Le Toulousain Colibri vend des peintures végétales sans produits pétrochimiques

Une startup toulousaine a vendu en quelques mois 13 000 litres de sa peinture composée à 98% de produits naturels. Une alternative aux peintures acryliques issues de la pétrochimie qui génèrent la prolifération de substances toxiques pour l'homme.
Cédric Laurent a créé des peintures sans solvants chimiques.
Cédric Laurent a créé des peintures sans solvants chimiques. (Crédits : Florine Galéron)

Pour le moment, c'est depuis le garage de sa maison à Montrabé, au nord de Toulouse, que Cédric Laurent teinte et expédie ses peintures biosourcées. Avant de lancer sa startup, il a travaillé dans la rénovation de maisons.

"Pendant 15 ans, j'ai utilisé pour mes chantiers des produits acryliques issus de la pétrochimie. En cherchant à me tourner vers des produits plus naturels, je me suis aperçu qu'il y avait une offre en la matière pour les isolants mais pas vraiment pour la peinture. C'est de là que c'est parti", raconte l'entrepreneur.

Une peinture à base d'algues et d'huile de pin

En septembre 2018, il a donc lancé la commercialisation de Colibri, une marque de peinture composée à 98% de produits naturels.

"Notre peinture est fabriquée avec des algues rouges, de l'huile de pin, de l'huile de ricin, de l'eau et quelques pigments minéraux. De la même manière, la résine, qui donne l'aspect et la tension à la peinture, est biosourcée", décrit Cédric Laurent.

Exit donc le plastique et les solvants. D'autre part, Colibri a mis au point une méthode pour dépolluer l'air intérieur d'une maison. "Nous avons intégré dans la peinture des nanocapteurs chimiques qui neutralisent le COV (composé organique volatil) le plus toxique qui est le formaldéhyde en le transformant en vapeur d'eau. On retrouve le formaldéhyde dans tous les meubles du commerce, la colle de carrelage etc. Notre peinture a un taux de COV de 0,02 g/l. À titre de comparaison, ce taux est de 30 g/l selon la meilleure norme (A+) ", poursuit-il.

"Les artisans ont compris l'intérêt pour leur propre santé"

Pour mettre au point ce produit, Colibri s'est associé avec "un grand industriel de la peinture" (dont le nom reste pour le moment confidentiel). "Des ingénieurs ont travaillé en laboratoire d'après le cahier des charges que j'ai défini. La fabrication est réalisé dans cette usine. À Montrabé, nous avons une machine pour réaliser les teintes, l'expédition et le stockage des produits", détaille le fondateur de la société.

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Les peintures sont teintées et expédiées depuis le garage de Cédric Laurent (Crédits : Rémi Benoit).

En seulement huit mois, la jeune pousse a écoulé ainsi 13 000 litres de peinture et a atteint un rythme actuel de 2 000 litres vendus par mois. Les achats sont réalisés principalement depuis son site internet par des particuliers, mais aussi par quelques artisans.

"Le Youtuber Docteur Peinture en a parlé et puis via mon réseau aussi j'en vends. Les professionnels remarquent une qualité similaire à la peinture classique. Les artisans ont également compris l'intérêt pour leur propre santé. Quand ils finissent une journée avec notre peinture, ils n'ont pas mal à la tête, pas de problèmes respiratoires", fait remarquer Cédric Laurent.

Colibri a l'ambition à terme de réaliser 30% de ses ventes à destination des professionnels afin de toucher de plus gros volumes de commandes et faire baisser le prix des produits.

"Actuellement, nous sommes à 23,90 euros le litre, soit 20 à 30% plus cher qu'une peinture premium acrylique. L'écart n'est pas énorme. Par contre, nous ne pourrons jamais concurrencer une grande enseigne comme Castorama qui vend 15 litres à 40 euros", explique-t-il.

Les industriels encore frileux sur les produits naturels

Pour convaincre les pros, la société est entrée en contact avec des réseaux de distribution indépendants mais aussi des institutionnels. "La Mairie de Paris nous a demandé des échantillons. Les HLM de Foix nous ont ouvert leur réseau d'artisans. C'est important pour nous d'avoir des prescripteurs institutionnels qui référencent nos produits dans les appels d'offres. Tous les produits pétrochimiques sont très toxiques. La qualité de l'air étant devenue une priorité nationale, les écoles et les crèches ont des obligations correctives et la peinture en fait partie. Du coup, le prix n'est plus l'unique critère dans les appels d'offres, la qualité est également prise en compte", note l'entrepreneur.

Néanmoins, faire émerger un produit sans l'industrie pétrochimique reste un parcours semé d'embûches.

"Quand j'ai pris mon bâton de pèlerin pour expliquer mon concept, la plupart des industriels m'ont claqué la porte au nez en me disant qu'il est compliqué de trouver des matières premières pour fabriquer un produit naturel, qu'il faut mobiliser des ingénieurs pour s'assurer du rendu qualitatif... Les industriels veulent 'rincer' au maximum le modèle pétrochimique et voir ensuite pour les produits biosourcés. C'est une loi qui pourrait amener le changement. La demande des particuliers est déjà là", relève Cédric Laurent.

En attendant, le créateur d'entreprise table sur un chiffre d'affaires de 400 000 euros pour 2019 en écoulant 30 000 litres de peinture. Pour l'instant, Colibri est composée de trois salariés. Mais depuis le mois de mars, la startup a intégré l'accélérateur WeSprint. "C'est comme si on avait douze personnes supplémentaires car nous sommes accompagnés par des spécialistes en développement marketing, digital... ", estime-t-il.

Une levée de 2 millions d'euros prévue à l'automne

Colibri espère réaliser une levée de fonds d'1,5 à 2 millions d'euros à l'automne prochain pour accompagner son développement et déménager à l'été dans ses propres locaux.

L'entreprise planche aussi sur de nouveaux produits. "Les 2% qui ne sont pas des produits naturels dans nos peintures sont les conservateurs. Mais nous travaillons sur des méthodes pour les supprimer. Nous espérons lancer un produit avec une peinture 100% naturelle en septembre prochain. Nous sommes également en contact avec un fabricant niçois capable de supprimer ces nanocapteurs chimiques que nous utilisons pour neutraliser le formaldéhyde par l'intégration d'une molécule naturelle", conclut Cédric Laurent.

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