Y a-t-il trop d'hôtels à Toulouse ?

La construction de près de 800 chambres d'hôtels supplémentaires est prévue à Toulouse dans les deux prochaines années, alors même que les hôteliers peinent déjà à remplir les établissements existants. Ces professionnels du tourisme tirent la sonnette d'alarme. Toulouse Métropole lance un audit et promet d'adapter son schéma de développement hôtelier.
Hall du Citiz Hôtel, à Toulouse
Hall du Citiz Hôtel, à Toulouse (Crédits : Rémi Benoit)

Y-a-t-il encore de la place pour construire de nouveaux hôtels à Toulouse ? Au regard des projets annoncés, déjà très avancés ou encore à l'étude dans l'agglomération, la réponse est oui ! D'ici à 2018 en effet, pas moins de 8 projets d'hôtels, dont une majorité de trois étoiles d'une centaine de chambres, devraient voir le jour. Parmi eux, le futur Mama Shelter (3* et 111 chambres) ouvrira ses portes fin 2017 - début 2018 en lieu et place de l'ancien cinéma des Nouveautés, sur les boulevards.

Plus surprenants, car loin des trottoirs de l'hyper-centre, de nombreux autres projets sont aussi annoncés dans différentes zones d'aménagement concertées (Zac) de la ville. Par exemple, un hôtel trois étoiles verra le jour à Borderouge, un autre de même catégorie à Toulouse Montaudran Aerospace. Même chose à Andromède, où le promoteur Altaréa Cogédim a annoncé la construction d'un hôtel 4* de 140 clés.

À la Cartoucherie, l'aménageur Oppidea, assisté du maître d'ouvrage Clipperton, a programmé l'implantation de deux hôtels dont une auberge de jeunesse privée, et cherche un investisseur.

Plus au sud, le promoteur Icade, filiale de la Caisse des dépôts, est chargé d'attirer de nouveaux investisseurs sur l'Oncopole depuis 2004 et de proposer aménagements et services en accord avec Toulouse Métropole. Sur ce site, après l'ouverture d'une résidence hôtelière de 163 clés, puis récemment, de l'hôtel rond 3* (90 clés), dessiné par l'architecte Jean-Paul Viguier, le promoteur nous confirmait à l'automne dernier la signature imminente avec un investisseur pour un hôtel 4 étoiles de 150 clés, dont le principe était acté avec la métropole. Et, aujourd'hui, si le projet a (encore) pris du retard, il n'est en rien remis en question.

"Les discussions prennent un peu plus de temps que prévu, mais il reste évidemment d'actualité", indique Jean-Philippe Saint-Antonin, le responsable du développement Icade Promotion qui espère "viser une clientèle d'affaires avec ce nouvel équipement".

hotel rond maquette

Maquette de l'Oncopole avec "l'hôtel rond " © photo Rémi Benoit

Un taux d'occupation de 64,2 % pour les hôtels à Toulouse en 2015

Derrière leurs réceptions et face à des plannings de plus en plus difficiles à remplir, les hôteliers ne voient pas arriver ces projets d'un bon œil. À la question "manque-t-on d'hôtels à Toulouse ?", la réponse de Sandra Lamper Baumgartner, directrice du grand hôtel de l'Opéra et présidente du club hôtelier, fuse.

"Toulouse n'occupe que la 8e place en taux d'occupation hôtelière en France avec 64,2 %* de remplissage en moyenne en 2015 après Paris, Nice, Nantes, Montpellier, Bordeaux, Aix-Marseille et Lyon... Et ce chiffre est stable depuis des années. Alors nous, les hôteliers, nous estimons que nous avons aujourd'hui une offre suffisante à la fois en gamme et en nombre et sommes plutôt dans la préoccupation de savoir comment on peut remplir nos hôtels tous les jours !"

Une des raisons de ce faible remplissage ? Le déséquilibre entre tourisme de loisir (25 %) et tourisme d'affaires (75 %). Les hôtels de la ville se remplissent très correctement entre le mardi et le jeudi, mais beaucoup plus difficilement le week-end.

Preuve d'ailleurs que les touristes ont manqué à l'appel l'année dernière, la Ville rose est avec Paris (- 1 %) la seule ville de France qui a revu ses tarifs à la baisse (- 0,7 %). Niveau prix, Toulouse occupe désormais le 7e rang des métropoles françaises, avec un prix moyen de nuitée à 74 euros, contre 79 euros à Montpellier et 70 euros à Bordeaux. "Marseille, Montpellier et Bordeaux nous sont passées devant ces dernières années", estime Sandra Lampée Baumgartner qui souligne "qu'Aix-Marseille a profité de son titre de capitale européenne de la culture, Bordeaux de son classement à l'Unesco et que Montpellier fait de meilleurs scores que Toulouse avec un taux d'occupation à 68,9 %."

chambre crowne plaza

Une chambre du Crowne Plaza, hotel 5* place du Capitole © photo Rémi Benoit

L'arrivée du PEX justifie-t-elle la construction de nouveaux hôtels ?

Aujourd'hui, selon les hôteliers toulousains, il faudrait améliorer l'attractivité et l'image de la ville avant même de construire de nouveaux hôtels. Ainsi, même la construction du futur Parc des expositions (Pex) n'est pas une raison suffisante à leurs yeux.

"Laissons le Pex sortir de terre, nous avons cinq ans devant nous avant qu'il ne se concrétise vraiment. Et, d'ici là, le site de l'aéroport est largement pourvu en hôtels", pointe la présidente du club hôtelier.

Selon elle, si le site aéroportuaire manquait d'une offre il y a quelques années, ce n'est plus le cas aujourd'hui.

"Il y a le Radisson, le Marriot, le Holiday Inn Express, et Airbus qui a prévu d'ouvrir son propre site d'hébergement, avec 150 chambres. D'ailleurs, actuellement, le taux d'occupation du parc hôtelier n'est que de 61 % sur l'aéroport", assure-t-elle.

Une réalité qui n'a pas empêché l'aéroport Toulouse-Blagnac d'annoncer la construction d'un hôtel 4 étoiles de 148 chambres et 1 000 m2 de salles de réunion au cœur de l'aérogare.

Toulouse Métropole lance un audit sur le sujet

Cette réalité de terrain tranche forcément avec les nombreux projets en cours et a décidé la collectivité à lancer un audit sur la question. "Jusqu'à présent, il n'y avait pas de schéma de développement hôtelier et nous sommes en train de le mettre en place", plaide Sylvie Rouillon-Valdiguié, adjointe au maire, présidente de So Toulouse et en charge du Développement touristique à Toulouse Métropole.

"Aujourd'hui, ce que l'on sait, c'est que Toulouse dispose de 14 000 lits et est largement dotée à hauteur de ses besoins, reconnaît l'élue. Pour y voir plus clair, nous lançons donc une analyse du territoire au niveau touristique, dans le cadre du schéma de développement économique, avec l'appui de l'agence de maîtrise d'ouvrage Pro Tourisme. En fonction des résultats, nous discuterons avec les promoteurs."

Pourtant, derrière cette volonté de remise à plat, la même collectivité dessine les programmes d'aménagement des Zac comme Montaudran, l'Oncopole, ou encore Borderouge et la Cartoucherie et programme de futurs hôtels.

"Les hôtels qui sont fléchés le sont dans le cadre de la montée en puissance de Toulouse, comme à Montaudran ou à l'Oncopole, et je ne peux que constater que des investisseurs se positionnent", se défend Sylvie Rouillon-Valdiguié.

Pas sûr que l'argument soit suffisant pour les hôteliers qui seront audités dans les prochaines semaines par la société Pro Tourisme. Verdict en septembre prochain.

* Données issues de l'Observatoire hôtelier et para-hôtelier de l'agglomération toulousaine de la CCI de Toulouse mené en partenariat avec Toulouse Métropole, le Mairie de Toulouse, l'Office du Tourisme et la Communauté d'agglomération du Muretain

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.