La course à l'aviation à hydrogène s'accélère à Toulouse. Airbus a fait grand bruit il y a deux ans avec son ambition de faire voler un avion régional à hydrogène d'ici à 2035, entraînant dans son sillage l'émergence d'une multitude de projets d'aéronefs électriques, hybrides ou à hydrogène.
Le Singapourien H3 Dynamics, qui a ouvert au printemps 2021 un pôle R&D à Toulouse, fait figure de pionnier dans le domaine de l'hydrogène. Son fondateur est Taras Wankewycz, un entrepreneur français parti vivre en Asie pour y fonder au début des années 2000 une première société de piles à combustibles. Fort de cette expérience, Taras Wankewycz a créé en 2015 le groupe H3 Dynamics qui a pour mission d'accompagner la transition du secteur aérien vers la décarbonation. Le groupe compte désormais une centaine de collaborateurs à Singapour, en France et aux Etats-Unis. À Toulouse, son antenne compte une dizaine de collaborateurs localisés dans le B612, le bâtiment totem dédié à la recherche aérospatiale pour accélérer ses projets faisant appel à la propulsion à hydrogène.
Un drone test de 25 kg visant 900 km d'autonomie
La jeune pousse annonce ce 23 novembre avoir franchi un cap majeur après avoir fait volé en juillet dernier depuis le hub drones de Brétigny-sur-Orge un premier drone cargo de 25 kg équipé de son système de propulsion à hydrogène. Plutôt que d'embarquer une grande pile à combustible à bord d'un drone, H3 Dynamics veut commercialiser un système de propulsion distribuée adapté aux drones et composé de plusieurs nacelles placées sous les ailes de l'aéronef.
« Intégrer de l'hydrogène dans un appareil existant est une opération très complexe qui prend beaucoup de place. Chez H3 Dynamics, nous ne voulons pas sacrifier la charge utile donc l'espace pour transporter des passagers ou des marchandises dans le but d'intégrer de l'hydrogène. D'où cette idée de distribuer l'hydrogène sous les ailes de l'avion pour libérer une partie du fuselage. Dans le drone qui a réalisé des essais en vol cet été, il n'y a pas du tout d'hydrogène dans le fuselage, ce qui permet d'avoir un volume assez important pour transporter des marchandises », précise Bertrand Gauthier, responsable des activités européennes de la société.
Sa conception de nacelle externalisée libère un volume de fuselage de 30 litres, sans hydrogène ni éléments de transmission à l'intérieur. Le drone de 25 kg sera capable de transporter une charge utile de 5kg et disposera d'une autonomie de 900 km s'il est alimenté en hydrogène liquide et de 350 km avec de l'hydrogène sous forme gazeuse. « L'un des avantages de la propulsion distribuée est aussi de multiplier les moteurs donc d'avoir de la redondance pour augmenter à la sécurité en vol en cas de problème avec l'un des moteurs », ajoute Bertrand Gauthier.
Augmenter la puissance pour un avion de 2 à 4 passagers
H3 Dynamics espère commercialiser dès 2023 son système de propulsion à hydrogène à destination des eVTOL (ces petits aéronefs électriques à décollage et atterrissage verticaux), des dirigeables et les drones à voilure fixe.
La prochaine étape consistera à augmenter le niveau de puissance pour un avion de 2 à 4 passagers. « H3 Dynamics travaille désormais sur une plateforme de nouvelle génération propulsée par six systèmes de nacelles à hydrogène. L'avion sera doté d'un système de ravitaillement rapide et servira de banc d'essai pour les technologies suivantes », précise la société. Au-delà d'un rôle de fournisseur de systèmes de propulsion hydrogène, H3 Dynamics aimerait accompagner les avionneurs dans l'adoption de leurs nouveaux standards hydrogène.
De nouveaux locaux pour le site toulousain
En parallèle, la jeune pousse planche toujours sur le projet de drone Mermoz, initié avec l'Isae-Supaéro, visant à fabriquer un système d'aéronef sans pilote de 4 mètres d'envergure propulsé par une pile à hydrogène et capable de traverser l'Atlantique. Un premier vol d'essai du prototype est prévu dans les prochaines semaines.
Pour mener de front tous ces développements, H3 Dynamics continue de recruter à Toulouse notamment des ingénieurs système, des ingénieurs contrôle, des ingénieurs sécurité pour développer la propulsion à hydrogène ainsi que des ingénieurs simulation pour développer des jumeaux numériques. La jeune entreprise, qui a levé 26 millions de dollars il y a un an, envisage d'investir prochainement ses propres locaux à Toulouse pour continuer à grandir, tester le système propulsif et mener des vols d'essais.
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