Fram : Un accord juridique et des questions

Dans un jugement du 4 avril 2018, le tribunal de commerce de Toulouse entérine un accord entre le cédant et le repreneur de Fram. Un accord complexe qui pose de nombreuses questions sur le fond.
Le tribunal de commerce a-t-il bien géré le dossier Fram ?
Le tribunal de commerce a-t-il bien géré le dossier Fram ? (Crédits : Stephane Mahe)

Malgré la reprise définitive en novembre 2015 du voyagiste Fram par deux filiales de LBO France (détenu depuis un an par le fonds Equistone), actée par le tribunal de commerce de Toulouse, l'affaire était encore loin d'être terminée. En effet, un conflit persistait entre "le camp" du cédant (la famille Colson) et des organes de la procédure (l'administrateur judiciaire maître Caviglioli et le liquidateur, le cabinet Benoît et Associés) et le camp des repreneurs.

Celui-ci portait alors sur l'arrêté des comptes prorata, autrement dit sur l'arrêté des comptes de l'entreprise liquidée pour définir ce qui est à la charge du repreneur, ou ce qui sera une créance dans le cadre de la liquidation judiciaire. Pourtant, le jugement du tribunal de commerce de Toulouse, actant la reprise, est précis à ce sujet :

"Le repreneur supportera prorata temporis l'ensemble des charges, taxes, impôts, salaires et charges sociales des salariés repris et toutes les contributions liées à l'exploitation à compter de l'entrée en jouissance (26 novembre 2015 minuit). L'ensemble des charges, taxes, impôts, salaires ou autres dont le fait générateur est antérieur à la date d'entrée en jouissance restera à la charge du cédant".

Une avance contestée

Mais rien à faire... Les deux parties s'opposent sur cette notion de "fait générateur". Les repreneurs retiennent la notion d'engagement pour la définir, c'est-à-dire la date de réservation, et les organes de la procédure privilégient plutôt la réalisation de la prestation, tout en rappelant que le repreneur s'était engagé à assurer la continuité de service dans son offre de reprise.

Selon LBO France, ce conflit aurait engendré des difficultés économiques non prévues dans son business plan, et à ce titre, il demande réparation. La somme de 11,9 millions d'euros a donc été réclamée officiellement en 2016 aux organes de la procédure afin de mettre un terme à ce conflit.

"Contre un chantage à un nouveau dépôt de bilan", selon un proche du dossier, le tribunal du commerce de Toulouse a accordé "une avance" de 4 millions d'euros aux repreneurs, dans l'attente du règlement du conflit entre les deux parties. De leur côté, les organes de la procédure, appuyés par un rapport du cabinet Eight Advisory, réclament aux repreneurs la somme de 206 000 euros au titre des comptes prorata, au profit de la liquidation judiciaire, et la restitution de "l'avance".

"Il est impensable d'avoir un delta de plus de 12 millions d'euros entre les deux parties s'ils se sont appuyés sur des analyses juridiques. Le tribunal aurait pu demander une analyse indépendante", estime Laura Sautonie Laguionie, professeur à l'université de Bordeaux et spécialiste du droit des entreprises en difficulté.

Le repreneur favorisé ?

Malgré cette divergence de vues, le tribunal toulousain a officialisé un accord entre les deux parties, dans un jugement datant du 4 avril 2018.

"Ce n'est pas un jugement classique. C'est le règlement d'un conflit par la voie de la transaction afin d'éviter que cette querelle s'éternise et soit réglée par la voie judiciaire. Dans ce cadre, le tribunal vérifie qu'il y a des concessions réciproques réalisées de la part des deux parties, et si c'est le cas, il valide la transaction", ajoute l'experte.

Dans le cas de Fram, les concessions faites semblent favoriser les repreneurs. Point majeur de l'accord transactionnel, l'avance de 4 millions d'euros reste dans les caisses de la société du nouveau Fram et les organes de la procédure ne peuvent plus la réclamer. Quelques mois après cet épilogue, Georges Colson, ex-actionnaire mais aussi ex-président du directoire de Fram, est nommé, par les repreneurs, à la tête des filiales de Fram au Maroc. La justice locale bloque actuellement l'argent de la vente de ces filiales, soit 7 millions d'euros, qui pourraient permettre de payer quelques créanciers.

Lire aussi : La saga des promesses non tenues du voyagiste Fram

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Commentaires 3
à écrit le 07/06/2019 à 23:38
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Professionnel du Tourisme, je suis l'actualité de FRAM avec Nostalgie et Gravité. Nostalgie pour une des plus belles marques du Tourisme Français, Gravité parce que finalement on ne sait pas grand chose du retournement des Marques FRAM et PLEIN VE...

à écrit le 07/06/2019 à 15:53
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Au fil de ces diverses révélations, on ne peut qu'applaudir à l'excellente affaire réalisée par Karavel-Promovacances : poser 10 millions d'euros sur la table pour s'emparer d'une célèbre boîte moribonde, vendre 6 millions d'euros le camping de luxe ...

à écrit le 05/06/2019 à 11:01
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Le tribunal de Commerce a t'il bien géré le dossier FRAM? La question peut paraître insolente et pourtant.. Dans le jugement de cession du 25/11/15 à la rubrique ENGAGEMENTS CLIENTS on lit: " Afin d'assurer la continuité de l'exploitation et du...

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