Colère des taxis face à la concurrence des nouvelles entreprises

600 taxis ont bloqué aujourd'hui la circulation à Toulouse pour protester notamment contre la multiplication des "véhicules de tourisme avec chauffeur (VTC)". Une nouvelle concurrence que les chauffeurs de taxi jugent "déloyale", mais qui reflète un marché en pleine mutation et de plus en plus concurrentiel.
Les taxis ont manifesté aujourd'hui à Toulouse

"Nous sommes exaspérés." Gérard Gélis, président départemental du syndicat des artisans taxi (SAT), résume l'état d'esprit des 250 chauffeurs de taxi toulousains (ils sont 680 en Haute-Garonne). Des chauffeurs qui ont le sentiment d'être lésés depuis l'arrivée d'une nouvelle concurrence qu'ils jugent "déloyale", les VTC (véhicules de tourisme avec chauffeur), activité officiellement créée en 2009 et à l'époque cantonnée aux véhicules de luxe pour clients de luxe. "Il y avait un service spécifique et un coût adapté. Aujourd'hui, ces sociétés se multiplient en profitant d'une règlementation très floue", dénonce Gérard Gélis.

Le chauffeur de taxi rappelle que sa profession est soumise à de nombreuses contraintes : "le contrôle du véhicule, le casier judiciaire vierge pour les chauffeurs, la visite médicale, le paiement de la licence, l'achat du compteur, l'entretien des panneaux lumineux..." Les revendications des chauffeurs de taxi sont claires : le gel de toute nouvelle immatriculation en VTC de la part d'Atout France (Agence de développement touristique de la France), et l'interdiction pour les VTC de s'équiper de compteurs et de signaux lumineux "comme c'est déjà le cas à Paris", selon le syndicaliste.

"Nous ne faisons pas le même métier"
De leur coté, les sociétés de VTC se défendent en arguant qu'elles ne font pas le même métier que les taxis. "Ils font du transport, nous proposons un service", explique Sylvain Lazaro, cofondateur de Pink me Up, société de VTC toulousaine créée en 2012. "Les taxis transportent une personne de façon ponctuelle d'un point A à un point B. Nous, nous fidélisons la clientèle, les prestations sont différentes et nécessitent tout un aspect commercial et marketing." Par ailleurs, le jeune créateur d'entreprise réfute l'expression de concurrence "déloyale". "Nous exerçons une activité totalement légale, régie par des textes qui lui permettent d'exister", explique-t-il.

L'entreprise Chauffeurs&Go, qui vient de s'implanter à Toulouse, propose quant à elle des chauffeurs pour conduire le véhicule personnel de la personne qui se déplace. Son responsable Sud-Ouest Mathieu Pinaudeau, estime qu'il ne fait pas du tout concurrence aux taxis mais remarque que ces derniers auraient tout à gagner à se remettre en question, "à être plus à l'écoute des utilisateurs. C'est dans la nature des choses de subir la concurrence, il faut savoir d'adapter." Le syndicaliste Robert Gélis l'admet : "Il faudrait se moderniser, proposer plus de services."

Un service différent, des contraintes différentes

"Nous mettons une bouteille d'eau dans la voiture, nous ouvrons la porte, aidons à décharger les bagages, affirme Mathieu Pinaudeau de Chauffeurs&Go, on voit rarement les chauffeurs de taxi faire cela." "Notre métier aussi a ses contraintes, assure Sylvain Lazaro. Certes nous ne payons pas de licence mais nous devons avoir un budget marketing et commercial important. Et nos chauffeurs sont davantage diplômés, savent parler plusieurs langues." Par ailleurs, pour obtenir l'immatriculation délivrée par Atout France, les conditions sont strictes : "pas de casier judiciaire, avoir son brevet de secourisme, un nombre précis d'années de conduite, avoir le bac ou être chauffeur depuis au moins un an". Le fondateur de Pink me Up met également en avant l'interdiction de rouler dans les voies de bus ou de prendre un passager qui hèle le véhicule dans la rue, contrairement aux taxis.

Moderniser la mobilité
Pour Pink me Up comme pour Chauffeur&Go, un mot revient souvent pour définir leur métier : "modernité". "Il existe une nouvelle forme de mobilité, avoir un chauffeur n'est plus réservé aux clients fortunés. Les gens veulent transformer leur temps de transport en temps de travail", analyse Mathieu Pinaudeau. Pour Sylvain Lazaro, il faut démocratiser l'usage du chauffeur : "Normalement les taxis sont là pour les gens qui n'ont pas de véhicule. Il n'y a qu'en France qu'il y a aussi peu de taxis par habitant avec des tarifs aussi élevés. En 2012, l'Aéroport Toulouse-Blagnac a connu une hausse de 10 % de ses passagers, il n'y a pas un seul taxi en plus. Il y a largement assez de demande pour se partager le marché, et même plus." À Toulouse, 55 taxis s'occupent exclusivement des trajets vers/depuis l'aéroport pour un trafic de 7 559 350 passagers enregistrés en 2012.

Sophie Arutunian
©photo Rémi Benoit

En savoir plus :

Ce jeudi 10 janvier, les taxis protestaient également contre la réforme du transport sanitaire (mise en place de l'article 44 de la nouvelle loi de financement 2013 de la sécurité sociale dont le but est de faire des économies). Robert Gélis estime que de nombreux artisans taxi sont en danger de disparition avec la mise en concurrence avec d'autres sociétés "alors que les taxis qui transportent des patients pratiquent déjà des prix négociés avec la Sécurité Sociale". L'intersyndicale réclame l'abrogation de cet article.

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