Comment l'Occitanie compte mieux recycler les textiles usagés

Un nouveau cluster régional baptisé Recycl'Occ Textile vient d'être lancé pour accélérer le recyclage des textiles en Occitanie. Il regroupe des industriels de la filière comme Paul Boyé (qui habille les gendarmes français) ou les Filatures du parc (dont le fil fabriqué à partir de matériaux recyclés équipe la Zoé de Renault) mais aussi des acteurs chargés de collecter les vêtements donnés par les particuliers et des ateliers de confection de vêtements upcyclés. Parmi les projets du cluster figure la création d'une textilothèque, une place de marché régionale des textiles usagés.
Chaque année, 640.000 tonnes de textiles, linge de maison et chaussures sont commercialisées en France, soit 9,5 kg ou 42 pièces par habitant.

"Il y a un gaspillage monstre des textiles." Fanny Cottret sait de quoi elle parle. Elle a travaillé pendant 20 ans dans l'industrie de la mode pour de grandes marques. "J'étais en charge du développement des matières, de l'achat des tissus de la collection jusqu'à la finalité du produit. Nous achetions 30 mètres de tissu pour utiliser seulement cinq mètres et jeter le reste. Il y avait aussi des entrepôts entiers de tissus pas utilisés et qui ne sont pas réutilisés", décrit celle qui a rejoint depuis le cluster Recycl'Occ Textile.

L'industrie du textile est considérée comme la deuxième industrie la plus polluante au monde avec 1,2 milliard de tonnes de gaz à effet de serre émis chaque année. D'autant qu'aux tissus gaspillés lors de la confection des vêtements, il faut ajouter les montagnes de piles d'articles invendus. D'après l'Institut français de la mode, chaque année, 640.000 tonnes de textiles, linge de maison et chaussures sont commercialisées en France, soit 9,5 kg ou 42 pièces par habitant.

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"En Occitanie, sur près de 10 kilos de textile mis sur le marché, seuls 3,5 kg par habitant sont collectés en vue d'être recyclé. Il y a encore des progrès à faire en matière de collecte", souligne Emmanuel Kasperski. Ce dernier est en charge de l'animation du nouveau cluster régional baptisé Recycl'Occ Textile, lancé officiellement le 1er juillet et qui a pour vocation d'accélérer le recyclage des textiles en Occitanie.

Il regroupe déjà une trentaine d'acteurs parmi lesquels figurent des industriels de la filière comme Paul Boyé (qui habille les gendarmes français) ou les Filatures du parc (dont le fil fabriqué à partir de matériaux recyclés équipe la Zoé de Renault) mais aussi des acteurs chargés de collecter les vêtements donnés par les particuliers, les têtes de réseaux de l'inclusion dans l'emploi, l'école des Mines d'Alès et des ateliers de confection de vêtements upcyclés. Le cluster est présidé par Mickael Marras, co-fondateur de JVS Textiles Perpignan qui fabrique par exemple des tote bags personnalisés à partir de textiles recyclés.

Une économie du recyclage bouleversée

La création de cette nouvelle structure fait suite à une étude soutenue à hauteur de 20.000 euros par la région Occitanie pour trouver de nouveaux relais de croissance pour la filière du recyclage des textiles. Cette dernière a été confrontée à de grands bouleversements ces dernières années.

"L'industrie du recyclage se fonde sur la revente des textiles collectés à travers les conteneurs Relais, les associations comme la Croix Rouge. Il existe aussi des recycleurs privés qui vivent de cette activité depuis plusieurs années. Mais dernièrement, les entreprises de la filière étaient très inquiètes. Déjà, la qualité des textiles a beaucoup diminué. Les textiles sont de plus en plus d'origine asiatique avec une durée de vie beaucoup plus courte. Ce sont donc des pièces difficiles à revendre. Le développement de la vente en ligne avec Leboncoin ou Vinted a monétisé les vêtements d'occasion mais a détourné les articles de meilleure qualité des containers de collecte, cela a fragilisé les entreprises du recyclage.

Ensuite, il y a eu une baisse des ventes de chutes de textile à l'export puisque beaucoup de pays vers qui la France exportait ces chutes sont devenus eux mêmes des exportateurs de textiles non réutilisables. Et puis, pour de plus en plus de textiles, il n'y a quasiment aucune solution de recyclage", décrit Emmanuel Kasperski.

Fanny Cottret, consultante pour le cluster ajoute : "Ce n'est pas en recréant des sacs à partir de chutes de tissus qu'on va sauver l'industrie du textile. Il faut trouver des solutions à plus grande échelle. D'autant que nous n'avons pas forcément besoin de réinjecter des vêtements sur le marché. Des solutions émergent comme de recréer à partir de ces textiles du fil pour générer de la matière vierge."

Une textilothèque pour mi-2022

Pour remédier à ces freins, le cluster a déjà plusieurs projets à l'étude. Parmi lesquels figure la création d'une textilothèque, une place de marché régionale des textiles usagés, qui devrait être mise en ligne d'ici à septembre 2022.

"Il existe déjà en France des plateformes qui mettent en relation les fabricants de textile avec des ateliers de confection qui proposent d'acheter en ligne à prix modéré des stocks de tissus inutilisés et invendus. Des marques comme Saint-Laurent ou Kiabi le font. Mais la spécificité de notre textilothèque est qu'elle va viser beaucoup plus large puisqu'on pourra y acheter des surplus de stocks, des chutes de tissus, mais aussi toute une gamme de textiles recyclés, de vêtements upcyclés, des voiles de nautisme, de parachute, jusqu'aux liners de piscine qui peuvent être utilisés pour faire des sacs. Il y aura la même chose pour tout ce qui est mercerie sur cette plateforme. L'autre particularité c'est que les textiles seront principalement collectés en Occitanie", poursuit l'animateur du cluster.

Recycl'Occ Textile a également pour projet d'ouvrir une boutique qui commercialiserait toute cette diversité de textiles inutilisés. Parmi les autres projets du cluster, la société ariégeoise Vertex a lancé une étude portant sur le démantèlement des composants chaussures en vue de leur recyclage. La mise en place d'une offre de formation (collecte, tri, couture, upcyling, vente en boutique...) à destination des salariés des entreprises adhérentes du cluster a également démarré. "J'espère que ce cluster pourra déjà agir à l'échelle de l'Occitanie et qu'il pourra éventuellement être un exemple pour d'autres régions de France", conclut Fanny Cottret.

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