À Scopelec, le début d'une semaine décisive pour ses 2.500 salariés

La nouvelle direction de Scopelec est engagée dans une course contre la montre, à savoir rassurer le tribunal de commerce sur la viabilité de la première Scop de France qui emploie encore aujourd'hui environ 2.500 salariés. Elle n'a plus que sept jours pour lui apporter des perspectives financières rassurantes, après qu'Orange a décidé de ne pas accompagner son sous-traitant historique dans sa restructuration. Une situation qui a poussé le député François Ruffin à rendre une visite express aux salariés présents à Toulouse et à les motiver pour organiser une manifestation à Paris d'ici la fin de la semaine.
Si la Scop Scopelec venait à être liquidée dans les prochains jours, ce sont 2.500 emplois qui disparaîtraient avec.
Si la Scop Scopelec venait à être liquidée dans les prochains jours, ce sont 2.500 emplois qui disparaîtraient avec. (Crédits : Rémi Benoit)

Le tribunal de commerce de Lyon a laissé jusqu'au 26 septembre, soit sept jours, à la nouvelle direction de Scopelec pour trouver une solution. Spécialisée dans l'installation et l'entretien des réseaux de télécommunications et née du côté de Revel (Haute-Garonne), celle qui est la première Scop de France vit, peut-être, ses dernières semaines.

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Actuellement sous protection de l'instance, la société d'origine toulousaine a trois scénarios qui se dressent devant elle. Soit la mise en redressement judiciaire avec le pilotage de la société par un administrateur, la cession de certains actifs du groupe Scopelec pour renflouer sa trésorerie et potentiellement se relancer, ou bien la liquidation judiciaire avec arrêt d'activité à terme. Ce qui causerait alors la disparition des 2.500 emplois des salariés sociétaires encore dans le navire aujourd'hui.

La faute à qui ? Pour les salariés, la réponse est toute trouvée. "Orange assassin", est-il inscrit sur des pancartes au niveau du parking d'un site de la Scop à Saint-Orens (Haute-Garonne). Pour comprendre, il faut se remémorer le fait que l'opérateur français a décidé fin 2021 de réduire drastiquement sa collaboration avec Scopelec à l'issue d'un nouvel appel d'offre pour sa sous-traitance, causant la perte de 40% de son chiffre d'affaires.

Scopelec

Les salariés point du doigt l'opérateur comme le grand responsable de leur situation (Crédits : Rémi Benoit).

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"En 2015, lors du renouvellement des contrats, Orange nous a fait beaucoup grossir. Nous avons embauché 1.000 personnes pour répondre à leurs besoins. Sur l'ensemble de leur sous-traitance en France, nous représentions 23% de l'activité. Puis en 2022, ils décident de tout nous couper. Nous sommes retombés à 8%. S'ils veulent nous tuer qu'ils nous le disent...", résume Frédéric Mazars, salarié sociétaire depuis sept ans au sein de Scopelec et délégué syndical FO.

"Sans cet accord avec Orange, nous serons morts"

Dans les faits, ce sont 150 millions d'euros de chiffre d'affaires annuels qui se sont envolés en raison de problèmes de qualité sur les interventions selon la direction d'Orange. Devant le risque économique et social du dossier, Bercy a missionné le Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) pour trouver une issue favorable à Scopelec. Par cette initiative, le ministère de l'Économie et des Finances a surtout voulu mettre autour de la table Orange et son sous-traitant historique pour trouver une solution à l'amiable malgré la tenue de procédures judiciaires en parallèle.

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L'État étant actionnaire à hauteur de 23% d'Orange, l'optimisme avait gagné les rangs des salariés. Pour preuve, Orange a proposé au cours du processus une offre de 20 millions d'euros cash en guise de dédommagements et 40 millions d'euros de chiffre d'affaires supplémentaires sur 18 mois. De quoi relancer la société et financer le PSE de 550 personnes annoncé par Scopelec au début de l'été en complément des 1.000 départs volontaires. "Au début de l'affaire, nous étions plus de 3.600 salariés dans toute la France, dont 500 en Occitanie. Certains ont pris peur et sont partis dans d'autres domaines ou chez des concurrents qui ont récupéré nos contrats", explique un membre  de la direction.

Scopelec François Ruffin

Entouré de députés locaux de La France Insoumise, François Ruffin est venu apporter son soutien aux salariés de Scopelec basé à Saint-Orens (Crédits : Rémi Benoit).

Mais selon nos informations, Orange a fait savoir au tribunal de commerce de Lyon, il y a quelques jours, que cet accord avec Scopelec n'était plus d'actualité aujourd'hui. Contacté par La Tribune, Orange n'a pas donné suite à nos sollicitations sur ce point. "Sans cet accord avec Orange, nous serons morts le 26. C'est notre dernière chance", estime un membre du CSE abattu. Les discussions avec Orange et le Ciri se poursuivent actuellement. "Mais nous ne mettons pas tous nos oeufs dans le même panier car nous explorons d'autres solutions qu'Orange", tempère-t-on du côté de la direction. Par exemple, la socialiste Carole Delga et ses équipes du conseil régional d'Occitanie ont été sollicitées pour trouver des collaborations industrielles et donc des liquidités.

Une mobilisation des salariés à Paris ce vendredi ?

En spectateur expérimenté de ces conflits sociaux, le député proche de La France Insoumise de La Somme, François Ruffin, est venu rendre visite aux salariés sur le site de Scopelec à Saint-Orens, lundi 19 septembre, en tout début de journée. "J'ai un oeil sur le dossier depuis quelques semaines. Pour moi, il est le symbole de cette ère macronienne", explique-t-il pour justifier sa visite tout en précisant qu'il a sollicité par deux fois de manière écrite sur le sujet Bruno Le Maire, le ministre de l'Économie, sans succès. "Il est aux abonnés absents dans ce dossier. Le gouvernement est aux abonnés absents", a même avancé le réalisateur du film "Merci Patron". Pour tenter de faire bouger les choses, il s'est permis d'appeler devant les salariés et leurs représentants Dominique Faure, la nouvelle secrétaire d'État chargé de la Ruralité. Avant sa nomination au gouvernement, elle était maire de Saint-Orens et la députée fraîchement élue sur cette circonscription.

Cet échange téléphonique cordial, mais court, aura été la conclusion d'une visite de près de deux heures de François Ruffin, entouré d'une centaine de salariés de la Scop, au cours de laquelle il a voulu re-mobiliser les salariés.

"Ils ont réussi à nous empêcher de pisser à plus d'un kilomètre de chez nous, pendant des mois et ça dans tout le pays ! Et là, alors que l'État est actionnaire à hauteur de 23%, on ne veut nous faire croire qu'il n'est pas capable d'imposer à Orange le maintien d'un petit contrat de maintenance ? L'État se fout de votre gueule (...) Mobilisez-vous à Paris et battez vous jusqu'au bout. Tout se décide là-bas alors si vous n'y allez pas c'est sûr que vous êtes morts", leur a lancé le député proche de La France Insoumise.

Motivés par cette idée mais freinés par le coût que représente pour chacun une telle opération, François Ruffin a demandé aux députés LFI locaux présents de participer aux frais de location des bus via leur enveloppe parlementaire, demande à laquelle aucun ne s'est imposé. Un cortège de salariés de Scopelec pourrait donc débarquer à Paris, vendredi 23 septembre, pour manifester devant Bercy et même devant le tribunal de commerce de Lyon le lundi suivant.

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Commentaire 1
à écrit le 19/09/2022 à 21:06
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Moi je propose que la fachosphere insoumise devienne actionnaire obligatoire de cette boîte et qu'on force tout ce beau monde à faire une augmentation de capital..comme ya pas d'actionnaires capitalistes chacun pourra hypothequer sa maison juste pour...

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