Comment Railcoop veut rassembler 43 millions d'euros et (enfin) lancer sa ligne Bordeaux-Lyon

Nouvel opérateur ferroviaire dans le paysage français, la coopérative Railcoop installée à Figeac (Lot) joue actuellement des coudes pour boucler un tour de table financier d'une quarantaine de millions d'euros. Pour débloquer la situation, quatre conseils régionaux pourraient jouer un rôle crucial dans les prochaines semaines. Une fois ce deal ficelé, Railcoop pourra lancer sa ligne de transport de voyageurs entre Bordeaux et Lyon dès 2024 et accueillir 1,4 million de personnes à terme sur cette liaison. Voici les détails autour de ce deal alors que la coopérative vient de démarrer une levée de fonds en titres participatifs.
En plus de la ligne Bordeaux-Lyon pour le transport de voyageurs, Railcoop et ses 13.000 sociétaires ont d'autres lignes dans les cartons.
En plus de la ligne Bordeaux-Lyon pour le transport de voyageurs, Railcoop et ses 13.000 sociétaires ont d'autres lignes dans les cartons. (Crédits : Railcoop - Lucas Madebos)

Quand ils ont officialisé la création de Railcoop, il y a un peu plus de deux ans, ses sociétaires avaient fait sensation avec leur pari. Relancer des lignes ferroviaires peu voire plus exploitées, aussi bien pour le transport de voyageurs que le fret partout en France, le tout avec le modèle économique de la coopérative. Afin de donner naissance à leur première ligne voyageurs, entre Bordeaux et Lyon, ils ont besoin de 43 millions d'euros au total.

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"Avec cette somme, nous financerons l'acquisition de sept autres rames car nous en avons déjà deux aujourd'hui, et leur rénovation. Une partie serait injectée dans l'aménagement des espaces en gare, ainsi que le recrutement. Cela nous permettrait également de financer l'acquisition d'une locomotive et une dizaine de wagons pour notre activité de fret. Enfin, cela assurerait notre besoin en fonds de roulement", détaille Alexandra Debaisieux, la directrice générale déléguée, notamment chargée de ces questions de financement.

Avec ce plan d'investissements, la coopérative installée à Figeac (Lot) dispose de sa feuille de route jusqu'en 2025, si tout va bien. "Nous devons encore rassembler environ 38 millions d'euros", poursuit la dirigeante. Pour ce faire, Railcoop mise sur le soutien des acteurs bancaires, mais la partie est loin d'être facile.

Le besoin de garanties bancaires

Pour le moment, ils sont peu enclins à soutenir la coopérative lotoise qui veut devenir à terme un opérateur ferroviaire référent en France, en ramenant le train sur certains territoires aujourd'hui délaissés. Seulement, le transport ferroviaire étant ouvert à la concurrence depuis peu et les banques disposant par conséquent de peu de recul sur le potentiel de cette opportunité, faire coïncider les besoins des deux parties est complexe.

"Aujourd'hui, les banques nous demandent de 'dé-risquer' leurs investissements. Cela passe par renforcer nos fonds propres, ainsi que l'obtention de garanties bancaires de la part d'acteurs extérieurs", commente Alexandra Debaisieux.

Pour le premier point, Railcoop vient tout récemment de lancer une levée de fonds à travers l'émission de titres participatifs sur la plateforme Lita. Elle en attend un million d'euros d'ici le 31 décembre, date de clôture de l'opération. Cette dernière est ouverte à tous, contrairement à la première levée de fonds en titres participatifs menée fin 2021 uniquement auprès des 13.200 sociétaires de la coopérative pour un total de deux millions d'euros. "Cela ne donne aucun pouvoir au sein de la société. Le ticket d'entrée est à 500 euros le titre et la coopérative ne remboursera le capital du détenteur du ou des titres que dix ans après. Mais à partir de trois ans après l'émission du titre, la coopérative doit verser environ 3% d'intérêts par an au détenteur. Ces titres participatifs sont considérés comme du quasi fonds propres par les banques puisque c'est la coopérative qui décide quand elle fait sortir le capital pour rembourser les investisseurs", explique la dirigeante.

Quant aux garanties financières demandées, Railcoop s'est rapprochée depuis plusieurs mois de plusieurs conseils régionaux afin qu'ils se portent garants de la coopérative en cas de défaut de paiement, pour un moment de 18 millions d'euros en garantie. Cela permettrait à l'opérateur ferroviaire d'obtenir le double sous forme de prêt bancaire. "Nous sommes allés voir l'Occitanie, Grand Est, Nouvelle-Aquitaine et Auvergne-Rhône-Alpes. Parmi elles, une région est plutôt en lead sur le sujet à savoir l'Occitanie, qui nous accompagne énormément", complète Alexandra Debaisieux. Un dernier point pas surprenant alors que la présidente socialiste de cette région, Carole Delga, a récemment publié une tribune dans la presse en appelant à "une révolution ferroviaire". Mais Railcoop aimeraient que les quatre collectivités approchées se partagent à parts égales la garantie, toutes ayant un intérêt à s'associer au projet. Côté Occitanie, l'officialisation d'une délibération sur le sujet pourrait intervenir dans les prochaines semaines.

Quel calendrier ?

Le bouclage de ce deal financier conditionnera la suite des événements pour Railcoop. "À compter de l'acquisition officielle des rames grâce à ce montage financier, notre partenaire ACC M à Clermont-Ferrand a besoin de 10 mois pour rénover les rames, après leur entrée en ateliers", expose la représentante. Dans ce cas, une mise en service courant 2024 est envisageable, alors que dans un premier temps Railcoop souhaitait un lancement de la ligne Bordeaux-Lyon à la fin de l'année 2022. Mais ce report avait déjà été annoncé en début d'année 2022 devant les contretemps financiers rencontrés par la coopérative.

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En attendant un éclaircissement du côté des finances, de bonnes nouvelles sont arrivées sur le plan technique. Les deux premières rames X72500 acquises auprès du conseil régional d'Auvergne-Rhône-Alpes sont dans "un état technique général bon", selon Railcoop. "Nous sommes agréablement surpris car nous avions des craintes", confie Alexandra Debaisieux. Après rénovation, la coopérative lotoise aimerait exploiter au moins 20 ans ces rames, avec l'ambition de transporter au moins 1,4 million de voyageurs entre Bordeaux et Lyon chaque année selon une dernière étude menée en interne.

Pour ce qui est du fret, si la société travaille sur l'idée d'acquérir son propre matériel, elle en loue pour le moment et ce depuis le lancement de son service fret dans l'Aveyron à la mi-novembre 2021. "Au départ, c'était pour prouver que nous serions capables de faire circuler des trains tous les jours. Désormais, nous voulons monter en puissance et nous avons renforcé nos équipes commerciales sur le fret pour trouver davantage de chargeurs", ajoute la directrice générale déléguée. Pour le moment, un seul chargeur régulier travaille avec Railcoop et ses 37 salariés, mais les équipes y voient là un moyen de booster la trésorerie en attendant le décollage de l'activité voyageurs.

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