En panne de neige, les Pyrénées se cherchent un nouveau modèle économique

Après un Noël sans neige, les stations de ski des Pyrénées accusent d'importantes pertes de chiffre d'affaires. Une situation qui pourrait s'aggraver avec le réchauffement climatique. Face à cette nouvelle donne, la Région Occitanie vient d'annoncer un plan de 800 millions d'euros à l'horizon 2025 pour "imaginer la montagne de demain". Entre réhabilitation des hébergements et nouvelles activités, tour d'horizon des pistes prônées à la fois par les stations de ski et les écologistes.
Luchon-Superbagnères a ouvert deux pistes de ski le week-end dernier grâce aux canons à neige.
Luchon-Superbagnères a ouvert deux pistes de ski le week-end dernier grâce aux canons à neige. (Crédits : Rémi Benoit)

"Il est tombé seulement 5 cm de neige à 1800 mètres d'altitude depuis décembre dernier. D'après les habitants, c'est du jamais vu en 30 ans", lançait il y a quelques jours Hervé Pounau, directeur du nouveau syndicat mixte qui régit les trois stations de ski de Haute-Garonne  (Luchon-Superbagnères, Le Mourtis et Bourg-d'Oueil). Le week-end dernier, Luchon-Superbagnères a enfin pu ouvrir deux pistes, les températures proches de zéro ayant permis de démarrer les canons à neige. Et ce jeudi 17 janvier au matin, les flocons ont fait leur retour mais pas sûr que ce soit suffisant après un Noël sans neige.

"Nous avons observé -30% de chiffre d'affaires sur la période des fêtes, même si nous espérons rattraper un peu d'ici la fin de la saison nous serons probablement à - 20% sur l'année", déplore le directeur.

Les trois stations enregistrent en moyenne 6,5 millions d'euros de chiffre d'affaires annuel avec 300 000 journées-ski vendues.

Des difficultés économiques observées sur l'ensemble des stations de moyenne altitude (entre 1000 et 2000 mètres) des Pyrénées. Et les années à venir pourraient être encore plus difficiles. D'après une étude menée par l'Observatoire pyrénéen du changement climatique, les températures maximales pourraient augmenter entre 2 et 4°C à l'horizon 2050 et la chaîne de montagne perdrait par conséquent un mois d'enneigement par an ! Même si les exploitants de stations soulignent qu'il y a toujours eu des années avec plus ou moins de neige, la filière commence à chercher un nouveau modèle économique.

Un plan régional de 800 millions d'euros

Depuis 2018, le Département de Haute-Garonne a repris le contrôle des trois stations du département, ainsi que Peyragudes (à cheval entre la Haute-Garonne et les Hautes-Pyrénées), qui étaient lourdement endettées et promet d'y investir 23 millions d'euros. En communiquant désormais sur un tourisme "quatre saisons", l'objectif est de permettre aux stations d'être moins dépendantes des cumuls de neige et de développer une activité tout au long de l'année. En parallèle, un office de tourisme unique pour le pays de Luchon, Saint Béat et le Comminges a été lancé afin de mieux faire connaître l'offre touristique de montagne en Haute-Garonne.

Le 9 janvier dernier, c'était au tour de la Région Occitanie d'annoncer un Plan Montagne de 800 millions d'euros à l'horizon 2025 pour "imaginer la montagne de demain". Parmi les huit axes évoqués figure notamment le logement, le soutien au pastoralisme (élevage en pâturage notamment de brebis) et aux filières bois et pierre, le développement du très haut débit, le marketing collectif pour le ski et la valorisation des produits de montagne.

Quelles pistes pour développer l'activité ?

Pour Hervé Pounau, ce soutien massif des collectivités locales est une question de survie :

"Cela va coûter mais on est obligé de le faire. En Haute-Garonne, 17 000 emplois dépendent de la montagne. S'il n'y a plus d'activité, que va-t-on faire d'eux ? Devront-ils aller chercher du travail à Toulouse ?"

En tant qu'exploitant, il souligne que le ski est la seule activité rentable en montagne avec pour "un euro investi, six euros injectés dans l'économie locale". Il reconnaît néanmoins que le territoire a besoin aussi "d'hébergements, de terrains de tennis, de centres équestres".

De son côté, Marcel Ricordeau, secrétaire du Comité écologique ariégeois, regrette une lente prise de conscience.

"Dès 2030, le ski à moins de 2000 mètres, ce sera fini. En Ariège, Ax-les-Thermes pourrait s'en sortir mais pas les stations de moyenne altitude comme Guzet. Les élus et les exploitants ont encore du mal à changer leur logiciel. Le ski demande de lourds investissements, pour des téléskis par exemple. Si l'on rapporte ces investissement aux recettes engrangées, le ski n'est pas rentable."

Pour lui, la priorité n°1 devrait être dans l'hébergement en montagne : "En Ariège, vous avez des tas de maisons vides qui pourraient devenir des locations touristiques. Mais souvent pour des histoires d'héritage, la qualité des biens se dégrade. À l'inverse, un village comme Couflens-Salau compte seulement 85 habitants à l'année mais 200 résidences touristiques. C'est un modèle qu'il faudrait suivre". Le Comité écologique ariégeois insiste aussi sur la nécessité de soutenir de petites filières aux emplois non délocalisables comme l'artisanat ou l'essor du chanvre. Autant de pistes possibles pour dessiner "une autre montagne" dans les décennies à venir.

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