprise est cotée en région que sur une bourse nationale voire internationale", remarque Pierre d'Agrain, président de Toulouse Place Financière.

"Toute initiative pour faciliter le financement des PME et des ETI doit être encouragée mais je suis plutôt réservé sur la pertinence d'une place de marché physique, estime Éric Forest, le PDG d'EnterNext, filiale du groupe Euronext dédiée à la promotion et au développement de ses marchés boursiers propres aux PME‐ETI. Le bassin d'investisseurs se mesure à l'échelle nationale et européenne. La localisation géographique de la cotation n'entre pas en ligne de compte, les investisseurs se préoccupent plutôt de la protection et de la sécurité offertes par les marchés. De plus, il faut veiller à ne pas fragmenter la liquidité des PME-ETI, qui est un vrai sujet, en multipliant les places de cotation".

De son côté, Damien Rahier souligne également que l'introduction en bourse est réservée à un nombre restreint d'entreprises :

"Les sociétés doivent connaître au moins 10 % de croissance par an, voire, pour les plus jeunes sociétés, 20 à 30 % de croissance du chiffre d'affaires dans les premières années. Pour aller en bourse, il faut lever au minimum 2,5 millions d'euros mais nous conseillons à nos clients de tabler plutôt sur 5 à 10 millions d'euros."

Des opérations réservées aux entreprises les plus aguerries, ce qui explique pourquoi les startups se tourneront davantage vers le financement participatif. Problème, sur ces plateformes participatives, le montant est limité à un million d'euros. Il manque souvent aux entreprises un échelon de financement intermédiaire, entre la bourse et le crowdfunding. Même s'il existe déjà de nombres offres de financement en la matière.

Les modalités d'implantation de ces bourses restent à définir. L'amendement initial plaidait pour des places de marchés dans chaque métropole des 13 régions sous l'égide de l'Agence France Locale, de la Caisse des dépôts, des chambres consulaires (CCI) et de Bpifrance.

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Commentaire 1
à écrit le 04/10/2015 à 15:23
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Suivre les valeurs "toulousaines" cotées à la bourse de Paris n'est pas non plus très compliqué ... Quant à lever des fonds plus facilement avec des bourses régionales ...???

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