Aéronautique : 80% des entreprises du Sud-Ouest ont du mal à recruter

Près de huit entreprises sur dix dans la filière aéronautique et spatiale en Occitanie et en Nouvelle-Aquitaine ont des difficultés à recruter, d'après une étude réalisée par l'Insee avec Aerospace Valley. C'est l'un des principaux freins au rebond de la filière durement touchée par le Covid. Les entreprises du secteur sont aussi confrontées à d'importants problèmes de trésorerie aggravés par la hausse du prix de l’énergie et des matières premières.
Airbus a recruté 2.000 personnes en France sur l'année 2022.
Airbus a recruté 2.000 personnes en France sur l'année 2022. (Crédits : Rémi Benoit)

 « Les ajusteurs-monteurs, c'est bien simple, il n'y en a plus sur le marché. Pour recruter, nous travaillons avec Pôle emploi et les agences d'intérim », témoignait il y a quelques semaines un dirigeant d'Airbus à l'occasion d'un job-dating organisé à Toulouse. Après avoir supprimé 10.000 postes dans le monde à cause de la Covid, l'avionneur européen s'est remis cette année à recruter massivement pour préparer la remontée des cadences avec 2.000 embauches en France sur l'ensemble de l'année 2022.

Dans son sillage, c'est l'ensemble de la supply chain qui se livre à une véritable bataille des talents pour étoffer ses effectifs. Un phénomène confirmé par une étude réalisée par l'Insee en partenariat avec le pôle de compétitivité Aerospace Valley.

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L'enquête réalisée entre mars et juillet 2022 et publiée ce jeudi 15 décembre révèle que 78 % des entreprises de la filière aéronautique et spatiale en Occitanie et en Nouvelle-Aquitaine rencontrent des difficultés de recrutement. Parmi les plus de 2.500 sociétés interrogées, 76 % d'entre elles confient avoir embauché ou envisagent de le faire durant l'année 2022. L'Insee remarque que ces problèmes de recrutement sont présents « quels que soient le secteur d'activité, la taille de l'entreprise ou le domaine de recrutement ciblé ». Et de conclure : « Les embauches envisagées pourraient ne pas toutes aboutir. Surmonter les difficultés de recrutement est l'un des défis majeurs auxquels doit faire face la filière aérospatiale dans ce contexte de reprise de l'activité.»

Frappée de plein fouet par la crise sanitaire, la filière a perdu près de 9.000 emplois dans le Sud-Ouest sur l'année 2020. En 2021, un rebond d'activité modéré est observé avec une progression de 6 % du chiffre d'affaires des entreprises du secteur après un recul de 33 % sur l'année 2020. Le chiffre d'affaires demeure en-deçà de 30% et les effectifs 5 % inférieurs au niveau d'avant-crise. Seule exception, l'emploi dans le tertiaire a déjà retrouvé un seuil comparable à celui de 2019. En revanche, la construction aéronautique et spatiale et la métallurgie subissent encore les effets de la crise.

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Un millier d'emplois supplémentaires en 2021 à Toulouse

Toulouse, coeur battant de la filière aéronautique et spatiale, illustre bien cette dichotomie. La Ville rose, qui regroupe à elle seule 61 % de l'emploi dédié du secteur dans le Sud-Ouest, a enregistré une progression de 1,5 % des effectifs en 2021, soit plus de 1 000 salariés supplémentaires. Dans le détail, dans l'emploi toulousain dans l'ingénierie connaît une hausse de 7 % et  les activités informatiques de 12 %. À l'inverse, des pertes d'emploi sont observées dans la métallurgie (- 12 %) et dans la construction aérospatiale (- 2 %).

Les évolutions sont moins contrastées dans la zone d'emploi de Bordeaux, avec des légères hausses dans les activités informatiques, le commerce et l'ingénierie qui compensent un recul très mesuré dans l'industrie. L'emploi y progresse légèrement, de 0,8 %, soit 100 emplois dédiés en plus. Ailleurs dans le Grand Sud-Ouest, l'emploi baisse dans la plupart des zones d'emploi de taille moyenne comme Marmande (- 15 %), Châtellerault (- 8 %), Rochefort (- 8 %), Figeac (- 6 %) ainsi que dans celles de la ceinture pyrénéenne. Seule la zone de Tarbes-Lourdes se distingue avec une hausse de ses effectifs aérospatiaux de 15 %.

Au total, la filière aéronautique et spatiale regroupe en Occitanie et en Nouvelle-Aquitaine 1.290 entreprises, 109.600 salariés pour 95 milliards d'euros de chiffre d'affaires.

Manque de trésorerie et de matières premières

Au-delà des problèmes de recrutement, d'autres freins fragilisent le rebond de la filière dans le Sud-Ouest. Ainsi, 32 % des entreprises déclarent que des problèmes de trésorerie ont eu un impact négatif majeur, ce qui constitue le principal facteur pesant sur l'évolution de leur situation financière. Le chiffre monte même à 40% en se concentrant sur les activités de métallurgie et de construction aéronautique et spatiale, particulièrement sensibles à la hausse du prix de l'énergie et des matières premières. La filière est ensuite pénalisée financièrement par les stocks, un problème soulevé par 29 % des entreprises. Les autres facteurs ayant un impact négatif sur la situation financière sont moins fréquents : 22 % des entreprises citent l'endettement et 17 % le poids des amortissements.

Autre facteur de désorganisation, la pénurie de certains matériaux et composants devient une préoccupation grandissante des dirigeants.

« Certaines entreprises commencent à pointer des problèmes de disponibilité des fournisseurs et des difficultés d'approvisionnement. C'est tout particulièrement le cas dans la métallurgie qui affronte une très forte tension sur ses matières stratégiques (titane, aluminium, acier, inox). C'est également le cas dans la fabrication d'équipements électriques et électroniques, avec notamment une tension forte sur les semi-conducteurs. Dans ces deux secteurs, les entreprises sont deux fois plus nombreuses qu'en 2020 à mettre en avant les contraintes d'approvisionnement », relève l'Insee.

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À ces ruptures d'approvisionnements de matières premières, il faut ajouter plus récemment l'impact de la flambée des coûts de l'énergie. Ces dernières semaines, certains patrons de la filière s'inquiètent aussi des répercussions de coupures d'électricités possibles en janvier prochain, un défi de plus dans un contexte économique très délicat pour suivre la remontée des cadences.

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Commentaire 1
à écrit le 16/12/2022 à 15:53
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Bonjour, Lorsque l'ons supprime des emplois a tout vas...ils ne faut pas être surprise que la main d'œuvre est partie voir ailleurs.... Bien sur ils ne faut pas le dire...

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