Aéroport de Toulouse : le Conseil d'État valide la privatisation

Le Conseil d'État a décidé mercredi 9 octobre de casser l'annulation de la procédure de cession des parts de l'aéroport de Toulouse à Casil Europe. Un coup dur pour les opposants à la privatisation. Les actionnaires chinois sont désormais libres de revendre leur capital au groupe Eiffage.
Les actionnaires chinois devraient bientôt revendre leurs parts au groupe Eiffage.
Les actionnaires chinois devraient bientôt revendre leurs parts au groupe Eiffage. (Crédits : Rémi Benoit)

C'est un tournant dans le dossier de la privatisation de l'aéroport de Toulouse. Le Conseil d'État a définitivement validé la procédure de cession en 2015 des 49,99% des parts de l'État à la société d'actionnaires chinois Casil Europe. Cette vente avait été annulée le 16 avril dernier par la cour administrative d'appel de Paris. Le Conseil d'État a décidé mercredi 9 octobre de casser cette nullité.

Comme l'a révélé La Tribune le 27 septembre, le rapporteur de cette institution judiciaire avait préconisé cette validation de la procédure de cession.

Une procédure jugée "régulière"

Dans le jugement que La Tribune a pu consulter le Conseil d'État explique :

"La décision de sélection de l'acquéreur a été prise à l'issue d'une procédure régulière. En particulier, il relève que la procédure suivie pour choisir parmi les différents candidats a respecté les règles définies par le cahier des charges. Il juge notamment que ce cahier des charges n'interdisait pas que la composition d'un groupement candidat évolue au cours de la procédure.

Le Conseil d'État juge ensuite que le choix du consortium Symbiose comme acquéreur de la participation en cause n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Les arguments soulevés par les requérants ne sont en effet pas de nature à remettre en cause le choix des ministres".

En avril, la cour d'appel avait jugé que la cession du capital ne respectait pas le cahier des charges. À l'origine c'est SNC Lavalin qui devait racheter les parts de l'État, avec Casil Europe. Au final, la société d'actionnaires chinois s'est présentée seule pour racheter le capital de l'aéroport, Lavalin ayant été mis en cause dans une affaire de corruption en Libye.

Quels recours pour les opposants ?

C'est un coup de massue pour les opposants à la privatisation de l'aéroport de Toulouse-Blagnac.

"Nous avons affaire à une décision politique puisque le Conseil d'État n'a pas tenu compte de la présence au sein du consortium initial d'un opérateur spécialisé dans la gestion des aéroports (SNC Lavalin, ndlr) et que dans l'offre finale ne restait plus que des financiers", réagit Christophe Lèguevaques, l'avocat du collectif des opposants à la privatisation.

De fait, la décision du Conseil d'État rend caduque l'audience prévue le 31 octobre devant le tribunal de commerce de Toulouse pour un autre recours lancé par le collectif. Ce qui veut dire que Casil Europe peut désormais revendre sans encombre ses 49,99% de capital à Eiffage comme il l'avait annoncé en mai dernier.

Les opposants à la privatisation vont se réunir pour décider d'un éventuel recours devant la cour européenne des droits de l'homme (même si cette procédure ne serait suspensive). Le collectif réfléchit aussi à demander la nullité de la privatisation sur le motif du dol ( manœuvre dans le but de tromper son partenaire et provoquer chez lui une erreur) en estimant que Casil Europe avait promis d'investir dans des projets structurants pour le territoire.

Pour sa part, la société d'actionnaires chinois, s'est réjoui de la décision du Conseil d'État :

"En annulant cet arrêt, le Conseil d'État valide la procédure suivie ainsi que la cession de 49,99 % de ses parts à Casil Europe, et met définitivement fin au contentieux administratif engagé depuis plusieurs années. Cette décision permet à ATB de continuer à se consacrer pleinement à la poursuite du développement de l'aéroport".

Lire aussi : Aéroport de Toulouse : le Chinois Casil Europe choisit le Français Eiffage pour vendre ses parts

Soulagement des collectivités locales

Du côté des actionnaires locaux (les parts restantes de l'aéroport de Toulouse sont détenues à 10,01% par l'État et à 40% par la CCI, Toulouse Métropole, le Conseil départemental et la Région Occitanie, ndlr), cette décision constitue un véritable soulagement.

"Si les Chinois veulent vendre, qu'ils vendent leurs parts à Eiffage. Ce serait la meilleure solution pour sortir de cette impasse", estimait le 26 septembre Bernard Keller, vice-président de la Métropole qui siège au conseil de surveillance de l'aéroport.

Le représentant du Département au conseil de surveillance Pascal Boureau confirme :

"Il faut tourner cette page et clarifier la situation. Même si le fonctionnement de l'aéroport n'est pas bloqué, il faut d'ici la fin de l'année boucler les comptes de 2018. La question des dividendes est également en suspens".

Depuis l'arrivée des actionnaires chinois en 2015, les relations entre les actionnaires locaux et Casil Europe étaient houleuses, notamment sur la question des dividendes. Dès 2016, le consortium chinois a demandé 40 millions d'euros pour l'ensemble des actionnaires. Mais il obtiendra "seulement" 17,5 millions d'euros en puisant dans les réserves financières de l'aéroport, malgré un vote d'opposition des collectivités locales. L'année suivante, les actionnaires français votent à nouveau contre le versement de 7,85 millions d'euros aux actionnaires (dont 1,5 million d'euros puisé dans les réserves). En mai 2018, rebelote. Les collectivités locales et la CCI votent contre le versement de l'intégralité du résultat net de l'aéroport, soit 14 millions d'euros de dividendes (aucune ponction cette fois dans les réserves).

En décembre dernier, les actionnaires s'étaient mis d'accord pour reverser pendant cinq ans, l'intégralité du résultat net sous forme de dividendes. Mais quelques semaines plus tard, les actionnaires locaux avaient appris par la presse que les actionnaires chinois souhaitaient revendre leurs parts.

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Commentaires 3
à écrit le 10/10/2019 à 12:34
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Pour en savoir plus sur le scandale de la privatisation ratée de l'aéroport de Toulouse-Blagnac, il faut lire "L'empreinte du Dragon" de Jean Tuan chez CLC Editions. L'auteur, observateur attentif de la Chine depuis longtemps et journaliste spécialis...

à écrit le 10/10/2019 à 9:49
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Voilà ça va rester Français avec Eiffage ils se feront piller FRANÇAIS oui MÔnsieur À moins que Eiffage se fasse racheter par les chinois 🤣🤔

à écrit le 09/10/2019 à 17:31
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Des gugusses valident la décision de gens, dont dépend leur carrière, très impressionnant en effet. Cela s'appelle de la démocrature.

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