EADS : un nouveau pacte d'actionnaires sans droit de veto individuel pour les États

Un nouveau pacte d'actionnaires sera annoncé ce lundi soir ou mardi. Il actera la parité entre les États allemand et français qui auront 12% du capital chacun (entre 4 et 5% pour l'Espagne). Ces trois actionnaires de référence n'auront plus de droit de veto individuel sur les choix opérationnels de la direction, mais ont trouvé un système pour préserver l'ancrage européen d'EADS.
Un nouveau pacte d'actionnaires sera annoncé ce lundi soir ou mardi et actera la parité entre les Etats allemand et français qui auront 12% du capital chacun

Un mois et demi après l'échec des négociations sur la fusion entre EADS et BAE Systems, la structure actionnariale du groupe va évoluer considérablement à travers la mise en place d'un nouveau pacte d'actionnaires. Sauf coup de théâtre, une annonce est prévue sur le sujet ce lundi soir après Bourse, ou mardi matin. Elle actera la volonté de l'État allemand non seulement d'entrer au capital d'EADS (via la banque publique Kfw) mais aussi d'avoir la parité avec la France (qui possède aujourd'hui 15%) sur le niveau de participation et des droits dans l'entreprise.

Les contraintes du droit néerlandais
Un objectif impossible dans le pacte d'actionnaires actuel (qui regroupe la France, Lagardère côté français et Daimler côté allemand) en vigueur depuis la création du groupe en 2000. Car, si l'Allemagne veut entrer au capital en disposant des droits attachés à sa présence dans le pacte d'actionnaires, elle doit lancer une OPA sur le reste du capital conformément au droit néerlandais (EADS est une société de droit hollandais).

La France, l'Allemagne et l'Espagne ne doivent pas dépasser 30% du capital
Le seul moyen d'y arriver était donc d'élaborer un nouveau pacte d'actionnaires entre, cette fois-ci, la France, l'Allemagne et l'Espagne, puisque Daimler et Lagardère souhaitent se désengager. Avec une condition sine qua non : que la participation globale de ces trois États ne dépasse pas 30% du capital du groupe pour éviter de devoir lancer une OPA obligatoire sur le reste du capital. C'est ainsi que l'Allemagne disposera de 12% du capital, la France aussi et l'Espagne entre 4 et 5%. Ces dispositions entreront en vigueur après l'assemblée générale du groupe en mai 2013.

La France vendra d'ici à deux ans 3% ses actions
La France, qui dispose aujourd'hui de 15% du capital, doit donc se séparer de 3% de ses actions. Paris a obtenu de ne pas les vendre tout de suite. Ses actions seront neutralisées au sein d'une fondation hollandaise et la France disposera selon nos informations d'un délai (probablement de deux ans) pour les vendre dans le but d'en optimiser le prix.

Préserver l'ancrage européen d'EADS
Pour préserver le caractère européen d'EADS (cher aux États) et préserver le groupe de toute OPA hostile, les négociateurs ont trouvé une parade en s'inspirant de l'accord prévu avec BAE. Selon des proches du dossier, il sera écrit noir sur blanc dans les statuts du groupe que la majorité des administrateurs au conseil d'administration et des membres du comité exécutif soient européens. Le président du conseil d'administration et le directeur général devront l'être également. En outre, il sera également inscrit que tout nouvel actionnaire ne pourra détenir plus de 15% du capital et des droits de vote. Toutes ces dispositions ne pourront être modifiées que si elles sont votées à plus de 75% des voix en assemblée générale. "Mais comme les États possèderont 30% des voix, ils auront un pouvoir de blocage", explique un proche du dossier. Surtout que, sur toutes ces clauses spécifiques, les trois États ont décidé que si l'un d'eux devait voter contre, tous devaient de le suivre. Une sorte de droit de veto collectif.

Une gouvernance un peu moins dépendante des actionnaires
En échange, les États sont prêts à relâcher leur mainmise sur EADS en acceptant une gouvernance un peu moins dépendante des actionnaires. Cela passera selon nos informations par l'absence pour les États de droit de veto individuel sur les choix opérationnels de la direction. Mais aussi par l'impossibilité qui leur sera faite de nommer directement les administrateurs. Sur le plan des hommes, rien ne change. Le président exécutif Tom Enders est confirmé dans ses fonctions.

La prise de conscience post-BAE
"L'échec de la fusion avec BAE Systems a fait prendre conscience de l'échec de la gouvernance d'EADS, explique un fin connaisseur du groupe. L'objectif de ce nouveau pacte d'actionnaires est de sécuriser l'ancrage européen d'EADS qui n'était pas assuré avec l'évolution du pacte actuel. Les États actionnaires auront leur mot à dire sur l'essentiel mais pas sur le quotidien du groupe. C'est une vraie normalisation." Reste à voir néanmoins comment cela va se mettre en musique au quotidien.

Rachat d'actions
Les négociations ont cherché à organiser la sortie des actionnaires privés, Daimler et Lagardère, lesquels devraient chacun céder un bloc d'actions de 7,5%, d'ici à la fin de l'année pour le groupe allemand, en 2013 pour le groupe français. Lagardère pourra notamment vendre ses parts à travers un rachat d'actions par EADS prévu en 2013. Ouvert en théorie à tous les actionnaires, ledit rachat d'actions pourrait permettre essentiellement à Lagardère de vendre.

Fabrice Gliszczynski (La Tribune)
© Photo Rémi Benoit

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