Comment s'organise la maintenance des avions, l'exemple d'ATR

Le constructeur aéronautique ATR annonce la prolongation de son accord de maintenance globale pour six ans avec la compagnie aérienne régionale irlandaise Stobart Air. Laurent Caballe, vice-président "Products & Services" chez ATR, détaille pour La Tribune Toulouse la nature de cette activité sans laquelle aucun opérateur ne pourrait fonctionner.
ATR s'occupe de la maintenance de ses avions pour 43 compagnies aériennes, ce qui représente 300 appareils, soit environ le tiers de la flotte de la société

Quelle part la maintenance des compagnies aériennes (opérateurs) occupe-t-elle dans les activités de la société Avions de transport régional (ATR) ?

La maintenance représente 15% de nos activités pour un chiffre d'affaires d'environ 260 millions d'euros par an. En tant que leader mondial du marché des avions régionaux et premier constructeur de turbopropulseurs de la planète, les 85% restants sont consacrés à la fabrication d'avions et à la formation de pilotes, équipages et, justement, de personnels de maintenance.

Combien de compagnies aériennes font aujourd'hui appel à vous ?

Nous nous occupons de 43 opérateurs. Ceci représente 300 avions, soit environ le tiers de la flotte totale d'ATR.

Quelle est la première grande étape dans l'entretien de la flotte d'une compagnie aérienne ?

Le point de départ est l'ingénierie. C'est-à-dire l'"étape matière grise" dans laquelle les ingénieurs cherchent et détectent les pannes ou les problèmes de fiabilité des appareils. Ils planifient ensuite les actions de maintenance à effectuer et déterminent la liste des pièces de rechange nécessaires aux réparations. Très souvent, les ingénieurs qui effectuent ce travail sont salariés des compagnies aériennes. Toutefois, nous envisageons de développer ce segment et de proposer les services de nos propres ingénieurs.

D'où proviennent les pièces de rechange?

C'est là que nous intervenons. Option numéro un pour les compagnies aériennes : nous acheter les pièces de rechange. Nous en fabriquons quelques-unes mais elles proviennent majoritairement des grands constructeurs de pièces aéronautiques comme Thales ou Honeywell. Seconde option : elles peuvent être mises à disposition par ATR de manière exclusive, directement stockées dans les hangars des clients pour les pièces les plus critiques. Pour les autres pièces, le client a accès à un pool mutualisé qui se trouve dans l'un de nos trois centres de stockage. Ces trois pôles sont localisés à Paris Charles de Gaulle, Singapour et Miami pour desservir l'Europe, l'Asie et le continent américain. Les pièces qui y sont entreposées sont à la disposition des clients via un abonnement.

Ces contrats d'abonnement se nomment "Global Maintenance Agreement" (GMA) et couvrent également la logistique et la réparation des pièces de rechange. C'est d'ailleurs le type d'accord que nous venons de renouveler pour six ans avec notre partenaire depuis une décennie déjà, la compagnie aérienne régionale irlandaise Stobart Air. L'ensemble de la flotte ATR de Stobart Air est couvert par cet accord de maintenance : deux ATR 42-300, deux ATR 72-500 et 13 ATR 72-600.

ATR

Maintenance d'un ATR 72-600s, l'appareil le plus récent de la société ATR. Crédit : ATR/Pierre Barthes

Quel est le coût d'un contrat GMA ?

Le tarif dépend du périmètre des pièces concerné. En effet, un contrat GMA peut englober la totalité des pièces de l'avion ou seulement une partie. Dans tous les cas, la mise à disposition des pièces est facturée au mois : sous forme d'une location pour le stock exclusif basé chez le client ou sous la forme d'un "abonnement" pour l'accès au pool mutualisé. Ces tarifs sont confidentiels.

Quel est l'intérêt de ce type de contrat pour les opérateurs ?

Ceci est plus rentable car le fait de mutualiser les pièces dans un pool permet de réduire significativement l'investissement nécessaire pour chaque client. Par exemple, pour un client sans GMA qui doit investir 5 millions d'euros en pièces de rechange, nous pouvons proposer, pour une couverture de services équivalente, un stock exclusif d'une valeur de 3 millions d'euros - pour les pièces critiques - ajouté à un investissement dans le pool d'un million d'euros - pour les autres pièces. Soit un investissement total de 4 millions d'euros au lieu de cinq.

D'autre part, la trésorerie nécessaire à l'achat des pièces est financée par ATR dans le cadre d'un GMA. C'est un élément très important dans le monde des compagnies aériennes qui ont généralement un niveau de cash très bas et supportent des investissements très élevés.

Après avoir fourni aux opérateurs les pièces dont elles ont besoin, ATR s'occupe-il de leur installation ?

Non. L'installation d'une pièce de rechange est une opération de maintenance simple, inscrite dans les manuels de maintenance de l'avion. Ce sont directement les mécaniciens de la compagnie aérienne qui s'en chargent, comme pour toutes les tâches de réparation simples de l'avion. Les opérateurs peuvent également sous-traiter la réparation à des "Maintenance Repair and Overhaul" ou MRO, spécialistes de ce type de services comme Air France Industries.

En revanche, si une réparation est plus complexe - avion accidenté à la suite d'un atterrissage difficile par exemple - nos propres équipes spécialisées interviennent en s'appuyant sur des compétences bien spécifiques et, si besoin, sur les directives des bureaux d'études d'ATR. Ces "working parties" peuvent durer jusqu'à plusieurs semaines et leur coût varie donc de quelques milliers à quelques millions d'euros.

Quel est votre principal concurrent?

Dans le domaine des pièces de rechanges, plusieurs sociétés proposent des contrats équivalents au GMA. Notre principal concurrent est Sabena Technics. Néanmoins, avec 50% de parts de marché sur le segment des services de type GMA, ATR est le leader du domaine.

Lire aussi : L'Inde et l'Iran, plus gros clients d'ATR en 2017

ATR, leader mondial du marché des avions régionaux de moins de 90 places

Fondée en 1981, la société Avions de transport régional (ATR) est un groupement d'intérêt économique (GIE) entre la multinationale italienne Leonardo et Airbus. À ce jour, ATR a vendu plus de 1500 appareils et ses avions volent sous les couleurs de près de 200 compagnies aériennes, dont 60 en Europe.

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