"La croissance verte est un mirage" dénonce une startup du secteur

Spécialisée dans le recyclage des canettes, la startup toulousaine La Boucle Verte a dû mettre fin à son activité d'économie circulaire peu avant le confinement, par manque de demande, après trois ans d'activité. Ses dirigeants ont publié début mai un long témoignage sur les réseaux sociaux, partagé des milliers de fois en quelques jours et suscitant de très nombreuses réactions. Un long argumentaire qui tient à dénoncer "l'illusion d'une croissance verte", impossible à mettre en oeuvre malgré les besoins révélés par la crise du Covid-19. L'un des dirigeants revient pour La Tribune sur cette aventure.
La startup toulousaine La Boucle Verte vient de mettre fin à son activité et dénonce le mirage de la croissance verte.
La startup toulousaine La Boucle Verte vient de mettre fin à son activité et dénonce le mirage de la croissance verte. (Crédits : La Boucle Verte)

Alors que la crise du Covid-19 a démontré le besoin d'un retour à une économie plus locale et moins dépendante des importations (pour ce qui est de la France du moins), une startup toulousaine opérant dans l'économie circulaire a décidé de stopper son activité. Il s'agit de La Boucle Verte, spécialisée dans le recyclage des canettes, née trois ans plutôt.

"L'objectif de cette entreprise était de trouver un modèle économique viable pour financer le recyclage et celui qui a fonctionné le mieux était le média, en verdissant la publicité. Nous proposions à la vente des espaces publicitaires sur des paniers récolteurs de canettes, placés dans les commerces, entreprises, restaurants, etc. Cet argent nous permettait alors de financer la récolte. Mais les ventes se sont essoufflées et nous nous sommes rabattus sur la proposition d'une offre de triage et recyclage des déchets pour les commerces du centre-ville, malheureusement nous n'avions pas assez de clients", raconte à La Tribune Charles Dauzet, le co-fondateur de La Boucle Verte.

Face à ce constat, qui a provoqué l'arrêt de la jeune pousse en février dernier, l'équipe décide de poster, le 2 mai, un long témoignage de leur aventure entrepreneuriale sur les réseaux sociaux intitulé  "La désillusion d'une startup de l'économie circulaire".

"Nous avons pris en pleine poire la seule leçon importante qu'il fallait retenir en cours d'entrepreneuriat : se focaliser sur le besoin client. À vouloir absolument trouver un modèle économique pour collecter nos canettes, nous avons complètement oublié que pour vendre quelque chose il faut répondre au besoin propre à un individu ou une entreprise et qu'un besoin "sociétal" comme l'écologie ne suffit pas", reconnaît l'équipe dans ce témoignage.

"Une prise de conscience progressive"

Au-delà d'une auto-critique argumentée, le témoignage de ces jeunes entrepreneurs dénonce les dysfonctionnements profonds d'une filière d'avenir. Des révélations et un cri de colère qui est devenu virale sur le web en moins de 48 heures. Ainsi, le message a été partagé des dizaines de milliers de fois, d'une manière ou d'une autre, donnant un écho national à cette prise de parole.

"En postant ce message, jamais nous ne pensions qu'il rencontrerait un tel engouement et pourtant, nous avons reçu des tonnes de messages, aussi bien positifs que négatifs qui nous permettront de grandir. Par ailleurs, le confinement a permis une certaine prise de conscience à ce sujet et le succès rencontré par notre message prouve bien que nous ne sommes pas les seuls à partager cette vision", estime le dirigeant.

 La vision selon laquelle que la croissance verte est "un mirage", "une illusion", "une croyance", voilà par quels mots Charles Dauzet et la Boucle Verte qualifient un concept dans lequel ils croyaient dur comme fer trois ans plus tôt.

"Notre prise de conscience a été progressive. Au début, je pensais que nous pourrions recycler chaque déchet et nous sommes allées de déception en déception. Au final, nous nous sommes rendus compte que la croissance verte était un mirage."

Défenseur d'une décroissance désormais

Si l'internaute peut lire dans son témoignage les propos suivants : "La conclusion que nous avons tiré de cette histoire est que ce secteur, en très lente évolution, ne répondra pas aux enjeux de la crise écologique et qu'il promeut malgré lui la production d'objets peu durables et donc le gaspillage de ressources", faut-il pour autant enterrer toute croyance en une croissance verte ? La réponse est sans appel pour Charles Dauzet.

"Quand nous consommons, nous polluons forcément. Désormais, nous croyons en la décroissance. Techniquement, nous ne voyons pas comment il est possible de faire autrement. Chaque innovation technologique encourage à la consommation car chacune d'elle produit une pollution que nous n'avions pas prévu au début. Prenez l'exemple d'Internet. Il devait permettre une réduction drastique de la consommation du papier et au final sur les 20 dernières années celle-ci s'est quasiment stabilisée. Il faut revoir notre modèle de développement maintenant. Comme on dit, le meilleur déchet est celui que nous ne produisons pas. Dans le meilleur des cas, il faudrait revenir à des déchets seulement organiques", argumente à La Tribune le Toulousain.

L'équipe de La Boucle Verte appelle donc dans son témoignage à garder "les bonnes choses", non pas en les sélectionnant sur un aspect économique, mais plutôt en se basant sur des axes comme l'intérêt pour la société et l'impact sur l'environnement.

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Commentaires 21
à écrit le 08/05/2020 à 20:38
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Il n'y a pas de croissance verte, cela n'a aucun sens. L'économie se sont des flux physiques, de la tranformation d'un état A à un B, et au passage il y a toujours des pertes. Le probème c'est que notre civilisation est une civilisation qui extrait...

à écrit le 08/05/2020 à 16:57
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Non mais vous croyez que les SITA (Suez) ou Véolia avaient attendus cette startup pour effectuer le recyclage et revaloriser les déchets ? Système qui est déjà en place a Toulouse et dans une majorité de communes depuis des années ? Boites de conserv...

à écrit le 08/05/2020 à 14:16
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Beaucoup de startup ferment leurs portes, qu'elles soient vertes ou pas. Qu'est-ce qu'il faut en conclure ?

à écrit le 08/05/2020 à 12:48
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La croissance verte a toujours été un oxymore : Dans un monde fini, la seule attitude "verte" à avoir, c'est celle de la décroissance.

à écrit le 07/05/2020 à 18:38
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Le mirage n'est pas dans la croissance verte, il serait plutôt dans l'idée que "le marché" ou une "proposition de valeur" (qui repose de toute façon sur un mécanisme de marché non contraint, ce qui revient au même) puisse de lui même intégrer une que...

le 07/05/2020 à 21:47
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Mais que faites vous de la main invisible du marché, autoregulatrice de tous les problèmes et de toutes les turpitudes. ? (It's a joke ! Je 😉) Dire qu'on a fait avaler cette connerie à des générations entières, moi compris. Et que beaucoup y croit...

à écrit le 07/05/2020 à 17:44
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Toutes ses startups Qui finissent dans l'abîme.Pauvres jeunes!!! Il n'y Que l'industrie Qui enrichit un pays Et ses Concitoyens.

le 07/05/2020 à 21:44
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Les Allemands et les Italiens, dans des contextes différents, l'ont très bien compris d'ailleurs.

à écrit le 07/05/2020 à 15:45
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bon le pb des start ups, c'est toujours de faire ' facon internet', c'est a dire de faire du gratuit finance par la pub.... sans etre mechant, c'est un modele qui avoue tres vite ses limites je ne connais pas cette boite, mais je pense que les etu...

le 07/05/2020 à 16:02
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Quand on est dans un concept basé sur une rupture comportementale, une étude de marché peut à mon humble avis être difficilement concluant. Seul le pari sur l'avenir permet de savoir si on a fait fausse route ou pas et ça se paie cash.

le 07/05/2020 à 19:10
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si l'etude de marche donnera des signes si c'est bien fait on peut avoir ' un debut de la ou on va avoir des pbs' evidemment si c'est pour dire qu'il va y avoir exactement 203.021 clients c'est autre chose les etudes de marche ne vont pas permet...

le 07/05/2020 à 19:12
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euh bon apres effectivement faut prendre un risque, et ca se paye ca s'appelle ' entrepreneuriat, et avec une boulangerie traditionnelle, le pb est le meme.... piloter le risque est le gros pb

à écrit le 07/05/2020 à 15:01
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est il vraiment nécessaire votre concept ? non. vouloir faire du fric sur tout et nettoyer sa conscience n'est pas facile n'est pas Total qui veut. Croissance verte, transition écologique, finance verte, capitalisme durable, horizontalité dans les...

le 07/05/2020 à 16:05
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C'est vrai qu'il y en a pour qui le goût du vert n'est essentiellement q'une forte affinité pour le billet vert - le Dieu Dollar.

à écrit le 07/05/2020 à 14:55
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LE PIB est mort, passons enfin au BIB et à tout ce que cette notion peut apporter comme sources de profit de toutes sortes, on se demande comment ils font tous pour ne rien voir, la financiarisation de notre économie est son tombeau.

le 07/05/2020 à 15:48
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haha vous serez le premier a gueuler a etre paye en ' points de bonne conscience et de bonheur', et pas en euros sonnants et trebuchants, pas vrai?

le 07/05/2020 à 18:18
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Il est vrai que si ce sont nos mêmes lapins qui doivent gérer au nom des mêmes dragons célestes, ça ne sert à rien du tout.

le 07/05/2020 à 21:41
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Ça existe déjà, dans ce pays merveilleux qu'est la Chine : ça s'appelle le passeport social !

à écrit le 07/05/2020 à 14:28
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Pas pu lire l'article, mais l'accroche est prometteuse Bravo pour cet éclair de lucidité... tardif. Et sincèrement désolé pour le cession d'activité.

à écrit le 07/05/2020 à 14:13
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Il y a 40 ans de ça on pouvait se faire trois sous d'argent de poche en ramassant les bouteilles en verre consignables, avec des étoiles sur le col, et on ramenait ça au supermarché. Dans certains pays c'est toujours valide, via des machines à l'entr...

à écrit le 07/05/2020 à 12:58
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Moi je me serai pas lancé dans un projet pareil.... Charles Dauzet a eu du mérite ; même si son analyse de départ était un peu courte, il a essayé, il s'est défoncé, et il est resté honnête en déposant le bilan proprement et en témoignant objectivem...

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