TLT : les 4 personnages d'un scénario explosif

Quatre personnages clés sont au cœur du dossier TLT. Alors que l’avenir de la chaine locale toulousaine se jouera le 29 mai prochain au Tribunal de Commerce de Toulouse, ces quatre personnalités espèrent influer sur le dénouement de ce dossier économique et politique. Portraits d’Emmanuel Schwartzenberg, Anne Oriol, Antoine Grézaud et Jean-Marie Belin.
Emmanuel Schwartzenberg, Anne Oriol, Antoine Grézaud, Jean-Marie Belin

Emmanuel Schwartzenberg

Difficile à cerner, le PDG de TLT est un mystère. Pourquoi le journaliste parisien (Le Figaro, LCI, France Info) a-t-il pris en 2013 la direction de la chaine toulousaine, déjà exsangue ? "Quand Emmanuel Schwartzenberg a repris TLT, c'est comme si on lui avait demandé de courir le 100 mètres haies avec des boulets accrochés aux chaussures" commente, dans un sourire, un proche du dossier. "Il n'était pas obligé d'accepter". "Parano" pour certains, digne de confiance pour d'autres, Emmanuel Schwartzenberg a une communication difficile à décrypter. D'aucuns évoquent "son art de manier les sous-entendus et les phrases à double sens". Aux médias, le PDG affirme qu'il se bat pour éviter la liquidation judiciaire de la chaine. Pourtant, lors de l'audience du 6 mars devant le tribunal de commerce de Toulouse, son avocat Maitre Gorrias a demandé... la liquidation judiciaire. Un "non-sens" que ne comprennent pas les salariés de la chaîne. Quelques jours auparavant, ils avaient déjà voté, le 24 février, une motion de défiance vis à vis de leur PDG : ils l'accusent en effet d'avoir mis en péril la société en ne cherchant aucune solution pour faire vivre le média. En off, les noms d'oiseaux fusent et l'incompréhension semble totale entre le dirigeant et les salariés. Symptomatique de cette discorde, l'ambiance dans les couloirs du tribunal de commerce le 6 mars dernier : Emmanuel Schwartzenberg a attendu la fin de l'audience, à l'écart du personnel de TLT, sans qu'aucun n'échange n'ait lieu. Dès la décision rendue (report de deux mois de la décision), le PDG a filé, sans une réaction ni un mot pour les salariés et médias présents. A-t-il baissé les bras devant la complexité du "bourbier" TLT ?  Souhaite-t-il vraiment que la société soit placée en liquidation judicaire ? Regrette-t-il d'être venu à Toulouse ? "Venir tous les jours au travail avec des salariés qui vous jettent des cailloux, ça ne doit pas être simple" commente un acteur du dossier. Deux ans après son arrivée à Toulouse, Emmanuel Schwartzenberg aurait quoi qu'il en soit commencé à chercher un nouveau poste à Paris.

Anne Oriol

Anne Oriol est la surprenante, exubérante, déroutante, représentante du CE de TLT. Journaliste de la chaine depuis 1994, cette quinquagénaire bavarde et révoltée est aujourd'hui "fatiguée" de la bataille menée depuis 2008 (date de l'ouverture par le tribunal de la procédure de redressement judicaire à l'encontre de TLT). "J'ai connu tous les maires de Toulouse, ils savent que je suis dévouée à la cause de TLT" rappelle-t-elle. Son point de vue sur la chaine est loin d'être aussi pessimiste que celui du PDG Emmanuel Schwartzenberg : "Les comptes de TLT ne sont pas aussi catastrophiques que cela. Si nous avions une régie publicitaire, cela irait déjà beaucoup mieux !". Pour celle qui s'est démenée auprès des élus locaux pour obtenir le renouvellement des COM (contrats d'objectifs et de moyens noués entre la chaine et les collectivités), le modèle actuel ne doit pas forcément évoluer : "Un  média n'est pas une société comme une autre. Toutes les télés locales vivent de subventions. Nous vivons de l'argent public et nous n'en n'avons pas honte." Syndiquée au SNJ (syndicat national des journalistes), Anne Oriol est très remontée contre le PDG de la chaine, contre lequel elle a voté, avec 18 autres salariés, une motion de défiance. Porte-parole des salariés, elle est aussi jugée parfois imprécise, excessive, voire "parano" (là encore...) par ses interlocuteurs. "C'est une vraie personnalité" dit d'elle en souriant l'ancien maire de Toulouse Pierre Cohen. Actuellement Anne Oriol tourne un documentaire qui sera diffusé le 10 avril sur TLT. Son sujet : la famille Baudis.

Antoine Grézaud

À peine arrivé au Capitole comme directeur de cabinet de Jean-Luc Moudenc il y a un an, Antoine Grézaud a été missionné par le maire pour "dépatouiller une situation très compliquée" chez TLT, selon ses propres mots. Ce n'est pas un hasard : le quadragénaire connaît bien le dossier pour avoir été le directeur de cabinet de Dominique Baudis quand ce dernier était président du CSA. "Jean-Luc Moudenc ne souhaite pas la mort de TLT ", n'a cessé de répéter le porte-parole du maire sur ce dossier. Pourtant, parmi les collaborateurs de Jean-Luc Moudenc, certains se seraient prononcés dès le mois d'avril 2014 pour un arrêt du COM entre la Mairie et TLT. "La chaine peut-elle fonctionner quasi exclusivement avec de l'argent public ?" s'interroge Antoine Grézaud, qui recherche un nouvel actionnaire privé. Mais dans ce dossier, l'enjeu n'est pas seulement économique, il est aussi politique : TLT est la première chaine locale de France, créée en 1988 par Dominique Baudis, dont Antoine Grézaud a été très proche. Le bras droit de Jean-Luc Moudenc (qui revendique lui aussi l'héritage "baudisien") se retrouverait dans une situation délicate s'il devait gérer une liquidation judiciaire de la chaine créée par son "mentor", et à laquelle les Toulousains se disent attachés. "Cet héritage de Baudis me booste encore plus pour trouver une solution"confie-t-il. Interlocuteur de confiance des salariés de la chaine depuis un an, Antoine Grézaud, sait pourtant que l'avenir des 20 salariés de TLT est en jeu, ce qui rend sa tâche "compliquée".

Jean-Marie Belin

L'insaisissable Jean-Marie Belin. Le directeur de CTV (actionnaire principal de TLT, qui représente les intérêts de la Mairie) est un "personnage" tantôt chaleureux, tantôt glacial. Ancien président de l'Alliance Centriste 31, il avait fait campagne pour l'UDI Christine de Veyrac pendant les municipales de 2014, avant finalement de rejoindre l'UMP Jean-Luc Moudenc. Quand ce dernier est arrivé au Capitole, il a proposé à Jean-Marie Belin de prendre la direction de CTV, mais aussi du comité de contrôle et de suivi du COM. "Jean-Luc Moudenc m'a choisi car je suis quelqu'un de compétent. Je viens du milieu audiovisuel, je sais gérer les dossiers techniques" assure-t-il, alors  même que certains collaborateurs évoquent ses dossiers "parfois mal ficelés et remplis de fautes". Ancien journaliste et cadre de France 3, aujourd'hui représentant de François Fillon et responsable de Force Républicaine en Haute-Garonne, Jean-Marie Belin est un soutien précieux d'Emmanuel Schwartzenberg, qu'il est venu soutenir lors de l'audience du 6 mars dernier. Installé dans un recoin de couloir du tribunal, lui non plus n'a pas adressé un mot aux salariés. Néanmoins, Jean-Marie Belin assume : il est un des rares acteurs du dossier TLT à affirmer que la liquidation judiciaire n'est pas "une si mauvaise solution", "car elle permet de recommencer sur de bonnes bases, et sans les dettes". Parallèlement, plusieurs proches du dossier soufflent que son ambition serait en réalité de devenir PDG de la chaine. Mais Jean-Marie Belin nie toute ambition personnelle : "cela ne m'intéresse absolument pas".

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