C'est l'un des deux géants aéronautiques du Lot. Ratier-Figeac est implanté depuis plus de 100 ans dans la commune de Figeac. Cette filiale du groupe américain Collins Aerospace fabrique des hélices pour ATR, Airbus, Bombardier... Mais contrairement à la majeure partie de la filière aéronautique du Sud-Ouest, et notamment son voisin Figeac Aéro qui doit annoncer un plan social début septembre, Ratier-Figeac résiste plutôt bien à la crise actuelle.

"Avec le confinement et l'arrivée du virus, les équipes se sont très vite reconfigurées. Les opérations de fabrication ont été arrêtées moins d'une semaine, se remémore Jean-François Chanut, président de Ratier-Figeac et directeur général de Propeller Systems (l'entité qui regroupe Ratier-Figeac, son antenne au Maroc et un site de production à Windsor Locks aux États-Unis).

Le militaire pèse 40% du chiffre d'affaires

Bien sûr, ajoute-t-il, "les cadences de production ont été drastiquement modifiées au deuxième trimestre et l'activité après-vente s'est quasiment arrêtée, les avions ne volant plus dans le monde". En mai, quand le ralentissement économique était au plus fort, la société a opté pour un taux de chômage partiel de 50%. Mais, face à la crise actuelle, la chance de l'équipementier est de ne pas dépendre exclusivement de l'aviation commerciale.

"Au sein de Propeller Systems, l'aviation militaire représente 40% du chiffre d'affaires et l'aviation civile pèse 60% de l'activité. Nous faisons des hélices d'avions militaires type A400M mais aussi pour les avions de transport Lockheed C-130 Hercules utilisées par l'armée américaine. La chute de l'aviation civile est amortie par l'activité militaire qui n'a pas été impactée par la crise de la Covid pour l'instant", précise Jean-François Chanut.

L'entité Propeller Systems prévoit pour l'année 2020 une baisse d'activité de 20% soit un chiffre d'affaires de 425 millions de dollars contre 530 millions en 2019. Beaucoup de sous-traitants du Sud-Ouest, à l'instar de Liebherr Aerospace, tablent plutôt sur une réduction de leur activité de 40%.

Pour le moment, aucune suppression de postes en vue au sein de l'entreprise qui emploie plus de 1 200 personnes à Figeac. "On ne peut jamais exclure aucune option mais à ce stade nous n'avons pas engagé de plan social", confirme le dirigeant. L'entreprise a seulement décidé de ne pas renouveler les contrats des effectifs CDD et intérim. "Cela représente une trentaine de personnes. Mais il n'est pas question de licenciements, d'autant que l'entreprise dispose d'une trésorerie de 200 millions d'euros", glisse Lilian Alric, délégué CGT au sein de Ratier-Figeac.

L'entreprise n'a pas fait appel pour le moment au prêt garanti par l'Etat (PGE) et estime "avoir les moyens au regard d'autres sous-traitants plus fragiles et plus impactés par la crise de ne pas bénéficier de certains reports de charges".

Le centre d'excellence pour les hélices maintenu

Avant la crise, au printemps 2019, le sous-traitant avait lancé un plan d'investissement de 32 millions d'euros pour créer un centre d'excellence des hélices d'avions.

"L'ambition est de développer des hélices encore plus performantes pour préparer de nouvelles briques technologiques à travers le programme d'innovation Helios. Nous travaillons notamment sur la propulsion hybride.

Même si nos résultats financiers vont être extrêmement impactés et nos capacités d'investissement à court-terme doivent être revues, nous ne remettons pas en question cette stratégie et nous allons continuer à développer de nouvelles technologies pour améliorer l'aviation à hélices dans les années à venir, estime Jean-François Chanut.

Dans le cadre du plan de soutien à la filière aéronautique présenté fin juin, l'Etat a annoncé une enveloppe d'1,5 milliard d'euros à destination du Corac (Conseil pour la recherche aéronautique civile) pour penser l'avion vert. Les recherches menées au sein du centre d'excellence de Ratier-Figeac pourraient s'inscrire dans cette dynamique.

"Les avions à hélices ont l'avantage d'avoir des modes de propulsion plus efficaces et moins consommateurs de pétrole donc plus respectueux de l'environnement avec moins de bruit et de vibrations. Nous sommes confiants sur le fait que l'aviation régionale à hélices est une bonne solution pour le transport aérien court-courrier".

L'entreprise poursuit donc la construction d'un bâtiment de 2 300 m2 qui sera dédié à la conception, les tests, la fabrication et la maintenance des nouvelles générations d'hélices. Jean-François Chanut espère la livraison du bâtiment "d'ici la fin de l'année". Le projet prévoyait initialement 150 embauches. Cette politique de recrutement n'est pas abandonnée mais sera revue à l'aune de la crise actuelle.

Par ailleurs, le dirigeant réfléchit à faire revenir dans l'Hexagone une partie de ses activités. "Nous envisageons la relocalisation de certains produits réalisés en dehors de l'Europe et nous nous interrogeons sur la possibilité de rapatrier une partie des pièces et de les produire chez nous et chez certains fournisseurs français", conclut le président de Ratier-Figeac.