La Shem et ses 320 emplois menacés par la réorganisation d'EDF

Conséquence du projet "Hercule", qui consiste en une réorganisation du groupe EDF, le marché de l'hydroélectrique en France va être soumis à une mise en concurrence. Une telle mesure pourrait causer la disparition de la Société hydro-électrique du Midi (Shem), basée à Toulouse, et qui emploie 320 personnes dans le Sud-Ouest. Explications et retour en images sur la mobilisation des salariés de l'entreprise jeudi 26 novembre.
La Shem pourrait-elle disparaître dans les mois à venir, du fait de la mise en concurrence des barrages hydroélectriques ?
La Shem pourrait-elle disparaître dans les mois à venir, du fait de la mise en concurrence des barrages hydroélectriques ? (Crédits : Rémi Benoit)

Plus de 30 % des salariés d'EDF étaient en grève, jeudi 26 novembre, contre le projet "Hercule", réclamé par le gouvernement. Celui-ci consisterait à mieux assurer les investissements de l'État à la fois dans le parc nucléaire et les énergies renouvelables. Mais cette vaste refonte se traduirait alors par le découpage du groupe en trois entités : EDF bleu regroupant les activités nucléaires, EDF vert pour les énergies renouvelables et EDF azur pour les activités hydroélectriques. Et la création de cette dernière entité ne fait pas que des heureux....

Lire aussi : Plan de réorganisation chez EDF : plus de 30% des salariés en grève

"La création de cette filiale, qui serait en réalité une régie, permettrait à EDF de se voir en quelque sorte sauvegarder ces contrats de gestion de barrages hydrauliques et ils ne seraient donc pas soumis à la concurrence grâce à cette réorganisation, contrairement à ce que réclame la Commission européenne", dénonce Serge Saint-Vignes, le délégué syndical de la CGT au sein de la Shem.

Manifestation Shem

Les salariés de la Shem ont manifesté contre le projet Hercule qui concerne EDF, le 26 novembre à Toulouse (Crédits : Rémi Benoit).

Depuis 2010, la France est en négociation avec la Commission européenne pour l'ouverture à la concurrence des concessions des barrages. Traînant des pieds sur le sujet, l'Hexagone a fait l'objet de deux mises en demeure à ce propos en 2015 et 2019 par l'Europe, ce qui a relancé le dossier.

"Nous servons clairement de monnaie d'échange"

Aujourd'hui, les barrages français sont gérés principalement par trois acteurs, à savoir EDF avec plus de 75% des parts de marché, la Compagnie nationale du Rhône (20 à 22%) et la Société hydro-électrique du Midi (Shem qui détient autour de 3% du marché). Si cette réorganisation de l'hydroélectricité venait à prendre effet en 2021, elle pourrait fragiliser l'acteur historique dans le Sud-Ouest en la matière, à en croire les propos du syndicaliste.

"Nous sommes les dommages collatéraux du projet Hercule et surtout de la création prochaine de cette régie EDF Azur. Avec une telle décision, seules nos concessions pourraient être mis en concurrence prochainement et nous estimons que 40% de notre capacité de production est en danger. Total a déjà annoncé publiquement qu'il se porterait candidat sur certains des barrages aujourd'hui sous notre gestion. Nous ne sommes pas naïfs, s'il y a une mise en concurrence c'est forcément pour qu'il y ait un turnover sur les prestataires, sinon quel serait l'intérêt de faire tout cela ?", s'insurge Serge Saint-Vignes.

Manifestation Shem

Serge Saint-Vignes est parvenu à mobiliser plus de la moitié des salariés de la Shem, jeudi 26 novembre, contre le projet "Hercule" d'EDF (Crédits : Rémi Benoit).

La direction de son côté ne mâche pas ses mots. "Nous demandons tout simplement à être associé aux discussions autour de la réorganisation du marché de l'hydroélectricité en France et ne pas être oublié. Au final, nous comprenons que nous sommes les seuls qui seront soumis à la concurrence. Nous servons clairement de monnaie d'échange avec la Commission européenne, alors que nous détenons seulement 3% du marché", tacle un représentant.

La moitié des salariés de la Shem mobilisée

Au-delà des questions d'égalité de traitement soulevées par ce dossier, cet épisode pourrait surtout à terme avoir des conséquences économiques sur les 320 salariés de cette société qui est aussi une filiale détenue à 99% par Engie, si elle venait à perdre une grande partie de sa capacité de production. Ainsi, les 45 emplois de l'atelier de maintenance situé à Laruns (Pyrénées-Atlantiques) pourraient être les premiers touchés, tout comme des fonctions support au sein du siège situé à Balma-Gramont, en périphérie de Toulouse, et qui regroupe 130 salariés. Néanmoins, à terme, c'est bien la viabilité de la société qui est menacée et donc la totalité des emplois associés.

Manifestation Shem

Pendant la mobilisation, une délégation était reçue à la préfecture de Toulouse (Crédits : Rémi Benoit).

Devant ce risque, une partie des salariés s'est donc mobilisée jeudi 26 novembre, comme ceux d'EDF. Ils étaient plus de 150 à se réunir sur la place du Monument aux morts de la Ville rose durant toute la matinée, et ce jusqu'en début d'après-midi. Ce mouvement a d'ailleurs permis à une délégation d'être reçue par le préfet de Haute-Garonne et de la Région Occitanie, Étienne Guyot. Une première réponse de l'État, qui se fait attendre ?

"Depuis 20 ans, tous les pays européens ont su trouver des solutions pour verrouiller leurs marchés hydroélectriques nationaux respectifs, ce qui s'explique par le caractère stratégique des actifs hydrauliques tant pour la sûreté du réseau électrique que dans la perspective d'un mix électrique bas carbone ou pour le caractère stratégique des ressources en eau et de ses multiples usages. Prolongation de concessions, opérateurs publics... les solutions ne manquent pas, quand il y a la volonté politique !", a signalé le 9 novembre la CFE-CGC dans une lettre adressée à Barbara Pompili, la ministre de la Transition Écologique. Mais elle est restée lettre morte à l'heure actuelle.

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Commentaire 1
à écrit le 27/11/2020 à 12:24
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Hercule ? Deux qui le tiennent et trois qui l'... ? Toujours aussi désespérant le néolibéralisme quand il expose sa mégalomanie. L'humanité ne crèvera que de ça, des puissants ressentiments des possédants.

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