Environnement : un Aveyronnais montre l’exemple en Malaisie avec l'hôtel Datai Langkawi

Alors que s'ouvre le dimanche 6 novembre à Charm el-Cheikh en Égypte la COP 27, la 27e conférence de l'ONU sur le climat, l'Aveyronnais Arnaud Girodon a fait de la défense de l’environnement la marque de fabrique du Datai Langkawi. L’hôtel de luxe, dont il est le directeur, est aujourd’hui un modèle d’engagement en matière d’écotourisme et de durabilité.
L'équipe du Datai, dirigée par un Aveyronnais, a fait de la défense de l'environnement sa marque de fabrique.
L'équipe du Datai, dirigée par un Aveyronnais, a fait de la défense de l'environnement sa marque de fabrique. (Crédits : DR)

Niché au cœur d'une forêt tropicale primaire datant de dix millions d'années, le Datai est une légende dans l'univers du luxe à travers le monde. Situé à la pointe nord-est de la Malaisie, au large de la Thaïlande, sur l'île principale de l'archipel de Langkawi, l'établissement est parfaitement inséré dans son environnement. Repensé par les architectes français Didier et Quentin Lefort (du cabinet DL2A qui rappellent qu'au Datai, « la nature a toujours été plus forte que le projet »), l'hôtel vient de rouvrir après la pandémie de Covid-19.

L'établissement épouse à merveille la nature avec sa soixantaine de villas de luxe, en retrait de la mer, perdues dans la végétation sur un îlot cerné par des plages de rêve. Le « resort » propose 122 chambres. L'équipe du Datai a fait de la défense de l'environnement sa marque de fabrique. Cette année, une pépinière de coraux a été créée et même une barrière de corail reconstituée face à l'hôtel. Les clients peuvent la visiter, tout comme la nurserie d'arbres locaux. Ils sont d'ailleurs invités à participer au reboisement ou encore à s'initier à l'apiculture grâce aux ruches installées sur le site.

Le clou de la visite, c'est le « Lab », un bâtiment écologique dont les murs ont été entièrement construits grâce au recyclage de 9 000 bouteilles d'alcool, de vin et de champagne consommées dans les restaurants du Datai, dont l'un est perché à plus de vingt-cinq mètres de hauteur ! Quant aux huit villas de luxe « Rain Forest Pool Villas », leur piscine privée est désormais chauffée par une pompe à chaleur économisant 30 à 50% d'énergie par rapport à un système classique.

Datai Langkawi

La piscine est chauffée par une pompe à chaleur afin de réduire son empreinte énergétique.

Une faune et une flore endémiques

Il faut compter une heure de vol de Kuala Lumpur, la capitale de la Malaisie, puis quarante minutes de voiture pour rallier le Datai. En contrebas, sur la mer d'Andaman, on accède à une incroyable plage sauvage de sable blanc que le magazine National Geographic a classée parmi les dix plus belles du monde. Autour, la jungle s'étend sur 750 hectares. Le must ici, c'est la marche « Canopy Walk ». Guidés par le naturaliste de l'hôtel, les visiteurs traversent à pied la mangrove, au milieu d'une faune et d'une flore endémiques, jusqu'à un spectaculaire pont-passerelle suspendu à quinze mètres au-dessus de la rivière. La balade permet aux clients de s'immerger complètement dans la forêt, de croiser parfois un singe à lunettes et d'être sensibilisés aux dangers pesant sur la nature.

Élu à deux reprises meilleur hôtel du monde par les lecteurs du prestigieux magazine anglais de voyage de luxe « Condé Nast Traveller », le Datai est une légende. Après deux années de fermeture pour cause de pandémie, l'hôtel a rouvert cet automne.

« Depuis le Covid, il y a une prise de conscience importante des clients sur l'environnement, assure Arnaud Giraudon. Mais surtout, sans être philanthropique, on est entouré par la jungle, la plage et la mer. Les hôtels sont tellement pollueurs au niveau déchets et rejets de carbone mais tellement tributaires des alentours et de la communauté que si on ne fait rien pour protéger ça, c'est qu'on n'a rien compris ! »

Le retour des tortues

L'an dernier, Arnaud Girodon et ses équipes ont décidé de se lancer dans le « Datai Pledge », l'engagement du Datai, un ambitieux programme de conservation de la nature basé sur plusieurs piliers explique l'Aveyronnais.

Datai Langkawi

L'hôtel a mis en place en 2021 une structure pour préserver les coraux et la biodiversité aquatique.

« Il y a la protection de la faune et de la flore autour de l'hôtel, la protection de la vie sous-marine, un programme d'éducation des enfants des écoles de Langkawi et enfin, des opérations écologiques. »

Le Datai affirme ainsi être le seul hôtel de toute l'Asie à recycler la totalité de ses déchets. Tout est détruit sur place dans l'incinérateur ou composté et recyclé. On trouve des déchiqueteuses de bois et une machine de fabrication malaisienne qui transforme les déchets plastiques et solides en cendres inoffensives sans pollution de pyrolyse.

À son arrivée, chaque client se voit d'ailleurs remettre une gourde en acier pour éviter d'utiliser des bouteilles d'eau en plastique. Au Datai, les pailles sont en bambou et un jardin potager en permaculture permet à la fois d'absorber le compost produit par les déchets des cuisines et de fournir les restaurants en fruits et légumes. L'eau consommable est aussi produite sur place. Dans le secteur de l'énergie, en revanche, c'est plus compliqué, reconnaît le Français : « On est en pleine jungle, alors les
panneaux solaires, on n'y pense même pas. À part autour du parcours de
golf, il y a trop d'ombre. On ne peut pas mettre non plus d'éolienne. »

Côté faune, l'intensité de l'éclairage a été sensiblement abaissé à la nuit tombée
sur les plages et à la grande satisfaction de toute l'équipe, au bout de dix ans
d'absence, des tortues marines sont revenues pondre sur les plages de l'île !

Sauvegarde du récif corallien

« On a deux espèces d'animaux en danger ici, ajoute encore Arnaud Girodon, un énorme faisan, « the Great Argus », et le « greater mousedeer », une mini-biche. On a mis des caméras dans la forêt pour savoir combien d'individus il reste. On a aussi créé des ponts de passage qui leur permettent d'éviter la route. » Un centre de la nature a aussi vu le jour au Datai. Installé non loin de la plage dans une structure en bambou, il propose plusieurs activités aussi instructives que ludiques pour adultes et enfants.

Après une marche pédagogique sur la plage ou une pêche au plancton, le contenu de la
« cueillette » est passé au microscope. Le centre met aussi en place des programmes de conservation en impliquant les communautés locales, notamment les pêcheurs.

« Les revenus proviennent de donations, d'activités que l'on met en place et d'un montant optionnel mais automatique que l'on demande aux clients pour ce projet, explique Arnaud Girodon. Nous reversons tous les bénéfices à des ONG ou entreprises sociales partenaires. »

Les associations se concentrent actuellement sur l'emploi à travers des initiatives telles que la production de verre, de bougies et de savon, et soutiennent les entreprises locales dans la production de miel, d'huile de coco vierge, de bois durable et d'élevage de poulets biologiques. Elles organisent aussi des balades en mer pour permettre aux clients du Datai d'aller observer des dauphins ou des otaries, ou encore le milan sacré qui a donné son nom à Langkawi. L'Unesco a d'ailleurs décerné il y a quinze ans à l'archipel le label « géoparc mondial » pour sa géo-diversité et sa biodiversité exceptionnelles.

Laisser la plage intacte

Originaire d'Argences-en-Aubrac, un petit village à vingt-cinq kilomètres de Laguiole, la capitale du couteau en Aveyron, diplômé de l'école hôtelière de Saint-Quentin-en-Yvelines près de Paris, Arnaud Girodon, 47 ans, commence son parcours à l'international par l'Angleterre, avec le groupe Accor, avant de passer par Dubaï aux Émirats. Marié et père de trois enfants, depuis seize ans, c'est avec l'Asie que le Français vit une véritable histoire d'amour.

Datai Langkawi

Arnaud Girodon espère le retour des touristes étrangers pour la fin de l'année.

Envoyé d'abord en Thaïlande puis au Vietnam pour des ouvertures d'hôtels, il est depuis 2014 en Malaisie. Après un an et soixante millions d'euros de travaux de rénovation, l'hôtel Datai rouvre donc en 2018, vingt-cinq ans après son premier lancement, à l'époque un pari fou initié par le gouvernement malaisien. Avant la Covid, 60 à 70 % des clients du Datai venaient d'Europe, en majorité du Royaume-Uni. Et quand on l'interroge sur l'hallucinante empreinte carbone que laissent ses clients derrière eux pour venir à Langkawi après un trajet de 10 000 kilomètres en avion, le Français rétorque que c'est « l'essence » même du voyage et que l'aérien ne contribue qu'à hauteur de 1,6 % de la pollution totale dans le monde, selon lui.

« Quand les clients viennent chez nous, ajoute-t-il, parce qu'on est dans cette jungle, ils polluent moins car on absorbe tout. »

Aujourd'hui, avec le nouveau départ du Datai post-pandémie, ce sont les clients malaisiens qui occupent les lieux, en attendant le retour d'une clientèle internationale, espérée à partir de décembre pour les fêtes de fin d'année. « J'ai dû aller démarcher les locaux, reconnaît Arnaud Girodon. La jungle leur faisait un petit peu peur, les Asiatiques croient énormément aux fantômes. Donc il a fallu casser cette image-là mais beaucoup sont venus... et revenus. »

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Commentaire 1
à écrit le 05/11/2022 à 6:28
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et combien coûte le séjour en ce paradis perdu (même pas en France)?

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