Vento-Sol recycle des bateaux pour traiter les déchets agricoles polluants

Installée à Castres (Tarn), Vento-Sol récupère d'anciens bateaux de plaisance inutilisés pour les transformer en cuves de stockage et de traitement des effluents phytosanitaires agricoles, ces eaux de lavage et de rinçage contenant des pesticides. Spécialiste de la gestion des effluents phytosanitaires, la société développe un système d’évaporation des eaux usées basé sur une ventilation forcée. Explications.
La société espère livrer ses premiers Ecobang-Navy dès 2023.
La société espère livrer ses premiers "Ecobang-Navy" dès 2023. (Crédits : DR)

"Les agriculteurs traitent leurs champs avec des produits phytosanitaires, plus communément appelés pesticides. Une fois l'opération terminée, ils doivent nettoyer entièrement le pulvérisateur, à l'intérieur et à l'extérieur. Ces eaux de lavage ne peuvent pas être rejetées n'importe comment et l'agriculteur a l'obligation de les récupérer et plusieurs façons de les gérer. Soit il les dilue et les épand dans les champs. Il peut les stocker dans une cuve et les envoyer en destruction à l'état liquide. Ou alors, il installe un système de traitement des effluents phytosanitaires", explique Nicola Vento.

Son entreprise qu'il a fondé en 2010 à Castres, Vento-Sol, propose aux agriculteurs de stocker ces eaux polluées et considérées comme matières dangereuses dans une cuve et des les évaporer, en interne. Pour cela, elle a mis au point Ecobang, un système qui va souffler de l'air à l'intérieur de la cuve de stockage des eaux et permettre l'évaporation de ces dernières grâce à la "ventilation forcée". Il permet ainsi d'évaporer entre 500 litres/an et 10.000 l/an d'effluents phytosanitaires selon le climat des régions où il est installé.

"Le système Ecobang s'adapte à n'importe quel type de cuve puisque cela consiste à y installer un ventilateur et une cheminée. Par exemple, parmi nos solutions, nous avions des caisses en plastique de 900 litres, en acier qui ont jusqu'à 6.000 litres de contenance ou encore en béton et résine. Nous réalisons des cuves sur-mesure en extérieur ou enterrées."

Lire aussi 4 mnLa crise pousse le groupe coopératif agricole Arterris à accélérer sa transition verte

Le premier bateau qu'il faut remplir d'eau

Ce système adaptable à n'importe quel type de cuve offre donc un champ des possibles énorme. Ainsi, Ecobang peut être installé sur une cuve initialement dédiée au stockage des effluents phytosanitaires ou pas. C'est ainsi que Vento-Sol a eu l'idée de reconditionner d'anciens bateaux de plaisance, inutilisés et destinés à la casse, en cuves de stockage équipées d'Ecobang.

Une fois leur cabines intérieures vidées et transformés, ces bateaux de plaisance résistants sont étanches, chimiquement, physiquement et techniquement adaptés aux eaux polluées par des produits phytosanitaires et respectent le code de l'environnement.

Nommée Ecobang-Navy, cette innovation est une solution écologique et économiquement alléchante pour les agriculteurs. Elle permet de réduire entre 30 % et 60 % le coût par rapport à une cuve neuve en acier inox. Par exemple, une cuve neuve en acier de 4.000 litres de contenance est commercialisée à près de 15.000 euros tandis qu'un ancien bateau d'une même capacité coûte autour de 9.000 euros. De plus, la réutilisation d'anciens bateaux permet de fortement réduire l'impact sur l'environnement en réutilisant d'anciens matériaux et en prolongeant leur durée de vie.

"L'idée est née un peu par hasard pendant le premier confinement. Nous cherchions des remorques pour transporter des cuves et nous sommes tombés sur des annonces de remorques (de transport de bateaux) où les vendeurs donnaient le bateau de plaisance en résine de polyester avec. Je me suis rendu compte qu'il y en avait des milliers à détruire tous les ans, que personne ne sait quoi en faire et qu'ils ne sont pas recyclables. Généralement, ils sont broyés et incinérés", se souvient le fondateur de Vento-Sol.

Une efficacité équivalente aux dispositifs standards

Après une étude de faisabilité et une phase de test de plus d'un an concluantes, la société française spécialiste de la gestion des effluents phytosanitaires lance officiellement la commercialisation de cette nouvelle solution.

Selon la taille du bateau, Ecobang-Navy a une contenance et une capacité d'évaporation de plusieurs milliers de litres. L'innovation convient aux agriculteurs qui ont des volumes intermédiaires d'effluents phytosanitaires. Son efficacité est tout à fait équivalente aux performances des dispositifs standards.

Les bateaux sont transformés et revalorisés (vidé, peinture, etc.) par une entreprise partenaire, Bathô, basée près de Nantes et spécialisée dans la transformation d'anciens navires en logements insolites. Le sous-traitant se charge également de trouver les bateaux adaptés aux besoins des clients de Vento-Sol. Par la suite, si les volumes augmentent, les bateaux seront transformés par des prestataires à proximité des clients.

La société castraise qui reçoit des premières sollicitations de professionnels du monde agricole espère livrer ses premiers Ecobang-Navy dès 2023.

"La solution la plus économique qu'il existe sur le marché"

Cette année, la petite entreprise qui opère et équipe des professionnels dans toute la France a déjà doublé le nombre de solutions Ecobang vendues en tout. Vento-Sol transforme deux devis sur trois en contrat. Ainsi, depuis début 2022, une quarantaine de clients se sont équipés. En tout, la société compte près de 340 installations. Elle détient aussi quelques parts de marché en Suisse, en Espagne, en Belgique et en Italie.

"Que ce soit sur du matériel standard ou du sur-mesure, nous sommes la solution la plus économique qu'il existe sur le marché. De plus, nous pouvons augmenter les performances de certains systèmes concurrents. Avec nos solutions, nous permettons le réemploi et la prolongation de produits qui étaient considérés comme des déchets", affirme le chef d'entreprise.

Aujourd'hui, la petite structure compte trois employés. Cette dernière maîtrise la fabrication de l'ensemble de ses systèmes entre Castres et Lautrec, dans le Tarn. Ralentie par des déconvenues judiciaires et administratives par le passé, l'entreprise a réellement débuté son développement commercial en 2021.

"La gamme Ecobang est actuellement la plus large disponible sur le marché. Nous avons même cinq prototypes en cours d'essais qui pourraient déboucher dès cette année", indique le dirigeant.

Désormais la tête hors de l'eau mais prudente et raisonnable, Vento-Sol souhaite réaliser un chiffre d'affaires compris entre 150.000 et 160.000 euros en 2022, après avoir revendiqué 123.000 euros durant l'exercice précédent.

Lire aussi 7 mnLe Mouton Givré, le premier sac isotherme zéro plastique en matières naturelles

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.